Le président de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali (Ccim), Youssouf Bathily joue sur un double front dans l’embargo imposé à notre pays. Selon lui, il s’agit d’approvisionner correctement le pays en denrées de première nécessité et faire en sorte que les usines ne s’arrêtent pas faute de matières premières.
Le Mali vit sous embargo depuis plus d’un mois. Le 9 janvier dernier à Accra au Ghana, les chefs d’Etat de la Cédéao et de l’Uémoa ont décrété la fermeture des frontières des Etats de la Cédéao avec notre pays en plus du gèle financier de la Bceao. Des mesures adoptées par les chefs d’Etat de la Cédéao qui les justifient comme étant des représailles contre les autorités de la transition, accusées de n’avoir pas présenté un calendrier électoral de fin de transition.
Pour éviter ce piège fatal à l’approvisionnement de notre pays en denrées de première nécessité et au financement économique, le gouvernement de concert avec les opérateurs économiques, ont joint leurs efforts pour que les consommateurs ne soient pas pénalisés. Des missions ont été envoyées dans les ports de Guinée et de Mauritanie, qui n’ont pas fermé leurs frontières. La Mauritanie n’est pas membre des deux organisations sous-régionales (Cédéao-Uémoa) et la Guinée visant la même situation puisque accusée d’avoir fait un coup d’Etat contre Alpha condé, a refusé d’appliquer les sanctions contre le Mali.
Selon Youssouf Bathily, leur travail dans cette situation délicate pour notre pays, consiste à tout mettre en œuvre afin que les Maliens puissent acheter les produits dont ils ont besoin et éviter toute rupture de stocks.
De retour d’une mission de Nouakchott en Mauritanie la semaine dernière avec le ministre de l’Industrie et du Commerce, Mahamoud Ould Mohamed à la tête d’une forte délégation, M. Bathily nous a fait savoir que « depuis le déclenchement de l’embargo, les opérateurs économiques et l’Etat se sont donnés la main pour que la population trouve les produits de consommation courante à des prix abordables ».
Sur l’impact de l’embargo que notre pays traverse, le président de la Ccim ouvre son cœur. A ses dires, « d’un point de vue, l’embargo ne nous a pas affecté, mais d’un autre côté, nous avons senti le coup. Mais le plus important aujourd’hui est que les gens ne meurent pas de fin et qu’ils puissent trouver les produits de première nécessité à des prix abordables, pas à cause du ramadan qui s’approche et pour lequel des dispositions sont prises bien avant l’embargo par le Conseil national des prix, mais pour minimiser les effets du blocus économique et commercial qui nous sont imposés». A voir de près, la douleur ressentie par Youssouf Bathily est au niveau de nos industries de transformation dont les matières premières commençaient à manquer à un moment donné. Il s’agit notamment des usines de ciment pour le clinker et de plastiques pour les graines de plastiques.
Un mauvais souvenir
Beaucoup de ces industries avaient commencé à avoir des difficultés d’approvisionnement. Ce qui semble un mauvais souvenir depuis quelques jours, à en croire le président de la faîtière des commerçants maliens. « Nous avons réorienté nos marchandises en direction des ports de desserte de notre pays. Ce qui a contribué à anéantir cette pénurie de matières premières, avec l’arrivée, il y a quelques jours, d’un nombre important de camions sur le corridor Conakry-Bamako ». Il s’agit là d’une des retombées de la mission gouvernementale sur Conakry et Nouakchott dont le but, selon M. Bathily, était d’inciter les autorités portuaires de ces deux pays voisins, à faciliter davantage le trafic avec notre pays.
Toujours pour le président de la Ccim, nos opérateurs économiques fréquentaient déjà les ports de Conakry et de Nouakchott, mais l’embargo a été un facteur déclenchant de la réorientation de l’ensemble du trafic de notre fret vers ces ports. « Nous avons profité de ces différentes missions pour demander aux autorités portuaires de ces deux pays, de prioriser notre fret tout en évoquant la problématique liée à l’approvisionnement sans faille de notre pays en provenance de ces deux corridors », explique-t-il.
Abdrahamane Dicko
Mali Tribune