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Dans le rétroviseur : Les grandes marches vers la liberté – Chronique d’un soulèvement populaire (1990–1991)

Le 26 mars 1991, le régime militaire du général Moussa Traoré s’effondrait sous la pression populaire, après plus de deux décennies de pouvoir sans partage. Cette chute historique n’a pas surgi du néant ; elle fut le fruit d’une série d’événements courageux et douloureux, de luttes citoyennes, d’actions concertées de jeunes, d’intellectuels, de partis en devenir et de syndicalistes qui, au péril de leur vie, ont semé les graines de la démocratie malienne. Retour, dans le rétroviseur de l’histoire, sur les principales manifestations de rue qui ont marqué l’ultime phase de contestation d’un régime essoufflé et répressif.

15 octobre 1990 : Les prémices de l’insurrection

Bamada.net-Tout commence avec un geste modeste mais fondateur : une poignée de jeunes bamakois entament, dans le centre-ville, une marche insolite pour réclamer la démocratie. Une initiative vite violemment réprimée par les forces de sécurité. Les manifestants sont arrêtés et brutalisés. Ce petit groupe deviendra, quelques mois plus tard, l’Association des Jeunes pour la Démocratie et le Progrès (AJDP), fondée le 5 janvier 1991, avec à sa tête Moussa Keita. La presse officielle, à travers L’Essor, les traitera de « fous de la démocratie ». L’histoire leur donnera raison.

10 décembre 1990 : Le CNID brise le silence

Profitant de la Journée internationale des droits de l’homme, le CNID-Association organise une marche massive qui réunit plus de 10 000 personnes dans les rues de Bamako. Les slogans sont clairs : « LIBERTÉ, MULTIPARTISME, UNION DANS LA DIVERSITÉ ». L’Adéma-Association et l’AMDH refusent de participer, chacune pour ses raisons, mais la portée symbolique de cette manifestation est immense. Le pouvoir en place comprend que la contestation gagne en légitimité et en audace.

30 décembre 1990 : L’union fait la force

Pour la première fois, le CNID et l’Adéma marchent côte à côte. En dépit des provocations orchestrées par les militants de l’UDPM, la marche est un succès : 30 000 manifestants scandent leur soif de liberté et de pluralisme. Une nouveauté fait son apparition : les membres d’une association religieuse, Hizboulah Al Islamia, rejoignent le cortège, arborant le Coran et des slogans en arabe.

18–19 janvier 1991 : L’armée face à la rue

Le CNID organise une marche sous le mot d’ordre : « Soldats, vous êtes nos frères ! ». Mais la main tendue vers l’armée est accueillie par des tirs de grenades lacrymogènes. Me Mountaga Tall est blessé, 22 personnes arrêtées. Le lendemain, l’Adéma tient un meeting sur le rôle de l’armée. Là encore, la répression est brutale. Plusieurs figures du mouvement démocratique, dont Ali Nouhoun Diallo, Bocar Sall, Halidou Touré, et Adam Ba Konaré, sont blessées.

21–23 janvier 1991 : Les étudiants entrent en scène

Les élèves et étudiants, regroupés au sein de l’AEEM, enclenchent une nouvelle étape : les « casses techniques ». Des bâtiments ciblés, symboles du pouvoir et de l’injustice, sont saccagés ou incendiés. La répression est sanglante : Mamadou Macalou, Drissa Sidibé, et d’autres tombent sous les balles. Des tanks sont déployés dans Bamako.

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Le 22 janvier, le journaliste Belco Tamboura, de l’hebdomadaire L’Aurore, est arrêté, roué de coups, emprisonné, puis hospitalisé, le bras fracturé. Le 23 janvier, quatre morts et une trentaine de blessés sont enregistrés, à Bamako et Sikasso. Hamidou Diabaté, Secrétaire général du CNID, est enlevé à son domicile.

3–4 mars 1991 : Vers une coalition nationale

Une marche commune ADEMA-CNID-AJDP-JLD se déroule pacifiquement. L’armée, pour la première fois, observe sans intervenir. Les manifestants réclament une conférence nationale souveraine, le multipartisme intégral et une commission d’enquête sur les tueries de janvier.

Le lendemain, l’AEEM manifeste devant le ministère de l’Éducation nationale pour exiger la démission du ministre Bakary Traoré. Soumeylou Boubeye Maïga, journaliste et cadre de l’Adéma, est interpellé.

12 mars 1991 : L’ADIDE proteste contre le chômage

L’ADIDE, épaulée par l’AJDP et la JLD, perturbe un colloque organisé par le régime sur le chômage. La manifestation est dispersée avec violence. Le régime montre sa fébrilité face à une jeunesse de plus en plus déterminée.

17 mars 1991 : La mémoire comme étendard

En hommage à Abdoul Karim Camara, dit Cabral, assassiné le 17 mars 1980, une marche silencieuse est organisée par l’AEEM, l’Adéma et le CNID. De l’École Normale Supérieure jusqu’au cimetière de Hamdallaye, une marée humaine marche dans le silence, la douleur, et la dignité. La tombe de Cabral ne sera retrouvée que bien plus tard, en août 1991, à Lafiabougou.

22–25 mars 1991 : L’insurrection finale

L’AEEM, en colère face à l’impasse de ses revendications, appelle à la mobilisation générale. Bamako explose. Des femmes rejoignent les cortèges, criant justice et demandant la libération des élèves détenus. Le pouvoir réagit par une répression d’une violence inouïe. Du 22 au 25 mars, près de 300 morts et des milliers de blessés sont recensés. Mais la mobilisation ne faiblit pas.

Des images insoutenables, captées en cachette par Harouna Racine Keita, cadre du Centre National de Production Cinématographique (CNPC), font le tour du pays, puis du monde. Le 22 mars, un couvre-feu est décrété dans 13 villes du Mali. L’UDPM vacille. Le régime est à genoux.

26 mars 1991 : Le mur tombe

Sous la pression populaire, une partie de l’armée, menée par Amadou Toumani Touré, se rallie aux manifestants. Le général Moussa Traoré, au pouvoir depuis 1968, est renversé. Une transition démocratique s’engage. Le sacrifice de milliers d’anonymes n’aura pas été vain. Le Mali s’ouvre enfin à une ère nouvelle.

Conclusion : Une mémoire à entretenir, un héritage à défendre

Ce parcours de luttes, de douleurs, mais aussi de dignité, ne doit jamais être oublié. Il rappelle que les libertés ne s’obtiennent jamais sans effort, sans engagement, sans courage. Il revient à chaque génération de préserver les acquis démocratiques chèrement gagnés.

 

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BEH COULIBALY

 

Source: Bamada.net

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