A l’annonce de la signature d’un accord relatif à la création d’une zone de libre-échange entre Etats Africains la semaine dernière, on ne peut que s’interroger sur le but et surtout sur l’apport d’une telle action pour les Etats signataires.
La création d’une zone de libre-échange représente certes une avancée sur le sentier de l’intégration prônée par les dirigeants du continent. Cependant quel impact pourra-t-elle avoir sur le pouvoir d’achat du consommateur et sur la croissance dans les pays signataires ? Cette question parait légitime quand on sait ce que représentent les taxes douanières dans la constitution des budgets d’Etats dans de nombreux pays dont le Mali.
La création de cette zone est à première vue à l’avantage des pays producteurs qui sont rarissimes sur le continent. Cela constitue sans nul doute la première inquiétude car on se demande ce que les pays signataires peuvent bien échanger entre eux à part des marchandises produits ailleurs. Ne valait-il pas mieux de jeter les bases d’une production interne pour alimenter les marchés intérieurs avec de produits « made in Africa » pour donner tout son sens à cette action hautement politique ? Il est vrai que la solution au sous-développement chronique du continent passe par une solution commune, mais il semblerait que les dirigeants africains sautent les étapes cruciales telles que la relance de la production interne, la création et l’approvisionnement d’un marché commun et l’élaboration d’une politique d’échange basée sur l’offre des uns et des autres à l’image des oranges marocaines et des oignons maliens. Une zone de libre-échange profiterait mieux aux Etats Africains si par exemple, l’UEMOA et la BOAD s’investissaient davantage dans la mise en valeur des potentialités des pays africains. Dans le domaine laitier, le Mali a une potentialité qui frôle les deux milliards de litre /an dont seulement 9 cents millions sont exploités. Avant toute création de zone de libre-échange, les Etats Africains doivent d’abord parvenir à assurer la consommation intérieure et ensuite approvisionner les marchés intérieurs pour enfin s’ouvrir sur l’extérieur avec des produits compétitifs. C’est à ce prix qu’ils tireront profit de toutes les politiques d’intégration. Aussi naïf que cela puisse paraitre, l’effort de la relance économique sur la base des productions internes tant redouté sinon évité par les dirigeants est et demeure la seule voix du salut et ne saurait être éternellement occulté. Pour une fois de plus l’Afrique n’a-t-elle pas mis la charrue avant les bœufs ?
Bouba Sankaré
Le Forum