Des heurts ont éclaté dans le nord du pays alors que d’ex-putschistes se rebellent près de Bamako.
Au Mali, la tension est de plus en plus forte entre les autorités et les rebelles touaregs. Après les accrochages de ces derniers jours à Kidal, les forces françaises et onusiennes tentent de relancer le dialogue. À Bamako, les autorités sont par ailleurs confrontées à une fronde de la part de soldats de l’ex-junte à l’origine du coup d’État de mars 2012.
«Il y a de la provocation, de la surenchère. Le MNLA essaie de créer une autre dynamique que celle de la discussion.» Pour ce conseiller du ministère malien de la Défense, la poursuite du processus de discussions entre les rebelles touaregs et les autorités de Bamako est «fragilisée» par les accrochages survenus dimanche et lundi à Kidal: jet de grenades, tirs de mitraillettes, attaque d’une banque par des hommes en armes… Aucune victime n’est à déplorer.
Une partie des assaillants au moins appartient au MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad), d’autres n’ont pas été identifiés. Un calme précaire est revenu dans la ville depuis lundi après-midi, mais les populations et les autorités craignent une reprise des violences.
N ous encourageonsle président malien à respecter ses engagements pour trouver une solution politique à la crise qui nous oppose
Le porte-parole du MNLA
«C’est le gouvernement malien qui viole ses engagements», accuse de son côté Mossa Ag Attaher, porte-parole du MNLA. Lors de la signature de l’accord d’Ouagadougou en juin dernier, Bamako et les groupes armés présents dans le nord du Mali avaient respectivement pris divers engagements. Aujourd’hui, les rebelles touaregs accusent les autorités maliennes de ne pas avoir libéré tous les prisonniers dont les noms avaient alors été fournis, et de ne pas respecter les conditions de cantonnement fixées pour les combattants du MNLA.
En fin de semaine dernière, les groupes armés ont donc décidé de suspendre leur participation aux différentes commissions mixtes créées dans le cadre de cet accord. Ce week-end, ils ont également montré qu’ils étaient capables de reprendre les armes.
«Cela signifie que pour eux, cet accord n’était qu’une trêve,» se désole le conseiller du ministre de la Défense. «Nous voulons œuvrer à la réussite de l’accord d’Ouagadougou, plaide pourtant le porte-parole du MNLA, nous encourageons le président malien à respecter ses engagements pour trouver une solution politique à la crise qui nous oppose.»
Mardi, un pas devait être fait en ce sens par le gouvernement malien, qui devait procéder à la libération d’une vingtaine de prisonniers du MNLA et de leurs alliés du HCUA (Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad). Et le gouvernement malien se dit prêt à poursuivre le processus en cours. Des Assises nationales pour le Nord sont prévues dans les semaines qui viennent, qui doivent précéder la tenue de négociations officielles entre Bamako et les groupes armés sur le statut territorial des régions du nord du Mali.
Mais les rebelles touaregs exigent un préalable: «Nous demandons une rencontre d’urgence, explique Mossa Ag Attaher, du MNLA, afin d’exposer nos doléances.» Une rencontre qui réunirait les groupes armés, la médiation burkinabé, la Minusma et la force Serval. Mais pas les autorités maliennes. Le principe d’une telle réunion devra donc être discuté par la délégation envoyée à Kidal par les Nations unies.
Sur un autre front, les autorités maliennes sont également confrontées à une situation à peine moins délicate: une dizaine de militaires faisant partie de l’ex-junte à l’origine du coup d’État de mars 2012 a pris le contrôle lundi du camp militaire de Kati, proche de Bamako. Leur ancien leader, le capitaine Sanogo, ayant été récemment promu général, les militaires séditieux demandent à leur tour des primes et des promotions. Et utilisent à cette fin la méthode qui a réussi à leur ancien mentor: la force.
Ainsi n’ont-ils pas hésité à faire parler les mitraillettes et à prendre en otage un colonel proche de Sanogo. Le colonel a été blessé mais libéré au bout de quelques heures, et les mutins ont obtenu d’être reçus par le ministre de la Défense et par le chef d’état-major des armées en personnes. Hier, le calme était revenu dans le camp militaire.
«Les contacts sont maintenus avec les représentants des contestataires», explique le colonel Maïga, porte-parole de l’armée malienne. «Il s’agit de ramener la paix et la quiétude.» Au prix d’une magnanimité qui ne cadre pas vraiment avec la volonté affichée par le nouveau président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, dit IBK, de renforcer et de réformer l’armée.
Pressé par ces derniers événements, le président malien, IBK, a écourté mardi sa visite en France, après avoir rencontré dans la matinée son homologue François Hollande.
David Baché
Source: Le Figaro