De plus en plus, des universités privées de tous types ouvrent leurs portes partout au Mali. Des écoles de droit en passant par des écoles de gestion, de finance-comptabilité, de banque jusqu’aux écoles de commerce. A Bamako et comme dans certaines régions, nous disposons aujourd’hui d’une large gamme d’universités privées. A voir et entendre la publicité faite autour de ces écoles, on peut penser immédiatement qu’elles sont identiques à celles des pays occidentaux dont elles se réclament parfois en tant que filiales. Pour en savoir davantage sur ces établissements privés de formation, nous avons mené une enquête.
Au Mali, le monde des universités privées a beaucoup augmenté ces derniers temps. En effet quelques années auparavant, seuls quelques établissements privés de formation supérieure existaient à Bamako. Elles étaient fréquentées par des professionnels et des jeunes dont les parents ont les moyens de supporter le coût élevé de ces études. Pour les étudiants issus de milieux aisés, c’était donc une alternative aux études à l’extérieur.
Du point de vue d’un enseignant, vu le faible effectif des étudiants, la qualité des cours et l’encadrement des étudiants dans ces universités privées étaient meilleurs que l’offre des universités publiques où les cours connaissent souvent des perturbations au fil des ans.
Les diplômés de ces universités privées, grâce à la qualité de leur formation étaient beaucoup plus sollicités par les entreprises prives et les institutions financières de la place. Comme l’indique M.C, un diplômé en gestion de l’une des universités privées de Bamako sise à Baco Djikorono ACI : “C’est dans le souci d’avoir une formation de qualité que mes parents m’ont inscrit à cette université privée. Malgré le coût exorbitant de la scolarité, les cours étaient mieux dispensées et cela par des professeurs qualifiés, qui nous prenaient le maximum de temps pour expliquer les cours. Quant au planning des cours, il était vraiment bien élaboré, sans que cela pèse sur les étudiants. On n’était pas nombreux dans la salle et toutes les commodités étaient là afin que nous puissions travailler dans les meilleures conditions possibles. En plus, les diplômes de cette université privée sont reconnus par l’Etat malien. Je peux vous dire que nous avons reçu une très bonne formation dans cette université, parce qu’à la sortie, la majeure partie des étudiants de ma promotion ont obtenu du travail dans des entreprises privées”.
Pour F.K, une sortante de l’une des universités privées à Bamako sise à l’Hippodrome, certaines universités privées du Mali sont meilleures dans la formation des cadres. “Je viens de terminer mon cursus dans une université privées à Bamako, il y a quelques années. Cette école a longtemps été considérée comme l’une des meilleures universités privées au Mali dans la formation des cadres. Je connais même des professionnels qui sont venus y passer leur Master II. Donc, après mon bac, mon père a décidé de m’inscrire là-bas. En tout cas, je peux vous confirmer que cette université dispense bien les cours. Elle a les meilleurs professeurs dans leurs domaines respectifs. Durant mon cursus, je n’ai vu que du sérieux dans cette université. Heureusement pour moi, après avoir obtenu ma licence en marketing, je n’ai pas chômé longtemps car une nouvelle entreprise de carrelage de maisons m’a embauchée”, a-t-elle précisé.
Selon O.B, journaliste et détenteur d’un Master II en Communication de l’une des universités privées à Bamako sise à Hamdallaye ACI 2000, certaines universités privées maliennes sont meilleures dans la formation, mais cela demande de la vérification auprès d’elles, parce qu’actuellement les universités privées sont nombreuses à Bamako. “Après avoir obtenu ma Maîtrise en droit privée à l’Université de Bamako, j’ai trouvé nécessaire d’aller faire une autre formation en communication dans une des universités privées afin d’avoir au moins une licence dans le domaine de la communication. Je n’ai pas eu de problème d’adaptation dans cette université privée parce que notre emploi du temps n’était pas trop chargé. Les cours étaient bien dispensés et nos professeurs étaient très attentifs. Je peux dire que durant notre parcours, puisque j’étais avec d’autres professionnels, nous n’avons pas eu de difficultés. Leur système de formation encourage vraiment à continuer et après avoir obtenu mon diplôme, j’ai recommandé cette université à plusieurs collègues et amis”, a-t-il indiqué.
Si d’autres universités privées fournissent des efforts pour donner à leurs étudiants une formation de qualité, par contre plusieurs d’entre elles sont là, juste pour faire des profits, la qualité de la formation reste le dernier souci, l’essentiel étant de se faire de l’argent. Aujourd’hui, vu les profits que les universités privées engrangent, plusieurs entrepreneurs se sont lancés dans ce créneau devenu rentable. Toutes les conditions existent alors dans ces universités afin de rechercher le maximum d’étudiants. Plusieurs possibilités y sont accordées pour faciliter les paiements aux différents étudiants inscrits.
Selon K.K, un sortant d’une université privée sise à Hamadallaye : “Après avoir eu mon baccalauréat, plusieurs personnes m’ont conseillé d’aller faire mes études supérieures dans une université privée parce que, selon eux, il n’y a plus de sérieux dans les universités publiques.
En plus, les étudiants sont nombreux là-bas. Ensuite, mon père m’avait demandé de choisir l’une d’entre elles afin qu’il puisse m’inscrire. Comme je suis en Commune I, j’ai choisi une à Djélibougou, non loin de notre quartier. Lorsque nous avons effectué le déplacement pour aller visiter ledit établissement, le personnel de l’université nous a proposé plusieurs filières de formation qui se trouvent dans leur université et plusieurs modalités de payement. Après la rentrée, nous avons constaté plusieurs difficultés comme le manque de professeurs. Plusieurs de nos professeurs n’étaient pas qualifiés. Ils viennent seulement nous dicter des choses sans nous donner les explications nécessaires. Les quelques meilleurs professeurs qui nous donnent des cours là-bas sont souvent absents. Donc, nous avons passé toute l’année universitaire dans ce genre conditions. C’est là que je me suis rendu compte que cette université n’est qu’une fabrique de cancres parce que vous quittez la maison pour apprendre, mais en réalité vous n’apprenez rien”, a-t-il expliqué.
Quant à D.T, un autre sortant d’une université privée sise à Sotuba ACI, il y a des universités privées à Bamako qui doivent être fermées par les autorités. “J’ai été dans une des universités privées qui m’avait séduit à travers les publicités. Mais une fois inscrit, j’ai su qu’elle n’était pas à hauteur de mes attentes. Les cours étaient de mauvaise qualité. Les volumes horaires par matière sont considérablement réduits afin d’économiser de l’argent. Les cours sont confiés à des professeurs qui n’ont pas le niveau requis pour enseigner à l’université et payés à des taux horaires faibles. Eux aussi ne font que nous distribuer des supports de cours et consacrer tout le temps à des causeries inutiles. Le promoteur est au courant de tout cela, mais il ne dit absolument rien”, a-t-il avancé.
A.D, étudiante d’une université privée à Quinzambougou, parle de l’achat de diplômes dans certaines universités privées de la place. “J’ai entamé mon cursus avec une jeune dame dont ses parents sont très riches.
Elle vient rarement au cours et si elle vient elle ne suit pas correctement les cours. A un moment donné, certains professeurs se sont même plaints à la direction. En plus de tout cela, elle n’avait pas de niveau. Mais à la sortie de notre promotion, elle a eu sa licence comme nous et les gens étaient très surpris de cela.
Après une petite enquête de la part de certains camarades, nous avons su qu’elle a versé de l’argent au promoteur afin qu’elle puisse avoir son diplôme comme nous”, a-t-elle précisé.
Aujourd’hui, il est important que les autorités maliennes lancent un regard vigilant sur le fonctionnement des universités privées au Mali afin de pallier certaines irrégularités. Ensuite, de mettre en place une politique afin de pousser les promoteurs de ces universités privées à maintenir un minimum de rigueur dans leurs systèmes de formation.
Mahamadou TRAORE
Source: Aujourd’hui-Mali