MARCHÉ DE LÉGUMES ” WONIDA “
Le porte-monnaie dégarni des vendeuses
Quitter son domicile le matin de très bonne heure pour faire des commerces peu rentables et ne revenir qu’après la tombée de la nuit, c’est ce que font les femmes du Wonida, à Bozola. D’autres le surnommeraient sans doute « le royaume des femmes battantes » pourquoi pas ? Le marché Wonida ou « place kôrô » est considéré comme le plus achalandés des marchés de légumes et fruits de la capitale malienne. C’est le lieu où se retrouvent plusieurs femmes, dès 4h du matin jusqu’au crépuscule. Certes, elles font face à de nombreuses difficultés comme la cherté des marchandises, mais ces femmes ont initié une devise : « vendre, même dans la difficulté, afin de tirer son épingle du jeu ».
Elles vendent pratiquement les mêmes choses : des tomates, gombos, aubergines, oignons, choux-pommes, piments, concombres etc. Le marché wonida est un véritable carrefour pour les bamakoises. C’est à 6h précises que nous nous sommes rendus sur les lieux. Ne disposant presque pas de place pour étaler les marchandises, certaines vendeuses restent longtemps debout pour ne rater aucune occasion de s’attirer de la clientèle. Le vacarme que crée le bruit des sotrama et des transporteurs de colis n’empêchent nullement les vendeuses de légumes frais d’attirer l’attention des passants avec des phrases comme : « venez ! j’ai ce qu’il vous faut ! », « les prix sont moins chers de mon côté ! », « je suis en promo aujourd’hui ! », « venez ! venez ! ».
D’un premier constat, l’on penserait que les vendeuses de légumes du « Wonida » se frottent quotidiennement les mains. Mais, est-ce réellement le cas ? A la question, Mme Dembélé Batoma Kéita, vendeuse depuis 35 ans, répond par la négative. D’après elle, courage et persévérance n’aboutissent toujours pas à la satisfaction. Elle pointe du doigt la hausse du prix de l’engrais, produit essentiel pour la culture des légumes. « Actuellement, les vendeurs et cultivateurs de légumes souffrent de la hausse du prix de l’engrais. Le sac d’engrais est vendu à 30 000 francs CFA », explique- t- elle. En rentrant dans les détails, elle fait savoir que l’argent qu’elle dépense pour l’approvisionnement est supérieur à ce qu’elle gagne. « La hausse que connaissent les légumes, est due au coût exorbitant de l’engrais et de l’essence. Le frais de location de véhicules de transport entre Kolokani et Bamako s’élèvent à 75 000 francs CFA. La vente de légumes est devenue très difficile car elle n’est plus rentable comme avant ».
A quelques marches de notre précédente interlocutrice, se trouve Djènèba Traoré, une autre vendeuse. « Le marché est trop lent », se lamente-elle. Continuant d’arranger ces marchandises, elle nous explique les multiples difficultés auxquelles elle fait face dans sa vente. En guise d’expression de son désarroi, elle nous exhibe son sac de choux-pommes. « Je me suis procuré ce sac de choux à 7 500 Francs CFA. Le marché est rude et les jardiniers ne cessent de se plaindre », lance-t-elle. Et Djènèba de poursuivre : « Nous faisons plusieurs jours avec les mêmes marchandises. Dès fois, je suis contrainte de jeter certaines marchandises putréfiées parce que les légumes ne peuvent pas être conservés longtemps ».
Les prises de bec entre vendeurs, clients et transporteurs de colis, ne se font pas rares. Se souciant peu de sa sécurité, Khadidja ne rate aucune occasion de se faufiler entre les sotrama. De son point de vue, les porteurs de bagages maltraitent ces marchandises. « Eh ! Petit, fais attention ! ces marchandises m’ont beaucoup coûté ! », s’exclame-t-elle. S’empressant de nous partager son idée sur la cherté des légumes, elle déplore ceci : « les jardiniers ne cachent pas leur mécontentement face à la cherté de l’engrais. La situation fait fuir beaucoup de clients ».
Le marché « Wonida » est un lieu prisé pour la commercialisation de nombreux légumes made in Mali. Malgré les difficultés de vente, les vendeuses du Wonida détiennent le monopole de la vente sur ce marché. Néanmoins, elles ont profité de notre passage pour lancer un cri de cœur à l’endroit des autorités de la Transition. « Nous nous tournons vers Assimi et son gouvernement pour qu’ils revoient notre situation. Ces petits commerces de légumes constituent le seul moyen pour nous de gagner notre vie », conclut Khadidja.
Siguéta Salimata DEMBELE
Source: les échos mali