Sylvanus Olympio
Depuis 1963, plus de 22 présidents Africains, alors au pouvoir, ont été assassinés. Beaucoup d’entre eux gênaient les puissances coloniales en place, notamment la France. Le Service de documentation extérieure et de Contre- espionnage (SDECE), la Direction Générale de la Sécurité d’Etat (DGSE) et la Direction de la sécurité du territoire (DST) sont les trois services de renseignements français qui ont la réputation de faire des coups d’Etat en Afrique. Et ils sont impliqués dans presque tous les assassinats de chefs d’Etat africains. Nous allons vous proposer, à partir de ce numéro, dans votre bimensuel, des éléments historiques sur tous les chefs d’Etat africains assassinés ; devoir de mémoire oblige !
Sylvanus Olympio du Togo
Sylvanus Olympio est né le 6 septembre 1902 à Kpando dans le Togo allemand, (cette partie du territoire résultant de la division du Togo allemand entre la France et la Grande-Bretagne, après la défaite de l’Allemagne lors de la première Guerre mondiale, reviendra à l’administration britannique et sera rattachée au Ghana à l’indépendance).
Son père, Epiphanio Elpidio Olympio (1873-1968), était un riche commerçant et planteur de cocoteraies, né d’une femme yoruba, princesse nigériane d’Abéokuta et de Francisco da Silva Olympio, un brésilien qui récupérait des esclaves établis à Agoué dans le but de les élever. La mère de Sylvanus, Fidélia Afe (1862-1967), était de l’ethnie mamprusi de la région de Dapaong au nord du Togo.
Sylvanus Olympio épousa Dina Grunitzky, fille d’un officier allemand d’origine polonaise et d’une mère Anlo (un sous-groupe des Ewes) de Kéta et demi-sœur de Nicolas Grunitzky. Ils eurent 5 enfants : Kwassi Bonito Herbert (décédé le 25 août 1994), Ablavi Rosita, Kwami Gilchrist Sylvanus (Gilchrist Olympio), Ayaba Sylvana et Kodzo Elpidio Fernando.
Sylvanus Olympio dévient, en 1926, représentant de la société Unilever au Nigeria avant d’être nommé au Togo où il fut président de la Chambre de commerce en 1948. Il adhère au Comité d’unité togolaise (C.U.T.), fondé en 1941 pour s’opposer aux revendications allemandes. Sous l’impulsion d’Olympio, le C.U.T. devient le support du mouvement nationaliste togolais et s’affirme partisan d’une réunification du peuple éwé, partagé entre la Gold Coast britannique (qui deviendra en 1957 le Ghāna) et l’ex-Togo français.
En 1946, Olympio est élu conseiller à l’Assemblée territoriale dont il devient président. Cependant, les prises de position du C.U.T. face au parti plus modéré de Nicolas Grunitzky le font battre aux élections de 1951 et le plébiscite du 8 mai 1956, par lequel les Éwé britanniques optent pour le rattachement à la Gold Coast, apporte une dure contradiction au projet de réunification éwé.
Le Togo, devenu République autonome le 30 août 1956, organise sous contrôle de l’O N U des élections en avril 1958. Devant le succès du C.U.T. qui remporte 29 sièges sur 46, Olympio est appelé par le Haut-commissaire de la République à former le gouvernement. Devenu Premier ministre, il conduit le Togo vers l’indépendance totale en Avril 1960.
Élu président de la République en 1961, il réorganise les finances de son pays par une gestion très stricte, imposant le remboursement des dettes togolaises au Trésor français. Sur le plan politique, il interdit tous les partis. L’opposition, privée de moyens d’expression, s’agite, supportant mal l’autoritarisme du régime. La répression est sévère : la Juvento où se regroupe la jeunesse de gauche du C.U.T. est dissoute et plusieurs dirigeants internés.
En politique extérieure, son attitude vis-à-vis du Ghāna l’oblige à refuser d’entrer dans la Communauté française puis plus tard à l’OUA En revanche, il adhère au groupe de Monrovia. La question des Éwé toujours en suspens reste une source de mésentente entre le Ghana et le Togo : Olympio, fidèle à sa doctrine, continue à donner asile aux Éwé persécutés par Nkrumah, ce qui ne facilite pas la normalisation des rapports entre les deux pays.
Le 13 janvier 1963, Sylvanus Olympio, le premier président démocratiquement élu du Togo, Isolé sur le plan intérieur comme sur le plan extérieur, est assassiné par le sergent Etienne Eyadema à la tête d’une clique d’anciens soldats, après la guerre du Vietnam. Ils ont fait un coup d’Etat avec l’appui de l’officier français qui était soi-disant chargé de la sécurité d’Olympio.
Eyadema Etienne, qui se fera appelé plus tard Gnassingbé Eyadema a passé plus de quarante ans au pouvoir. Il a fait un règne digne de Ceausescu et laissa un pays qui a sombré dans le chao et dans la pauvreté. Décédé en 2005, son fils Faure Eyadema le remplace et cela aussi n’a été possible qu’avec l’appui de la France.
Alfousseini Togo
Source: Canard de la Venise