La filière coton représente environ 15% du Produit intérieur brut (PIB) du Mali et constitue le premier produit d’exportation. Si les prévisions de production sont à la hausse, les quantités supplémentaires de pesticides requises constitue des motifs d’inquiétude.
Dans le pays, la culture du coton ne cesse de prendre de l’ampleur. Entre 2012 et 2018, les superficies cultivées sont passées de 521 436 à 703 652 hectares, et la production de coton de 449 646 à 728 606 tonnes, soit une croissance globale de 62%. En 2020, les prévisions de la Compagnie malienne pour le développement du textile (CMDT) vont jusqu’à 800 000 tonnes voire 1 million dans les années à venir.
Cette ambition, même salutaire, doit inquiéter. En effet, son atteinte va impliquer l’utilisation de davantage de pesticides. Et les inconvénients liés à cette pratique dans la culture du coton sont nombreux. On peut citer notamment l’élimination de certaines espèces non visées, la résistance croissante des ennemis des cultures, le besoin croissant de produits insecticides, ou encore la contamination des sols. S’y ajoutent les problèmes de santé humaine et animale (par inhalation, consommation d’aliments souillés, réutilisation courante des emballages de pesticides pour contenir des produits alimentaires, la pêche à l’aide de pesticides, etc.)
Des produits achetés auprès de fournisseurs et détaillants non spécialistes
Dans sa thèse de recherche sur la gestion durable des ressources naturelles, soutenue le 27 avril 2015, Dr. Malick Tessougué (à l’époque doctorant à l’Institut supérieur de formation et de recherche appliquée (ISFRA)) estime que les pesticides utilisés sur le cotonnier sont divers et variés. Ils sont constitués, par ordre d’importance, d’insecticides, d’herbicides et de fongicides. Et le cotonnier, compte tenu de ses nombreux ennemis, exige plusieurs traitements (3 à 5) par campagne qui dure au maximum 4 mois. Ce qui multiplie les risques de contamination des producteurs lors des applications des produits pesticides.
De fait, ces producteurs sont régulièrement victimes de problèmes de santé comme les maux de têtes, les vertiges, les maux de ventre, les vomissements, les tremblements, l’hyper-salivation, les maladies des yeux. Il y a aussi les démangeaisons provoquées surtout par la manipulation des engrais, les fongicides et les herbicides.
La thèse de M. Tessougué fait ressortir également que les produits sont achetés auprès de fournisseurs et détaillants non-spécialistes, « incapables de prodiguer des conseils adéquats aux producteurs concernant les modes d’utilisation de ces produits ». Par exemple, sur un échantillon d’applicateurs enquêtés à Ouélessébougou (Kati), commune rurale située à 80 km de Bamako, 63% se sont approvisionnés en pesticides auprès des détaillants et fournisseurs autres que le service d’encadrement l’Office de la haute vallée du Niger (OHVN).
Des efforts supplémentaires à déployer
Entre 2016 et 2017, la CMDT a créé une Direction de l’environnement et du développement durable (DEDD), et le Projet d’élimination et de prévention des pesticides obsolètes (PEPPO-Mali) a formé 18 formateurs de la CMDT sur « les techniques d’inventaire et de sécurisation des pesticides obsolètes et déchets apparentés ». Malgré tout cela, des efforts supplémentaires doivent être déployés. Cela permettra d’éviter que les pesticides ne créent des dégâts supplémentaires.
La CMDT et l’OHVN, avec l’appui des organisations des producteurs, offrent des services d’encadrement de qualité aux producteurs pour l’utilisation rationnelle des produits pesticides. Mais les autorités doivent prendre des dispositions supplémentaires à travers la formation continue des producteurs sur la bonne utilisation des pesticides, l’information et la sensibilisation de l’ensemble des populations sur les risques liés à l’utilisation des pesticides, notamment obsolètes, et le rachat des emballages vides des pesticides utilisés auprès des cotonculteurs.
Le Projet d’élimination et de prévention des pesticides obsolètes au Mali (PEPPO) avait pour objectif principal de débarrasser le pays des stocks de pesticides obsolètes et déchets apparentés inventoriés de façon respectueuse de l’environnement. Financé par la Banque mondiale, le PEPPO a été clôturé en fin janvier 2020.
Source : Benbere