Directeur du musée Sahel de Gao, il a été primé pour son idée de banques culturelles qui a permis de soustraire des objets de culture de la furie des terroristes pendant l’occupation

Notre compatriote Aldiouma Yattara a remporté le « Prix culture pour la paix » des Fondations Chirac et Culture et diversité. La cérémonie de remise officielle du prix a eu lieu à Paris au musée du Quai Branly, le 19 novembre dernier, sous la présidence de François Hollande, le chef d’État français et en présence de Mme Bernadette Chirac et de nombreuses personnalités françaises.
« Merci, merci et encore merci à la France » : c’est par ces mots que notre compatriote a exprimé sa joie et sa satisfaction pour la reconnaissance internationale des banques culturelles. Pour Aldiouma Yattara, « la culture est une arme qui ne tue pas mais fait vivre ».
Lors de la cérémonie de remise du prix, il a expliqué que les banques culturelles concrétisent la stratégie adoptée pour préserver le patrimoine culturel au moment où les obscurantistes terroristes faisaient régner leur loi sur la ville de Gao. Les objets culturels étaient des cibles pour les terroristes. Il fallait les sauvegarder.
La stratégie à consister à rompre avec le système classique des musées dans les villages pour adopter le concept innovant des banques culturelles dont la première avait vu le jour dès 1997 à Fombori dans la région de Mopti. Pendant l’occupation, des banques culturelles ont ainsi été créées pour empêcher le pillage des objets de valeur et protéger ces objets contre le vol par des populations affectées par la pauvreté. Cette initiative portée a été appréciée aussi bien par la communauté locale que par les autorités nationales. Elle a été soutenue par le département en charge de la culture qui s’est investi dans la promotion et le développement des banques culturelles. Il existe aujourd’hui 4 banques culturelles au Mali et 3 en Afrique.
Une banque culturelle est une structure locale qui permet aux communautés locales de déposer des objets culturels en vue de les sécuriser. C’est une véritable entreprise culturelle au delà de son aspect historique et patrimonial. Elle permet de créer des emplois, de générer des fonds par le bais des activités de banque. Les banques culturelles, en plus d’être une solution originale au problème du pillage et de la vente illicite d’objets culturels, constituent un palliatif aux difficultés économiques que rencontrent les populations. Elles sont, en effet, sources d’emplois et de revenus issus des activités financées par le volet microcrédit de ces institutions.
Ce prix a été décerné selon des critères définis par un jury composé de personnalités du monde de l’art, de l’éducation, de la culture et de la science. Il est accompagné d’une donation de 40.000 euros (26 millions de Fcfa) par la Fondation Culture et Diversité pour encourager l’action du lauréat. Le Prix de la Fondation Chirac est incarné par une sculpture créée par le Sénégalais Ousmane Sow.
L’objectif du Prix culture pour la paix, fondé par les Fondations Chirac et Culture et Diversité, est de distinguer des personnalités ou des institutions œuvrant au règlement des conflits par des programmes artistiques ou culturels, contribuant ainsi par leurs actions au dialogue entre les cultures et à l’apaisement des tensions dans certaines zones entre communautés ethniques, religieuses ou politiques.
Aldiouma Yattara est un sortant de l’Institut national des arts de Bamako qui a fréquenté par la suite l’Institut de muséologie de Niamey. Il est aussi diplômé de l’université de la Sorbonne Paris 1 Panthéon en conservation dans les musées. Il est actuellement le directeur du Musée de Sahel de Gao

A. SOW

source : Essor