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SiraKura : l’indépendance des institutions passe par les hommes qui les animent

La refondation de l’État, au Mali, passe par une refonte de nos institutions pour les rendre plus solides et indépendantes, mais aussi et surtout par un nouvel état d’esprit dans leur gestion.

 

Les institutions ne valent que par les hommes qui les animent. On aura beau avoir les meilleurs textes de lois pour organiser, améliorer notre système de gouvernance, équilibrer notre jeu démocratique, les effets escomptés ne seront au rendez-vous que s’ils sont appliqués.

Au Mali, les énormes pouvoirs détenus par le président de la République font de lui un « monstre politique », qui absorbe tous les autres pouvoirs. Les pouvoirs législatif et judiciaire se trouvent sous son emprise. Dans les faits, le président de la République est le seul maître du jeu politique. Ses décisions ne peuvent faire l’objet de contestation.

« […] le pouvoir arrête le pouvoir »

Une insuffisance de notre système démocratique est l’absence d’équilibre du jeu de pouvoirs empêchant le président de la République de se comporter en maître absolu. Cela dépend des textes qui permettent d’encadrer l’exercice des pouvoirs de ce dernier, mais aussi et surtout de l’esprit d’indépendance des personnes qui animent les institutions de contrepouvoir. Elles sont à cheval sur le respect des principes et valeurs républicains et incarnent un tel niveau de liberté d’esprit qu’elles résistent aux tentations d’asservissement ou de manipulation qui ne manquent pas de venir, par moments, du pouvoir exécutif.

C’est exactement une telle conduite qu’il nous faut aussi au Mali pour enclencher une nouvelle dynamique dans la gouvernance, permettant de faire fonctionner efficacement les institutions.

La suprématie de l’institution présidentielle sur toutes les autres la fragilise davantage. Elle est considérée, à tort ou à raison, comme la source de tous les problèmes. C’est pour cela qu’elle se retrouve toujours dans les viseurs et qu’elle a du mal à résister aux assauts politiques. Cela est dû à son extrême influence sur les autres pouvoirs. Le défi est de réussir à partager les pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire de sorte que, par leurs fonctionnements, ils réussissent à animer le jeu démocratique. Il faut donc que « par la disposition des choses, le pouvoir [puisse arrêter] le pouvoir », comme le disait Montesquieu, dans l’Esprit des Lois.

L’équilibre des pouvoirs dans le jeu démocratique empêchera donc le président de la République de faire tout ce qu’il veut et d’échapper ainsi à la foudre d’un peuple en colère qui cherchera à le destituer, s’il n’arrive plus à se trouver des échos favorables dans les autres institutions.

Réformes nécessaires

Des réformes sont certes nécessaires pour bâtir le cadre adéquat permettant de garantir un jeu démocratique sain et équilibré. Mais il faut aussi et surtout un nouvel état d’esprit chez les gouvernants. Que tous ceux qui animent les institutions démocratiques se conduisent en bons et loyaux serviteurs de l’État.

Une telle posture exige des représentants du peuple, à divers niveaux, de ne se soumettre qu’à la force et au diktat de la loi. Ils doivent résister aux diverses manœuvres politiques pour faire exécuter les volontés d’un président de la République qui veut outrepasser les limites de ses pouvoirs.

« C’est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser ; il va jusqu’à ce qu’il se trouve des limites », a dit Montesquieu.

Qu’on ne s’y trompe donc pas, les chants de vertus et les préceptes de bonne moralité ne suffiront pas à amener un président de la République à ne pas transgresser les limites de son pouvoir : ce sont à la fois les textes de lois mais aussi et surtout les hommes qui animeront les institutions de contrepouvoir. Ils doivent résister et dire « non » quand leurs désirs de satisfaire les volontés de l’élu suprême jurent avec les principes républicains qu’ils sont tenus de préserver à tout prix.

Source : Benbere

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