En conflit depuis plus d’un an, les camps Salikou Sanogo et Gouagnon Coulibaly de l’Union pour la République et la Démocratie (URD) sont au bord de la rupture totale. Après la confirmation du premier comme Président du parti par la Cour suprême le 12 avril dernier, les militants du second se mobilisent pour la création d’un nouvel appareil politique.
Des discours séparatistes. De la tension en interne entre partisans des deux camps. Depuis le décès de Soumaïla Cissé, la vie au sein de son parti n’a rien d’un long fleuve tranquille. Ce qui avait débuté par une lutte de pouvoir entre des cadres du Bureau National vire peu à peu à l’effritement du regroupement politique. Pour cause, la confirmation au poste de Président de l’URD de Gouagnon Coulibaly passe mal auprès des partisans du Professeur Salikou Sanogo. « Des juges ont décidé d’enlever la fragrance de Soumaïla Cissé à l’URD. Aucune décision ne peut me parquer en dehors de mes valeurs. Adieu, cher parti », a réagi à la suite de la décision judiciaire Moussa Sey Diallo, Secrétaire adjoint à la Communication du parti, proche du camp Salikou Sanogo. Laissant supposer son retrait de l’URD, même si, officiellement, il ne l’a pas encore fait. Pour l’heure, seuls Sidy Angoiba de la section URD de Douentza et Issa Sissoko de celle de la Commune IV ont franchi le pas. Le Pr Sanogo, principal opposant à la présidence de Gouagnon coulibaly, ne s’est non plus pas résigné au verdict de la Cour suprême.
Autant de graines de discorde qui ne réduisent plus les dissensions actuelles à une simple difficulté de gestion d’une crise interne. Le point de non retour semble acté et la division du parti, de l’avis de plusieurs analystes, est désormais inévitable.
D’ailleurs, pour le camp Sanogo, l’heure est « à tourner la page » et à « avancer ». Quitte à créer un nouveau parti ? « Tous les responsables, militants, sympathisants de l’URD […] respectueux de nos valeurs sont résolument engagés à perpétuer le combat de nos défunts Présidents sous une forme plus saine et plus conviviale. C’est dans cette perspective qu’il nous faudra rester sur la scène politique et disposer d’un nouvel appareil », a indiqué le 16 avril dernier, lors d’une rencontre avec des militants acquis à sa cause, l’homme politique, qui est longtemps demeuré le second de Soumaïla Cissé.
Cette volonté est aussi partagée par Daouda Touré, le Secrétaire général du parti de la Poignée de main. « Nous nous sommes battus. Mais avec le verdict de la Cour suprême la procédure judicaire est arrivée à son terme. Nos partisans nous ont donc demandé de laisser l’URD et de créer un autre parti. Nous nous attelons à cela », a-t-il fait savoir lors d’une vidéo de présentation de vœux à l’occasion de la récente fête du Ramadan.
À cet effet, selon une source bien introduite, une réunion de travail d’une Commission chargée de la rédaction des textes du nouveau parti a eu lieu dans le local qui servait de bureau du Cabinet du chef de file de l’Opposition à Badalabougou le week-end du 5 au 6 mai 2023, sous la présidence de Salikou Sanogo. Les statuts et règlement, la charte, le nom et le logo auraient déjà été établis.
Dans son ambition de scission, le camp Sanogo risque cependant de se confronter à des difficultés. Plusieurs cadres du parti susceptibles d’être candidats à une élection jouent encore la carte de la prudence. « Beaucoup sont en train de voir de quel côté va pencher leur section d’abord. C’est ce qui va beaucoup jouer sur cette histoire, car, pour eux, il ne s’agit pas de suivre la volonté d’un homme, mais plutôt celle de leur base. Tous ceux qui aspirent à un poste électif vont vouloir consulter les directives de leurs sections. En outre, plusieurs d’entre eux ne se sentent pas prêts à quitter le parti après tant d’efforts fournis pour son implantation », explique un membre du Bureau National. Pour convaincre les sections, au niveau des deux camps l’ambition demeure la même : « préserver les idéaux de feu Soumaïla Cissé ». C’est tout le paradoxe de ce combat entre deux protagonistes qui se réclament d’un même idéal mais que tout semble séparer pourtant.
Source : Journal du Mali