Alors que le Président algérien Abdelmadjid Tebboune, dont le pays est le chef de file de la médiation internationale de suivi de la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali, a appelé le 31 juillet à l’application de cet accord, issu du processus d’Alger, les parties maliennes (gouvernement et groupés armés signataires) tiennent une Réunion de niveau décisionnel (RND) du 1er au 5 août 2022 à Bamako. De quoi présager d’une reprise de sa mise en œuvre ?
Sept ans que la mise en œuvre de l’Accord tâtonne. La médiation internationale de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger s’inquiète. Dimanche dernier, le Président algérien Abdelmadjid Tebboune a expliqué dans la presse algérienne que « tant que l’Accord de paix et de réconciliation issu du processus d’Alger n’a pas été mis en œuvre, les problèmes auxquels est confronté le Mali perdureront, car le pourrissement de la situation est tel que n’importe qui s’arroge le droit de s’immiscer dans les affaires de ce pays ». Une situation déjà déplorée le 17 juillet dernier par les groupes signataires de l’Accord de 2015 à l’issue d’une réunion à Kidal. Selon eux, l’Accord est à l’arrêt depuis le coup d’État d’août 2020.
C’est dans ce contexte que le gouvernement a lancé cette semaine une réunion de niveau décisionnel. Tenue pour la deuxième fois après celle des 8 et 9 février 2021, elle a pour « objectif global de diligenter la mise en œuvre des actions prioritaires de défense et sécurité de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, conformément à la Feuille de route actualisée du 18 décembre 2020 », annonce le ministre de la Réconciliation, de la paix et de la cohésion nationale, chargé de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale, le Colonel-major Ismaël Wagué.
« Questions superficielles »
Elle vise également à déboucher sur des solutions visant à redynamiser la mise en œuvre de l’Accord, à créer les conditions nécessaires pour entamer le Désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR) global et à s’accorder sur certaines réformes politiques et institutionnelles.
« Pour ce faire, nous procèderons aux discussions relatives à la répartition des quotas pour l’intégration des ex-combattants dans les corps constitués de l’État, y compris au sein des forces armées et de sécurité, au mécanisme de gestion du cas des hauts cadres civils et militaires des mouvements et, enfin, à convenir des réformes politiques et institutionnelles non liées à la révision constitutionnelle », explique-t-il.
Les groupes armés abordent dans le même sens. Pour Attaye Ag Mohamed, chef de la délégation de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), « la paix, ce n’est pas que sur le papier, ça se construit. Pendant sept ans nous avons beaucoup discuté sur des questions superficielles ou de surface, mais là c’est l’occasion pour nous tous d’évoquer les véritables enjeux ».
De même, Fahad Ag Almahmoud, Président de la Plateforme des mouvements du 14 juin 2014 et Secrétaire général du groupe d’autodéfense Gatia, engagé depuis mars 2022 dans une lutte contre le groupe terroriste État Islamique dans la région de Ménaka, trouve qu’il y a « urgence que les acteurs de l’Accord se donnent la main pour faire face à ce phénomène, qui s’intensifie au nord et partout dans le pays ».
Ce mécanisme, selon l’analyste politico-sécuritaire Jean-François Camara, pourrait faire figure de relance de la mise en œuvre de l’Accord. Mais « pour quelle soit totale il faut une relecture de l’accord. Ce que doivent accepter les groupes armés, car lors de sa signature le Mali n’était pas en position de force, ce qui a changé à présent. S’ils accordent sur ces changements, on assistera à une véritable relance de la mise en route de l’Accord », assure-t-il.
Depuis sa signature, en 2015, il y a eu 45 réunions du Comité de suivi de l’Accord (CSA) qui n’ont pas réussi à apporter des résultats probants. Cette Réunion de niveau décisionnel, qui prend fin ce vendredi, sera-t-elle la bonne ? « Nous l’espérons une fois pour toute », plaide le chef de file de la médiation internationale, El-Haouès Riache.
Source : Journal du Mali