Comme à l’accoutumée, au Mali, le mois de ramadan rime avec la hausse des prix de la plupart des produits alimentaires. Déjà, quelques jours avant le début du jeûne musulman, les denrées les plus prisées ont vu leur prix augmenter. A seulement une semaine, le constat est indéniable : les prix des tripes et cervelle d’animaux appelées par les Bamakois « pièces de bétail » connaissent aussi une flambée considérable. Bon nombre de ménagères sont à présent préoccupées par cette situation. Les chefs de famille parviendront-ils à célébrer l’Aïd al-fitr comme il le faut ?
Le mois de ramadan, une période de partage et de dévotion pour les croyants, est synonyme de multiplication des dépenses au niveau des familles musulmanes. À Bamako, plus rien ne va. Bouchers, marchands, consommateurs ; tous crient une même préoccupation : la cherté de la vie. Il n’est plus possible pour certains de rompre le jeûne avec la nourriture souhaitée. « Tous les aliments ont vu leurs prix respectifs grimper ! », peut-on entendre partout dans nos centres urbains. En plus des légumes, du lait en poudre et de bien d’autres produits, s’ajoute maintenant les parties tendres de l’ovin ou du bovin (tripes, foie, cœur, poumons, cervelle) que les Bamakois appellent “les pièces de bétail”. Ceux et celles qui raffolent de ces parties tendres du mouton ou du bœuf y ont momentanément tourné dos. L’estomac, la langue, le foie, la cervelle… même le prix de la queue de bœuf connaît actuellement une flambée.
Nous sommes mercredi, au marché de Banankabougou, il est 6 h du matin. Plusieurs revendeuses de “pièces” sont déjà sur place et attendent leurs fournisseurs. Malgré la cherté de la chose, il faut se rendre tôt au marché pour y avoir accès. La plupart d’entre elles en font de la soupe ou diverses sauces et les vendent à travers la ville. Au cours de notre collecte, nous avons rencontré Kadiatou Sidibé, vendeuse de soupe de boyaux (estomac de la vache) et de galettes. Questionnée, celle-ci explique qu’elle vend quotidiennement de la patate grillée et fait de la soupe pendant le mois de ramadan. Cette vente représente pour elle un moyen de subvenir à ses besoins personnels. « Actuellement, je gagne moins. Le kilo d’estomac était cédé à 1300fcfa ; avec le ramadan, il est passé à 1600fcfa », affirme-t-elle.
Le cas reste le même pour la langue et la cervelle de bœuf, des produits très sollicités par la majorité des bamakoises. Une langue de bœuf se vendait à 3000fcfa parfois accessible à 2500fcfa ; aujourd’hui, elle est cédée à 3500fcfa. Une grande amatrice de ce produit qu’est Fatoumetou Zouboye a affirmé qu’elle préfère s’en passer momentanément. « Ce sont les Maliens eux-mêmes qui se compliquent les choses. On refait face chaque année au même scénario de cherté », se désole-t-elle.
Cette situation risque d’impacter d’une façon ou d’une autre les chefs de famille, à l’approche de la fête de l’Aïd al-fitr. Si le prix des “pièces de bétails” connaît une telle augmentation, quand sera-t-il de l’animal lui-même ? Il faut bien s’y entendre puisque c’est le même problème chaque année. À Bamako, rares sont ceux qui peuvent s’acheter un bœuf à cause de la cherté. Plusieurs chefs de famille cotisent pour s’en acheter un et le partager. Cela, afin de remplir leur devoir aux yeux de la religion.
Selon Yaya Traoré, boucher, la hausse du prix des pièces est due au fait que le nombre de bétails abattus est réduit en cette période de l’année. « Les fermiers augmentent le prix des animaux par tête et en vendent moins », explique-t-il. « Ils réservent leurs bétails pour l’approche de la fête afin de les vendre encore plus cher », conclut-il.
Pour ce qui est des fermiers, ceux-là expliquent les raisons de la hausse des prix par les efforts et les dépenses générés par l’élevage des animaux.
Fatoumata Boba Doumbia
Source: Les Échos- Mali