Veste bleue marine sur une chemise bleue ciel, le tout soutenu par une jolie cravate soigneusement nouée, le Président sénégalais Macky Sall, à la faveur de son adresse à la nation, est apparu le lundi 3 juillet en début de soirée sous les projecteurs de la télévision nationale sénégalaise, en homme d’Etat serein. Et dans un langage dénué de toute ambigüité, il a clairement annoncé qu’il ne briguera point un troisième mandat en 2024. Cette annonce a sauvé le Sénégal d’une crise politique avec son lot de manifestations violentes et incessantes dans laquelle il était enlisé. Le Président Macky Sall, comme par magie, de chef d’Etat ‘’pyromane’’ a acquis la renommée d’homme d’Etat salvateur.
Ces derniers jours, le peuple sénégalais dans sa majorité était en colère. Ni les campagnes médiatiques en langue Wolof, encore moins les décisions de justice à la pelle contre l’opposant Ousmane Sonko ne pouvaient cacher cela. Cette colère qui a enflammé certaines grandes villes du pays, dont Dakar et suscité des dégâts énormes avec mort d’homme traduisait le symptôme d’un malaise à la dimension d’une foudre tombée sur ce beau pays. Si la cause de cette situation était l’intention attribuée à l’actuel chef d’Etat sénégalais à vouloir briguer un troisième mandat, la solution revenait à lui de clarifier sa position. C’est ce qu’il a réussi à faire lundi. Ce, en arrêtant de faire croire, malicieusement, qu’il n’y avait pas feu au lac.
La franchise des déclarations faites par le Président Sall, de même que le ton assez clair de son discours ont permis de mettre fin aux incertitudes et atermoiements. Surtout lorsqu’il a affirmé que sa décision longuement et mûrement réfléchie est : « de ne pas être candidat à la prochaine élection du 25 février 2024 ». Cela a levé tout flou sur sa candidature au sujet de laquelle certains de ses proches et partisans étaient en train de conditionner l’opinion publique sénégalaise. Comme si cela ne suffisait pas, il a dans un langage propre affirmé que le Sénégal dépasse sa personne. Un pays, que tout le monde sait, rempli de leaders également capables de le pousser vers l’émergence.
Une élection sans Macky, sans Sonko :
Tel un voyageur sur le désert qui se décharge de son lourd fardeau, le Président Macky Sall par son courage politique, à travers cette déclaration, s’est soulagé d’une « raison » élitaire face à la « révolte » populaire et d’un « blâme » international. Et s’est, du coup, légitimé pour conduire la marche de l’histoire du Sénégal jusqu’au scrutin du 25 février 2024. Même n’ayant pas pour l’instant un successeur attitré, son soutien à n’importe quel candidat (e) sera synonyme de victoire certaine pour celui ou celle-ci. C’est pourquoi, certains affirment que le Président Sall a réussi à couper l’herbe sous les pieds de ses adversaires. Sachant qu’il prétend « tendre la main aux bonnes volontés, disposées à créer un Sénégal de bâtisseurs et non de casseurs », tout laisse à croire que son choix ne portera jamais à cet effet sur l’opposant Sonko. Lequel d’ailleurs, sous le coup d’une condamnation à deux ans de prison ferme dans une affaire de mœurs, apparait inéligible pour la prochaine présidentielle.
D’une pierre, deux coups, l’expérimenté politicard Sall par cette annonce, a sauvé le Sénégal d’une crise politique interminable et grillé la politesse au jeune Sonko. Dans l’arène de la lutte sénégalaise, les frappes sont aussi permises.
Moustapha Diawara
Source : Le Sursaut