Le rapport annuel 2019 du Médiateur de la République recèle un condensé de l’ensemble des problèmes auxquels sont confrontés quotidiennement nos compatriotes dans leurs relations avec l’administration publique. Il s’agit principalement de problèmes fonciers, de régularisations administratives, d’atteintes à des droits élémentaires des citoyens, de déni de justice et autres.
Le Médiateur de la République avec le magistère que lui confie la loi, intervient dans les limites des textes qui l’instituent pour régler les différends entre les citoyens et les administrations publiques, en recommandant aux pouvoirs publics des mesures susceptibles d’éclairer leur décision en vue de rendre les rapports adéquats entre les usagers et le service public.
Ce faisant, le Médiateur de la République contribue à rétablir le droit du citoyen et à signaler les dysfonctionnements qui minent notre administration publique et qui méritent d’être corrigés ou qui sont même susceptibles de reformation dans leur conception.
Le Médiateur de la République ne disposant d’aucune force de coercition, fait des recommandations qui peuvent être de véritables outils d’appréciation à l’intention des décideurs.
Le premier chapitre du rapport, il est question de la gestion des réclamations, avec deux points essentiels : d’une part l’accueil, l’écoute et l’orientation ; d’autre part l’état des dossiers de réclamation reçus et traités.
S’agissant de l’accueil, l’écoute et l’orientation, que cela soit au siège et ou dans les délégations territoriales, les citoyens sont accueillis, écoutés et orientés selon le cas vers les services les mieux indiqués pour la prise en charge de leurs préoccupations. Au cours de l’année de référence, les services du Médiateur de la République ont accueilli, écouté et orienté 16 818 personnes, dont 14 793 de Bamako, 210 de la délégation territoriale de Kayes, 492 de Koulikoro, 272 de Sikasso, 223 de Ségou, 346 de Mopti, 307 de Tombouctou et 175 de Gao.
Concernant l’état des dossiers de réclamation reçus et traités, du 1er janvier au 31 décembre 2019, le Médiateur de la République a enregistré 185 nouveaux dossiers de réclamation qui s’ajoutent aux 44 dossiers non clos en 2018, soit un total de 229 dossiers traités à hauteur de 71,18%. Les dossiers reçus sont classés en réclamations irrecevables et en réclamations recevables suivant des règles détaillées et conformément aux dispositions de la Loi n°97-022 du 14 mars 1997 modifiée instituant le Médiateur de la République.
Sur les 229 réclamations, 32 ont été déclarées irrecevables pour des conditions tenant soit au réclamant (défaut de qualité) ou à la réclamation formulée (défaut de forme). Sur les 197 réclamations qui ont été jugés recevables après analyse au fond, on peut faire le constat suivant : certaines réclamations sont déclarées non fondées ; d’autres sont analysées comme fondées et attendent d’être prises en charge par l’administration et d’autres ont été réglées à la satisfaction de leurs auteurs. Sur les 229 réclamations, 163 dossiers sont déjà clos et 66 en cours de traitement et sur ces 66, 40 sont en attente de l’administration, 24 en instruction et 02 en attente de réaction du réclamant.
Les réclamations reçues et traitées par le Médiateur de la République en 2019 peuvent être classées en 08 grandes catégories : la gestion domaniale et foncière avec 63 dossiers ; les contrats et marchés publics : 46 ; la justice : 33 ; autres : 29 ; la protection sociale : 25 ; la gestion des carrières : 18 ; l’éducation : 9 et les litiges privés : 6.
Gestion domaniale et foncière
Depuis près d’une dizaine d’années, la préoccupation majeure des usagers qui saisissent le Médiateur de la République concerne les questions foncières et domaniales. Avec 27,51% des réclamations reçues en 2029, elles viennent encore en tête et sont relatives à la demande de titre foncier ; à la purge des droits coutumiers ; au problème d’identification de parcelle ; à la demande d’indemnisation suite à une expropriation pour cause d’utilité publique et enfin au respect des servitudes.
Contrats et marchés publics
En ce qui concerne les contrats et marchés publics, les réclamations sont de l’ordre de 20,09% cette année. Les problèmes rapportés sont relatifs, pour la plupart, au paiement de factures de prestations de service ou de fourniture de biens et équipements à l’administration.
Réclamations concernant la justice
Parlant de la justice, les réclamations reçues à ce niveau sont de l’ordre de 14,41%. Elles portent principalement sur la lenteur observée dans les procédures judiciaires ; la demande d’exécution de décisions de justice ; la contestation de décisions de justice et la demande d’obtention de grosses de jugement.
Pour la catégorie “autres”, regroupant des réclamations ne pouvant être classées dans aucun des secteurs précités, cette année, avec un taux de 12,66%, elles sont en légère hausse et concernent les cas de gestion de conflit communautaire, les problèmes de chefferie traditionnelle et la violation des droits humains.
Protection sociale
Au niveau de la protection sociale, le taux de réclamation est de 10,92% portant principalement sur la liquidation de pension ; la demande de paiement de pension de réversion ; la contestation du montant de pension liquidée ; la contestation de la durée de pension de cotisation et la demande de validation des services auxiliaires.
Gestion des carrières
Avec 7,86% de réclamations, les demandes relatives à la gestion des carrières concernent les formations en cours de carrière ; le reclassement et l’avancement des agents de l’Etat ; le paiement de rappel de salaires et d’indemnités de fonction et l’intégration de certains contractuels de l’Etat dans la Fonction Publique.
Réclamations relatives à l’Education
Quant à l’éducation, les réclamations sont de l’ordre de 3,93% et portent sur la reconnaissance de diplômes ; les difficultés liées à l’inscription dans les facultés et universités et les paiements de frais de correction et d’encadrement.
Litiges privés
Les litiges privés sont de 2,62% et concernent la catégorie de réclamations dirigées contre les personnes physiques ou les sociétés régies par les règles de droit privé. Les litiges à caractère privé ne relèvent pas de la compétence du Médiateur de la République.
Dans l’ensemble, les réclamations reçues en 2019 proviennent de la quasi-totalité des Délégations Territoriales, du District de Bamako et de l’étranger. C’est toujours le District de Bamako qui vient en tête avec 171 réclamations. Il est suivi de Ségou avec 17 réclamations, de Sikasso avec 16, de Koulikoro avec 10, de Mopti avec 7, de Kayes avec 5 et de l’étranger avec 3 réclamations (Côte d’Ivoire, Sénégal et Burkina-Faso).
Comme en 2018, les réclamations en 2019 ont concerné les différentes catégories de service public définies par la Loi n° 2014-049 du 19 septembre 2014 portant principes fondamentaux de la création, de l’organisation, de la gestion et du contrôle des services publics.
Les ministères viennent en tête avec 112 réclamations, soit 48,91%, suivis des organismes personnalisés qui sont mis en cause avec 30 réclamations, soit 13,10%. Les collectivités territoriales sont citées dans 26 réclamations, soit 11,35%, ensuite les services régionaux et subrégionaux sont concernés par 20 réclamations, soit 8,73%, puis les institutions dans 12 réclamations, soit 5,24%. Les juridictions sont mises en cause par 11 réclamations, soit 4,80%, ensuite les services centraux avec 9 réclamations, soit 3,93% et en fin les services extérieurs sont cités dans 1 réclamation, soit 0,44%.
Au regard des dispositions de la loi l’instituant, le Médiateur de la République n’est saisi que par les personnes physiques ou les personnes morales. En 2019, 153 personnes physiques ont saisi le Médiateur de la République, contre 76 personnes morales. Les réclamations formulées par les hommes se chiffrent à 131, contre 22 pour les femmes.
Au cours de ces cinq dernières années, on constate une évolution irrégulière du taux de saisine du Médiateur de la République. En 2015, il y eu 228 réclamations, 171 en 2016, 189 en 2017, 204 en 2018 et 229 en 2019.
L’Espace d’Interpellation Démocratique (EID)
Le chapitre II du rapport est consacré de l’Espace d’Interpellation Démocratique (EID). Les travaux de la 24ème session de l’Espace d’Interpellation Démocratique (EID) se sont déroulés le mardi 10 décembre 2019 au Centre international de conférences de Bamako (CICB).
La 24ème session a enregistré au total 465 dossiers d’interpellation, soit un chiffre record dans les annales de l’EID, ce qui témoigne de l’intérêt et de la confiance que les citoyens manifestent de plus en plus à l’égard de cet Espace.
Organisé le 10 décembre de chaque année, date anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, l’EID est considéré comme un espace d’expression démocratique, mais aussi un espace de promotion et de protection des droits humains.
Les 465 dossiers d’interpellation se répartissent comme suit : Kayes 68 dossiers, Koulikoro 33 dossiers, Sikasso 63, Ségou 65, Mopti 36, Tombouctou 11, Gao 32, Bamako 153 et 04 dossiers pour la diaspora.
Les interpellations sont réparties suivant l’objet : la gestion domaniale et foncière 176 interpellations, les demandes de paiement de droits 103, la justice 80, la gestion des carrières 32, l’éducation 03, les marchés et contrats 05 et autres 66. Sur les 465 interpellations, il y a 372 hommes, 36 femmes et 57 personnes morales.
Autres activités du Médiateur
Un chapitre est consacré à la catégorie “autres” qui évoque, entre autres, la Commission de bons offices, le Dialogue national inclusif, la décoration des collaborateurs du Médiateur de la République, les audiences et visites.
Dans le cadre de la gestion de la crise qui secoue l’école malienne, le gouvernement a mis en place, par Décret n° 0335/PM-RM du 16 mai 2019, une Commission de bons offices pour la résolution de la crise scolaire. Présidée par le Médiateur de la République, elle est composée de dix personnalités issues du monde éducatif, de l’administration et de la société civile.
Sur le Dialogue national inclusif, le rapport rappelle que les débuts de l’année 2019 ont été marqués par les effets des contestions post-électorales de 2018. De plus, la situation générale dans le pays a connu une recrudescence de violences terroristes, particulièrement meurtrières dans de nombreuses localités du centre et du nord. Ces évènements négatifs sont intervenus dans un contexte national encore bien fragilisé sur le plan politique, institutionnel, sécuritaire et administratif, depuis la crise multidimensionnelle déclenchée en 2012.
C’est pour permettre à l’ensemble des forces vives de la nation de débattre de cette crise en vue de rechercher les voies et moyens consensuels d’en sortir qu’Ibrahim Boubacar Kéïta, l’ex président de la République, a décidé d’organiser un “Dialogue National Inclusif”.
S’agissant de la décoration des collaborateurs du Médiateur de la République, M. Baba Akhib Haïdara a présidé le mercredi 23 janvier 2019, la cérémonie de remise de décorations honorifiques au titre de l’année 2018 à cinq de ses collègues.
Les récipiendaires pour le grade de Chevalier de l’Ordre national sont Mme Diallo Korotoumou Traoré, secrétaire particulière du Médiateur de la République ; Chirfi Alpha Sané, délégué régional du Médiateur de la République pour Tombouctou et Blaise Dieudonné Diabaté, chef de Division Traitement des réclamations.
Pour le Mérite national avec “Effigie Abeille”, les récipiendaires sont Hama Touré, délégué régional du Médiateur de la République pour Mopti et Mme Coulibaly Rokiatou Bagayoko, conseillère à la Communication.
Audiences accordées
Au cours de l’année 2019, le Médiateur de la République a accordé des audiences, parmi lesquelles on peut noter celle accordée à la Commission de réforme du système de santé au Mali ; la rencontre avec le Comité d’experts pour la réforme constitutionnelle ; l’audience accordée à la Délégation du centre pour la gouvernance du secteur de la sécurité (Dcaf).
Par ailleurs, le rapport fait état d’un plan de formation pour accompagner les agents dans la consolidation de leurs compétences. Ce plan a mis l’accent sur les formations techniques indispensables, d’une part, à l’exécution efficace des activités (réclamations/interpellations) et d’autre part, au perfectionnement continu du niveau de maîtrise des agents sur les différents aspects de leur emploi.
En 2019, les activités de développement des compétences des collaborateurs du Médiateur de la République se sont déroulées à l’interne et à l’externe.
Notons que la quatrième et dernière partie du document est réservée aux commentaires et recommandations du Médiateur de la République. Marie DEMBELE
Source: Aujourd’hui-Mali