Les forces de sécurité se battent à bras le corps pour lutter contre l’insécurité dans le District de Bamako. Des missions de patrouilles, des descentes policières suivies des arrestations, saisines d’armes, ont été menées par les forces de sécurité ces dernières semaines. C’est dans ce contexte que le quotidien ‘’Le pays’’ a, après le Ministre de la Sécurité et de la Protection civile, donné la parole au Directeur régional de la Police du District de Bamako, le Contrôleur général Siaka B. Sidibé. Son parcours, les missions de la direction régionale de la direction régionale de la police du district de Bamako, la relation entre la police et la population, … il s’est prononcé sur tous ces aspects lors de l’entretien qu’il a bien voulu nous accorder. Lisez l’interview !
Le pays : Vous êtes le Directeur régional de la Police du district de Bamako. Nous entendons parler de vous partout à travers la capitale. Qui êtes-vous ? Veuillez vous présenter à nos lecteurs M. le Directeur.
Le Directeur régional de la Police du district de Bamako : je suis le Contrôleur général de la Police, Siaka Bouran Sidibé, actuellement Directeur régional de la Police du district de Bamako. J’ai été recruté à la police en 1979. J’entame ainsi ma 40e année dans la Police malienne. J’ai commencé par le grade de gardien de la paix au début puisqu’à l’époque où nous avions la fougue de servir le pays. Nous avons donc quitté le lycée pour être incorporés à la Police nationale. J’ai fait ce choix parce que j’ai une envie de participer non seulement à la vie de la nation, mais également dans une mission de paix. C’est ce qui me fascinait beaucoup et c’est pour cela que j’ai choisi d’aller à la Police nationale. À l’époque, on n’était pas encore démilitarisé. De Gardien de la paix, nous avons été faire des formations pour devenir sous-officiers de Police. J’ai eu à participer à beaucoup de formations militaires y compris au centre d’instruction de Koulikoro à l’époque pour avancer de grade.
Pendant ces années, j’ai été faire des formations un peu partout à travers le monde. De Sous-officier, j’ai fait le concours des inspecteurs de police. Après la formation, j’ai repris le travail. Quelques années après, j’ai passé commissaire de police suite à un concours.
Pendant ma carrière, j’ai commencé à la Compagnie de la Circulation Routière (CCR). Ensuite j’ai travaillé à l’aéroport de Bamako-Senou. J’ai également travaillé à la Poudrière.
Je suis aussi allé dans les missions des Nations Unies, particulièrement en Haïti de 1997 à 1999. J’ai fait beaucoup de missions à l’extérieur parce que j’avais vraiment besoin d’une ouverture vers le monde et avoir beaucoup d’expériences pour mieux servir mon pays.
Après cela, j’ai également travaillé au niveau de la direction des ressources humaines, au cabinet de défense du Premier ministre aussi. Après, je suis encore reparti en mission en Haïti. Donc globalement, j’ai fait quatre missions en Haïti.
J’ai été formateur et recruteur des Nations Unies. J’ai fait également quelques moments à l’école de Maintien de la paix en tant qu’instructeur. Ce qui m’a amené au niveau des Nations unies à occuper des fonctions de formateur. C’est dans ce cadre que j’ai été faire un stage en Chine pour le compte des Nations Unies où j’ai décroché un certificat qui m’autorisait à aller recruter des Policiers, des Gendarmes dans les pays du monde. J’ai fait des missions de recrutement en Argentine, au Chili, en Uruguay. J’ai également été en Égypte, au Togo, au Niger, au Rwanda, en Chine…
Donc partout où je suis passé, c’était pour découvrir ce qui se passe ailleurs. Ce qui fait que j’ai eu un peu d’expériences.
Quand je suis revenu au pays, j’ai été nommé commissaire du 14e arrondissement. Nous avons géré l’attaque de Radisson avec les autres forces. C’est après tout cela que j’ai été nommé comme Directeur régional de la police du district de Bamako.
En tant que Directeur régional de la Police du district de Bamako, quelles sont vos missions ?
Nos missions sont d’abord dans la mission globale de la Police nationale : sécuriser les personnes et leurs biens. Au niveau régional, nous relevons de l’autorité du Directeur général de la Police Nationale, et nous exécutons les missions et les instructions données par ce dernier dans le cadre de la sécurité publique et tout ce qui est maintien d’ordre. Nous agissons également dans le cadre de la police judiciaire parce que dans les commissariats de police, il y’a la police judiciaire, la police administrative et tout ce qui suit.
Vous avez sous votre gouverne tous les commissariats de la capitale. Pouvez-vous nous parler de l’état desanté de la Police du district de Bamako ? Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans l’accomplissement de votre charge régalienne ?
Nous sommes désormais à 17 Commissariats de Police dans le district de Bamako. Le 16e arrondissement, c’est celui de Sotuba. Le 17e, Hippodrome II, a été inauguré la semaine dernière et on a déjà commencé à travailler. Cela ne suffit pas, nous en voulons davantage.
Au-delà des 17 commissariats, je coordonne des activités en matière de maintien de l’ordre de sécurisation de Bamako avec les autres forces. Des forces de maintien d’ordre au niveau de la gendarmerie, au niveau de la garde nationale, de la protection civile et au niveau du GMS. Je les coordonne dans l’exécution de nos missions.
Quant aux difficultés, elles ne manquent pas. La sécurité est un problème tellement complexe qu’il faut des mesures adéquates pour parvenir à gérer. Aujourd’hui, nous ne sommes pas seulement face à une insécurité qu’on connaissait. Au-delà des braquages, vols… nous faisons, malheureusement, face au terrorisme. Donc, nous avons beaucoup à faire pour lutter contre tous ces fléaux. Les 17 Commissariats de sécurité publique fonctionnent très bien. Ils ne se ferment jamais. Nous sommes, au quotidien, en train de travailler.
Nous avons aujourd’hui beaucoup de missions dont les patrouilles qui stabilisent le district de Bamako. Au-delà des patrouilles, nous faisons également des checkpoints les nuits en collaboration avec la compagnie de circulation routière (CCR). Cela permet aux forces de sécurité de découvrir des malfaiteurs, saisir des armes à feu, de la drogue …
Nous organisons aussi des descentes de Police en collaboration avec les brigades spécialisées (la BAC, la BSI, les FORSAT) qui nous permettent de mettre la main sur beaucoup de malfaiteurs. Depuis quelque temps, nous avons des postes de sécurité dans certains grands carrefours qui nous permettent de faire aujourd’hui un relais. S’il y a un incident, ces relais arrivent très rapidement sur les lieux avant la grande équipe.
Parlant des difficultés, l’inauguration des Commissariats de police doit continuer puisqu’il y a une insuffisance. Nous avons un problème d’infrastructures qui se pose et l’État doit fournir beaucoup d’efforts pour pouvoir augmenter nos structures en termes de Commissariats, en termes de forces de sécurité… Parlant des véhicules, l’Etat a fait beaucoup d’efforts. En termes de structures aussi. Malgré ces efforts, il reste encore beaucoup à faire. Il faut que les forces de sécurité soient renforcées en termes de moyens humains. Et quand on a des moyens humains, il faut des matériels, des véhicules, il faut augmenter le carburant…Outre ceci, nous avons aussi des difficultés de gestion de la sécurité avec la population.
Bamako faisait l’objet de toutes les observations ces derniers temps à cause de l’insécurité qui y régnait. Ça va un peu maintenant. Comment avez-vous pu endiguer le fléau?
Le fléau n’est pas totalement endigué, mais nous sommes en train de nous battre pour y mettre fin. Nous continuons toujours à organiser des descentes de Police. Depuis que nous avions découvert un atelier de fabrication d’armes artisanales qui n’était pas régulier, j’ai dit que nous allons appuyer sur la pédale et que ça va continuer. Nous avons donc appuyé sur la pédale et nous n’allons pas nous arrêter. Franchement parlant, au-delà des slogans, le Malien doit aimer son Mali. Nous avons ce seul Mali et nous avons besoin de transcender nos différences pour son unité.
Il y’a des moments que nous ne sommes pas compris quand nous menons nos actions. Et quand ça chauffe et que nous menions les mêmes actions, on nous applaudit. Il ne faut pas choisir ; la sécurité, elle est permanente. La lutte contre l’insécurité doit l’être aussi et chacun doit se donner à corps pour mettre fin à ce fléau. Il n’y a pas de sécurité parfaite dans aucun pays du monde. L’insécurité Zéro n’existe nulle part, mais chacun des pays s’organise pour pouvoir amoindrir les conséquences pour les populations.
Il faut signaler une chose dans le district de Bamako : lors de nos descentes, nous avons remarqué que chaque fois que nous avons interpellé des malfaiteurs, nous nous rendions compte que les armes qu’ils possèdent sont de fabrications artisanales. Ça fait beaucoup de mal de trouver des ateliers de fabrication d’armes au cœur de Bamako. Lorsque les armes à feu sont utilisées pour tuer des Maliens, pour déposséder des citoyens de leurs biens, nous, forces de sécurité, nous allons agir. Et c’est pour cela que nous avons organisé ces descentes de police. D’abord en des lieux de fabriques d’armes, de dépôts de ces armes à feu, et de vente de drogue. Dieu seul sait aujourd’hui, il y’a combien de quantité de drogue qui est transportée, vendue, consommée à Bamako. Nous allons donc continuer nos actions de lutte contre tous ces maux.
Je veux aussi préciser que les descentes de Police n’ont pas pour objet de traumatiser les populations. Au contraire, nous devons rassurer les populations. Mais il faudrait que chacun comprenne que lorsqu’il y’a une descente de police, vous devez rester chez vous si vous n’êtes pas concernés. Ne venez pas être une entrave pour les actions de la police. Ces patrouilles, descentes de police, …nous allons continuer à les faire pour non seulement rassurer nos populations, mais aussi les étrangers qui viennent chez nous.
Vos rapports avec la population sont-ils bons ?
Lorsque nous avons été nommés ici, la première chose que nous avons faite, c’était de mettre ensemble des forces de sécurité : la Police, la Gendarmerie, la Garde nationale, la Protection civile et avoir également les mêmes relations avec les forces armées. Ce qui nous a permis de nous mettre ensemble et de créer un cadre de confiance entre les différentes forces pour nous mettre à la disposition de la population. Dans un second temps, nous avons mené des actions pour pouvoir rapprocher les populations et ces forces de sécurité en général, la police en particulier. J’étais à Gabarone pour un colloque en début février dans le cadre de la police de proximité et du leadership en situation de crise. La police de proximité que nous sommes en train d’exécuter sur le terrain nous permet d’aller montrer aux populations qui nous sommes, pourquoi nous sommes là, et quelles doivent être nos relations avec elles.
Aujourd’hui, la police et la population commencent à se comprendre puisque la population doit comprendre que la police est pour elle. Nous appartenons à la population, nous sommes de la population et nous sommes à son service. La population aussi doit se mettre à notre service en nous rapportant tout ce qui est négatif, tout ce qui peut être une atteinte à la sécurité des personnes et leurs biens.
En tout cas, nos relations avec les populations commencent à bien se faire aujourd’hui et nous en voulons davantage pour qu’il y’ait la sérénité que nous cherchons. Je pense que la population est en train de comprendre cette nécessité de collaboration. À notre niveau, nous allons continuer la sensibilisation.
Qu’attendez-vous de la part des citoyens, mais aussi des plus hautes autorités pour la réussite de vos missions ?
Tout d’abord, nous attendons beaucoup de la presse pour donner de bonnes informations à la population et la sensibiliser.
Aux populations, nous leur demandons de nous aider à les sécuriser. Chacun doit participer à sa propre sécurité. Il n’est pas dit que nous fuyons nos responsabilités. Elles sont, d’ailleurs, renforcées par l’aide inestimable que les autres peuvent nous donner.
Quant aux autorités, elles sont en train de renforcer nos effectifs et mettre des moyens matériels à notre disposition pour nous faciliter le travail. Nous leur demandons de continuer dans ce sens.
Réalisée par Boureima Guindo
Source: Le Pays