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UNION AFRICAINE : du bilan de Condé aux défis de Kagamé

Outre les réunions thématiques, les slogans ronflants et les déclarations-chocs qui font le menu de toutes les rencontres du genre, l’événement-phare du 30ème conclave de l’Union africaine qui s’est ouvert hier à Addis-Abeba, sera sans nul doute le passage de témoin entre Alpha Condé et Paul Kagamé. Tout étant réglé d’avance, il n’y a bien sûr ni suspense, ni enjeu particulier. Cependant, c’est l’occasion de faire le bilan du sortant et de se projeter sur les chantiers de celui qui prend sa place. Et pour se livrer à ce double exercice, nous avons interrogé des activistes de la société civile togolaise et tchadienne, et un confrère très au fait de l’actualité africaine dans son ensemble. De ces trois points de vue, il ressort globalement que durant son mandat qui s’achève, Alpha Condé, en dépit de quelques bonnes intentions, laisse un bilan mitigé, sinon plutôt négatif. Quant à son successeur, nos interlocuteurs s’accordent à lui reconnaître un certain pragmatisme inspiré par sa culture anglo-saxonne. Une singularité qui devrait, espère-t-on, booster le chantier des reformes de l’UA. Cependant, sur le débat très en vogue des modifications constitutionnelles, il est très peu probable qu’il fasse bouger les lignes dans le sens souhaité par les peuples africains, dans la mesure où lui-même est potentiellement éligible jusqu’en 2034.  

Alpha Condé, des intentions aux actes

Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’Alpha Condé n’a pas été nécessairement chanceux. En effet, durant son mandat, l’Afrique a dû faire face à un ensemble de crises qui interpellaient plus ou moins l’instance qu’il présidait. Au nombre de ces crises, il y a bien sûr l’immigration clandestine dont le point culminant aura été les images de migrants vendus comme esclaves en Libye. Le Togo, la RDC et dans une moindre mesure le Tchad ont également été traversés par des crises politiques internes. Mais dans aucun de ces pays, l’UA n’a réussi à trouver la solution. Même si dans le cas du Togo, le Pr. David Dosseh, du mouvement ‘’Togo Debou’’ salue les efforts de médiation déployés par le président Alpha Condé; si les choses n’ont pas abouti, c’est, dit-il, « en raison de la nature et du caractère difficiles et complexes des dirigeants togolais, toujours prêts à conserver leurs avantages obtenus au prix d’une atroce dictature ». Au Tchad par contre, Tchadaoubaye Natolban, animateur de la webradio, Ras-le-bol Citoyen, basé à Montréal (Canada), pense qu’Alpha Condé s’est davantage comporté en ‘’ami du dictateur Deby’’ qu’en président de l’Union africaine. Jacques Matand, de la BBC, pour sa part relativise : « pour faire le bilan d’un président en exercice de l’Union africaine, il convient de prendre en compte les prérogatives, les moyens d’action et de pression dont dispose le président en question ». Cette prudence, l’activiste togolais, choisit de s’en passer : « En tant que citoyen africain, ma vie a été très peu impactée par l’Union africaine, de manière générale. On a l’impression que l’UA pose peu d’actes qui impactent la vie des citoyens ». Revenant à la charge, le Tchadien à un grief très précis à l’endroit d’Alpha Condé : « Sur la question de l’esclavage, il a trainé les pas. Il a mis du temps à réagir. Et quand il a réagi, c’était une réaction molle. Bref, pour ce qui est de son bilan, on n’a pas eu quelque chose de concret ».

 

L’Afrique doit être cohérente

Ne voulant pas tout peindre en noir, Jacques Matand salue les transitions pacifiques réussies en Gambie et au Zimbabwe. Toutefois, évoquant la rhétorique souverainiste dont Alpha Condé avait fait son cheval de bataille durant son mandat, il invite l’Afrique à faire montre de cohérence : « Autant je suis contre les discours moralisateurs et donneurs de leçons, autant je pense qu’en Afrique, on doit être conséquent. On ne peut pas tendre la main à l’Union européenne pour la mise en route du G5 Sahel et dénier à cette même institution le droit d’avoir son mot à dire sur la politique migratoire de l’Afrique ». Pour autant, comme le président sortant de l’UA, notre confrère pense qu’il est légitime de faire valoir la spécificité et la particularité du continent africain.

Kagamé, le réformateur vs le démocrate

 

Au sujet de l’arrivée du président rwandais à la tête de la conférence des chefs d’Etat de l’UA, elle est plutôt perçue avec un brin d’espoir. En tout cas, tout le monde s’accorde sur le fait qu’en termes d’approche, « ce sera quelque chose de différent ». D’un pragmatisme plus marqué, selon Jacques Matang, Kagamé pourrait, selon un observateur guinéen, « partant des résultats obtenus dans son propre pays, faire bouger les lignes en matière de gouvernance économique ou encore dans le domaine des technologies ». Encore que sur la question précise de la taxe de 0,2 % à prélever sur les importations en provenance des pays non-africains, Matand suggère à Kagamé de faire dans une certaine « pédagogie », pour rassurer ceux qui sont réticents. De Kagamé, Tchadaoubaye pense aussi qu’il pourrait « faire avancer les choses ». Mais s’aménageant une certaine prudence, il ajoute aussitôt : « comme avec le maçon, je vais l’attendre au pied du mur ». Le porte-parole du mouvement ‘’Togo Débout’’, lui, adresse une doléance singulière à Paul Kagamé, « durant son mandat, qu’il fasse en sorte qu’au Togo, nous puissions aussi obtenir une alternance à l’instar de tous les autres pays de la communauté (CEDEAO, ndlr) ». Se voulant réaliste, l’activiste togolais est toutefois le premier à admettre qu’un tel vœu a très peu de chance d’être exaucé par Kagamé qui lui-même a déjà modifié la constitution de son pays pour s’offrir un pouvoir à vie.

Boubacar Sanso Barry

 

Source:ledjely

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