Organe unique de gestion des élections, Assises nationales de la refondation, durée de la Transition… les sujets qui divisent la classe politique et alimentent la polémique, sont cruciaux. Autant de points de discussions lors de la prochaine visite du médiateur de la Cedeao dans notre pays
Le médiateur de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), l’ancien chef d’État nigérian Goodluck Jonathan, effectuera du 5 au 7 septembre prochain une visite dans notre pays dans le cadre du suivi-évaluation de la Transition. Cette visite, faut-il le rappeler, intervient dans un contexte politique quelque peu tendu.
Si le Programme d’action gouvernemental (PAG) a été approuvé par l’écrasante majorité des membres du Conseil national de Transition (CNT), le 2 août dernier, cependant la polémique à son sujet est loin d’être éteinte.
La récente rencontre entre le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga et la classe politique autour des grands axes du PAG a laissé apparaître une certaine dissension des acteurs politiques, notamment en ce qui concerne les volets relatifs aux réformes politiques et institutionnelles et à l’organisation des élections générales.
Contrairement à la Transition de 1991-1992 et celle de 2012-2013 fortement soutenues par les acteurs politiques et de la société civile pour sortir le pays de l’impasse, l’actuelle Transition tend plutôt vers une bipolarisation qui risque de la fragiliser davantage.
Nous avons d’un côté les tombeurs de l’ancien régime regroupés au sein du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP). Rêvant d’un Mali nouveau, ils pensent qu’il faut tout mettre à plat pour atteindre cet objectif, le temps d’une transition.
De l’autre côté, il y a le Cadre d’échange des partis et groupements politiques pour une Transition réussie au Mali, une nouvelle coalition d’une soixantaine de partis dont la plupart émane de l’ancienne majorité présidentielle (RPM, ADEMA, ASMA-CFP, Parti socialiste-Yeleen Kura, UM-RDA) qui pense qu’il faut vite retourner à l’ordre constitutionnel pour permettre au pays de sortir la tête de l’eau.
Les leaders du Cadre d’échange ont publié un mémorandum le 24 août, dans lequel ils font étalage de leur vision pour la réussite de la Transition.
À ce propos, ils demandent au gouvernement de publier le chronogramme électoral réactualisé. Ils trouvent «pertinente» l’initiative de la création d’un Organe unique et indépendant de gestion des élections, mais estiment que le «temps imparti est insuffisant pour sa mise en place».
En lieu et place d’un Organe unique et indépendant, le Cadre d’échange demande au gouvernement de plutôt renforcer la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), en lui confiant, notamment, la mission de contrôle de toutes les opérations électorales.
Concernant les Assises nationales de la refondation (ANR), le Cadre d’échange considère sa tenue comme une «répétition» du Dialogue national inclusif (DNI). D’après les responsables du Cadre d’échange, «vouloir conférer un caractère obligatoire aux résolutions des ANR, est une démarche contraire aux règles démocratiques et républicaines ainsi qu’une violation flagrante de la Constitution».
Malgré les assurances données par le président et le Premier ministre de la Transition, le Cadre d’échange des partis et groupements politiques pour une Transition réussie au Mali insiste sur le respect du délai de la Transition.
La méfiance de ces partis est renforcée par les agitations de certains mouvements et associations qui réclament à cor et à cri la prolongation de la Transition. Peu leur importe le prix à payer par les Maliens.
L’équipe de Goodluck Jonathan aura donc du pain sur la planche lors de son passage à Bamako. Elle aura la lourde tâche de concilier les deux tendances politiques pour éviter une perte de temps inutile à un pays déjà affecté par une décennie d’insécurité, par une conjoncture économique chronique, par les effets néfastes de la Covid-19…
Madiba KEITA
Source : L’ESSOR