Suite aux pourparlers d’Alger en cours et ay communiqué des mouvements Cadre de Concertation et d’Actions Ganda Koy, du Front de Libération Nationale (FLN) et de Bouctou Protection, le Président de la Coordination des Mouvements des Forces Patriotiques et de Résistance (CMFPR2), M. Ibrahim Abba Kantao. Dans cet entretien, il explique les raisons profondes qui les ont poussés (CMFPR2) à dire à leurs quatre délégués de signer pour le fédéralisme. Mieux, notre interlocuteur fait un cours magistral sur les trois concepts de fédéralisme, de régionalisation et de statut particulier. Lisez plutôt !
« Aucun des trois concepts ne violent les pré-requits », a dit le président de la CMFPR2
M. Ibrahim Abba Kantao : Le débat à Alger est focalisé sur trois concepts : statut particulier, régionalisation et fédéralisme. A notre niveau, nous avons approché les experts pour qu’ils nous expliquent chaque concept, les tenants et aboutissants. C’est dans ce cadre que nous avons passé une journée de travail pour comprendre et analyser ces concepts. Je rappelle que le statut particulier a été déjà consacré par le Pacte National de 1992.
Ce n’est pas quelque chose de nouveau qui a été signé par le Mali avec les mouvements et fronts unifiés de l’AZAWAD. Selon nos experts, le statut particulier était de donner à ces régions, une certaine autonomie à travers des élus ; et que pour sortir de la crise de cette rébellion, le pacte National avait estimé que la décentralisation était la solution. C’est-à-dire, un mode de gestion en période de paix puisqu’on sortait d’une crise militaire et politique.
Revoir la politique de décentralisation actuelle
Cela veut dire qu’il faut revoir la politique de décentralisation actuelle qui ne cadre plus avec les réalités et l’évolution dans ces trois régions nord du Mali.
Absolument puisqu’elle ne peut pas être la solution d’aujourd’hui. Donc, il faut la revisiter. Ensuite, il faut comprendre que le statut particulier, on met tout le contenu que l’on veut. En guise de rappel, le District de Bamako a un statut particulier. Pour quoi les gens ne réagissent pas?
Créer des régions viables
Aussi, nos experts ont expliqué que la régionalisation veut dire que l’on donne des pouvoirs très importants aux régions, des compétences autonomes mais qui ne veut pas dire se séparer du pouvoir central de Bamako donateur. Pour que la régionalisation soit opérationnelle, il faudrait qu’on crée des régions qui puissent être viables. Donc, ces régions auront une certaine autonomie dans la gestion des affaires.
Et pour avoir des régions viables qui puissent être des pôles de développement, il faut tenir compte premièrement, de certains paramètres tels que l’existence de ressources naturelles ou des activités économiques importantes ; deuxièmement, il faut que les régions soient faciles à sécuriser ; troisièmement il faudrait que les différents Cercles qui constituent la région que les Chefs lieux ne soient pas éloignés de plus de cent kilomètres.
Cela veut dire, tenir compte de la polarisation des zones de production et des zones de consommation ; quatrièmement : tenir compte des conditions socio culturelles, c’est-à-dire que les communautés qui vivent, aient une sorte d’harmonie, des conditions socio culturelles équilibrées. Il faut qu’il y ait un certain équilibre. Il faut retenir compte que ces quatre critères sont essentiels pour avoir des régions qui seront opérationnelles.
Le fédéralisme
C’est une organisation entre Etats. Par exemple la fédération Helvétique est constituée de Cantons. Mais de façon, générale, la Fédération est constituée d’Etats. Selon nos experts, le Fédéralisme nécessitera une révision de la Constitution actuelle qui n’est pas adaptée.
Sans une grande sensibilisation, il y aura des écueils…
Mais ce schéma ne pourra marcher sans des problèmes tels que : – L’organisation du référendum; risques de conflits ethniques dus à un niveau de compréhension limité, voir difficile. Donc cela devra nécessiter beaucoup de sensibilisation et de débats.
Donc aller au fédéralisme, c’est avoir à l’esprit le contexte régional, national et international puisque nous sommes dans un monde qui évolue. L’autre remarque est que sera-t-il possible de refaire la même chose au Sud ?
Aucun des trois concepts ne viole les pré-requits
La question est de savoir si ces trois concepts sont en contradiction avec la ligne rouge tracée par le Président de la République qui dit que : « que tout est négociable sauf l’intégrité territoriale, la laïcité de l’Etat ; la forme Républicaine, l’unicité du pays… ». Donc, selon nos experts tous les concepts que je viens de développer, ne remettent pas en cause ces pré-requits sus cités. A partir de cet instant, est ce qu’on peut dire que demander une de ces formes (régionalisation, fédéralisme et statut particulier), c’est de demander la partition du Mali dans la mesure où tout reste dans le cadre définit par le Président de la République ? Non !
Ici, les pré-requits sont respectés. En ce moment, il est important que nous analysions et abordons cette question de la résolution de notre crise avec intelligence, tact et esprit de discernement. Ce qui est dramatique de la situation puisque certains n’expliquent pas ces différents concepts et travaillent à intoxiquer les populations.
Les acteurs d’Alger sont suffisamment outillés
Et je ne doute pas que les différents acteurs qui sont à Alger sont suffisamment outillés pour analyser et convenir d’une solution qui puisse satisfaire tout le monde et constituer un règlement définitif de cette crise.
Après cet atelier, que nous eu avec les experts, nous comptons en organiser pour approfondir ces réflexions afin de donner plus d’éléments à nos représentants pour les aider dans les discussions. En tout cas, après toute analyse, nous avons compris qu’il fallait aller vers des experts pour comprendre la situation de ces trois concepts qui ne sont pas inventés. Pourtant, le cas du District de Bamako est là.
Pas de partition du pays : Les temps ont changé, il faut s’adapter…
Qu’est ce que cela nous coûtera de trouver les ressorts nécessaires en se parlant pour que tout le monde trouve son compte?
Et je veux dire que les temps ont changé, il faut s’adapter. Loin de nous, toute idée de partition du pays car, aucun des trois concepts que je viens de développer, n’est en contradiction avec l’intégrité territoriale, la laïcité, la forme républicaine qui ont été tous signés dans les accords de Ouagadougou et la feuille de route.
Mali Demain : Des mouvements de la CMFPR2 (Cadre de Concertation d’Action Ganda Koy, le FLN et Bouctou Protection) viennent de faire un communiqué pour se démarquer de vos représentants qui sont à Alger puisque le fédéralisme n’a jamais été retenu par la coordination nationale. Qu’en dites-vous ?
La grande majorité a décidé de soutenir nos représentants d’Alger
M. Ibrahim Abba Kantao : Tout le travail de réflexion qui a été fait, ils étaient présents. Nous sommes en contacts permanent avec nos représentants à Alger qui nous envoient des messages réguliers. C’est fort de cela, que nous avons tenu une réunion lundi 15 septembre dernier, au cours de la quelle, la grande majorité a demandé de soutenir nos représentants en leur apportant toute l’assistance nécessaire, y compris technique (l’apport des experts). Evidemment, le cadre de Concertation d’Action Ganda Koy, a été mis en minorité.
Le Mouvement Bouctou Protection était absent. Quant au FLN, il ne saurait y avoir deux chefs pour le FLN au sein de la CMFPR2. C’est pour cela que j’ai conseillé à Mahamadou Maïga de rencontrer Amadou Abdoulaye Cissé qui se trouve présentement à Alger. En attendant que cette cohésion soit faite, ce FLN de Maïga, n’avait pas besoin de signer ce communiqué. Et je leur ait demandé
d’attendre le retour de Amadou Abdoulaye Cissé d’Alger. Le moment est mal choisi.
Le communiqué de ces mouvements est inapproprié
En tout cas, ce communiqué qui a été fait est inapproprié et inopportun parce que nous sommes dans une démarche pour s’approprier ces différents concepts et savoir comment s y prendre. Pour quoi, s’exciter ?
Nous avons fait un communiqué pour manifester toute notre solidarité avec nos représentants à Alger qui sont au nombre de quatre personnes qui se sont sacrifiées pour défendre tous les combattants de la CMFPR2 et nos communautés. Nous avons mieux à faire que de ne pas reconnaître cet esprit de sacrifice.
Un appel ?
Tous ont une lourde responsabilité…
M. Ibrahim Abba Kantao : Je demande à tous ceux qui sont chargés d’informer, de sensibiliser et de défendre les intérêts des uns et des autres, à comprendre qu’ils ont une lourde responsabilité puisque c’est une mission difficile, qui exige beaucoup d’humilité et un sens élevé de la responsabilité. Cette mission exige de chacun d’eux, l’oubli de soit ; les intérêts personnels ne doivent pas prendre le pas sur l’intérêt général. Le seul profit à tirer, c’est de s’assurer qu’on sorte de la crise avec une solution qui soit définitive.
Aux combattants de la CMFPR2 de rester vigilants
A tous les combattants de la CMFPR2, je leur demande de rester vigilants, sereins et de ne pas réagir aux provocations par ce que j’ai l’impression que certains essayent de manipuler l’opinion. Cela ne nous avancera en rien. Il faut donc rester optimiste sur l’issue de ces pourparlers d’Alger.
Propos recueillis par Bokari Dicko
Source: Mali Demain