Malgré la grande mobilisation des opérateurs maliens et autres bonnes volontés, l’accompagnement des partenaires techniques et financiers, la riposte nationale contre le COVID-19 se bute à des préoccupations majeures : difficultés dans la prise en charge des personnes en confinement, alimentation des malades, équipement des structures et des agents de santé, acquisition de médicaments…
Pas plus tard que ce 27 avril 2020, la société civile et les syndicats des agents de l’Hôpital Fousseyni DAOU de Kayes étaient dans la rue pour dénoncer les conditions de travail précaires du personnel sanitaire, le manque de médicaments et autres difficultés à faire face à la pandémie du Coronavirus.
« Trop de mensonges », « Kayes face à un danger », « Kayes fait partie du Mali », « Nos vies ont été mises en danger », « Kayes ne mérite pas ça », « Nos patients souffrent », scandaient les manifestants.
Ibrahim MAIGA, l’un des manifestants joints par nos soins, explique : « Nous avons été choqués, indignés par une sortie d’un responsable sanitaire sur les conditions difficiles de travail de l’équipe de prise en charge du covid-19. C’est pourquoi nous avons décidé de sortir pour rappeler à l’Etat ses engagements en décrétant l’état d’urgence sanitaire ».
Comment Kayes peut-elle manquer d’équipements et de ressources jusqu’à ce point ? Qu’en est-il de la ‘’guerre des chefs’’ annoncées dans les médias ces derniers jours autour du fonds Coronavirus ? Que fait réellement l’Etat du Mali pour prévenir et contrer la pandémie ?
En mars dernier, pour faire face à la pandémie, un Plan d’action de Prévention et de Réponse à la Maladie à COVID-19 (COVID-19), document de référence élaboré par le ministère de la Santé et des Affaires Sociales, annonce dans son introduction : ‘’suite à la flambée de l’épidémie à COVID-19, notre pays a élaboré ce plan d’action pour la prévention et la réponse à la maladie. Le plan d’action ainsi budgétisé coûte 3 372 417 000 FCFA et est articulé autour de la prévention et de la prise en charge c’est-à-dire la riposte.
Pour un total de 2 486 517 000 FCFA, les activités de prévention sont essentiellement basées sur la Surveillance épidémiologique, les Ressources Humaines, le Transfert des Patients, le Renforcement des Mesures d’Hygiène, la Communication, la Mobilisation sociale et la Coordination et Suivi des Activités
En ce qui concerne la prise en charge, on note la disponibilisation des équipements médicaux, la Prise en Charge du Personnel de Garde et la Prise en Charge Médicale des Cas. Le montant total de cette prise en charge est de 885 900 000 FCFA’’.
Pour financer ce plan d’action et faire face à d’autres préoccupations d’ordre nationales, les autorités du pays ont fait appel aux bonnes volontés et aux partenaires techniques et financiers qui n’ont pas tardé à répondre. Le gouvernement du Mali mettra en place un compte au niveau de la Banque malienne de solidarité (BMS), dénommé fonds spécial coronavirus pour le gouvernement.
De l’ouverture du Fonds spécial Coronavirus du gouvernement, le 30 avril 2020 à ce jour, nous avons pu comptabiliser en fonction des annonces faites, en la matière, sur la page Facebook du gouvernement, la somme de 2 837 500 000 francs, en guise de dons en nature et en espèces venant des opérateurs maliens. À cela s’ajoute un don de 7,8 milliards de la Banque mondiale et 1 650 000 000 de francs CFA financés par la MINUSMA (en équipements, matériel et formation du personnel), soit un total de 12 287 500 000 de contribution.
Ce montant ne prend pas en compte les contributions du Président de la République qui renonce à trois mois de son salaire, le PM, un mois de son salaire et l’ensemble des ministres du gouvernement qui renonce à un mois de son salaire et certaines institutions de la république qui ont également contribué. Donc, la demande est largement comblée avec plus de 12 milliards de francs CFA pour un plan d’action de moins de trois milliards.
De plus en plus, les observateurs s’interrogent sur la part de l’État dans cet effort de lutte contre la pandémie du Coronavirus, alors qu’il est jusque-là incapable de faire face à ses engagements pris en faveur des plus démunis et des secteurs économiques les plus touchés par la crise.
Pour rappel, dès les premiers cas de contamination, le Président IBK a avait annoncé une enveloppe initiale de 6 300 milliards de francs CFA pour faire face à l’urgence de la prévention et la riposte contre la pandémie. Ce montant imputable au budget du ministère de la Santé et des Affaires sociales était destiné à faire face : épidémie et catastrophes : 300 000 000 FCFA ; achat de médicaments : 1 468 000 000 FCFA ; appui mis en place pour hôpitaux : 700 000 000 FCFA ; autres dépenses matérielles : 412 000 000 FCFA ; besoins nouveaux de services : 450 000 000 FCFA ; travaux de construction et bâtiments : 900 000 000 FCFA. A-t-il été déjà investi ? Difficile de le tracer, dans la mesure où aucune nouvelle réalisation, dans ce sens, n’a été jusque-là communiquée par les autorités nationales.
Par Sidi DAO
INFO-MATIN