Chacun allait de son petit commentaire au lendemain de la proclamation de la liste des membres du gouvernement dirigé par Soumeylou Boubèye Maïga. On a vite fait d’oublier le retour de ce dernier au profit des remarques sur la présence de nombreuses femmes et des jeunes au sein du nouveau gouvernement de 32 membres dont la liste a été annoncé le 9 septembre 2018. En somme, il s’agit d’un gouvernement de promesse pour certains, mais une affaire de récompense pour d’autres.
Les détails les plus commentés se rapportent à l’entrée de jeunes (3 jeunes toutes femmes) et le respect du genre (11 femmes) dans l’exécutif. Ces chiffres sont conformes à la loi sur le quota de 30% de répétitivité de cette couche sociale dans les institutions. Kamissa Camara, jeune dame au sourire contagieux, est la mieux connue dans cette catégorie.
Désormais ministre des Affaires étrangères, cette franco-malienne s’est faite connaitre depuis les Etats-Unis où elle a travaillé de 2007 à sa nomination en tant que conseiller spécial du président de la République en juillet dernier à la veille de la présidentielle.
La patronne de la diplomatie malienne est bien connue dans les milieux universitaires et intellectuels pour avoir si bien défendu IBK dans les débats. Est-ce pour cela qu’elle a été gratifiée d’un portefeuille ministériel? Des observateurs répondent aisément par l’affirmative et avancent qu’elle n’est d’ailleurs pas seule parmi les ministres novices.
La nouvelle ministre de la Promotion féminine, Mme Diakité Aissata Kassa Traore, est aussi récompensée pour service rendu au chef de l’Etat. Et la presse locale de rappeler qu’à Koutiala, il y eut des «félicitations appuyées du Président IBK » à celle qu’il considère comme « sa fille, Mme Diakité Aissata Kassa Traoré » pour avoir mobilisé du monde lors d’une visite officielle dans la capitale du coton.
La très discrète et efficace « fille d’IBK » est l’enfant d’un professeur bien apprécié par le chef de l’Etat. Sans rien demandé, rapporte un journaliste, «elle a mobilisé toutes les femmes de Koutiala et villages environnants pour accueillir triomphalement son papa de Président » qui n’a pas oublié le geste de sympathie. « La preuve, IBK l’a personnellement appelé pour la féliciter et l’encourager », explique la source.
Par contre, on n’en sait moins sur le degré d’engagement des autres jeunes ministres qui font également leurs premiers pas dans la vie publique. On peut néanmoins citer Mme Lelenta Awa Baba Ba, ministres des Mines et du Pétrole et Mme Safia Boly, ministre de la Réforme de l’Administration et de la Transparence de la Vie publique.
Le nouveau gouvernement compte 8 entrants parmi lesquels il y a une autre personnalité récompensée pour son attachement à la réélection d’IBK: Yaya Sangaré, député élu à Yanfolila. Yaya avait fait des pieds et des mains pour que son parti, l’ADEMA, soutienne la candidature du chef de l’Etat. Lui aussi n’avait jamais été ministre, mais s’était fait remarquer lors des débats, défendant contre vents et marées le bilan contesté du premier quinquennat d’un président de la République dont la côte de popularité avait chuté.
Il y a eu 12 ministres partants au total. On s’attendait à des départs, mais celui de certains ministres a surpris du monde alors que l’attelage gouvernemental n’a pas connu un grand chamboulement. Ainsi, Baber Gano, un membre influent du RPM, n’a pas été reconduit bien que le public ne retient de lui qu’un fervent défenseur d’IBK.
La séparation de Dr. Abdramane Sylla du ministère des Maliens de l’Extérieur a dû être douloureuse. Ceux qui le connaissent décrivent un homme politique qui a toujours évolué dans l’ombre d’IBK, du règne d’Alpha Oumar Konaré aux années de braises à partir de 2001, en passant par l’Assemblée nationale sous ATT.
Le départ d’Abdoul Karim Konaté dit Empé du gouvernement a aussi surpris plus d’un observateur. Il fait partie des barons de l’ADEMA qui ont publiquement soutenu la réélection d’IBK. Cependant, il n’est pas le seul ministre éjecté après avoir mouillé le maillot pour la réélection du président Keïta. Mohamed Aly Ag Ibrahim, ancien ministre du Développement industriel, a plié bagage malgré ses affiches géantes de la promotion du label IBK.
Enfin, il y a les inamovibles, des ministres qui doivent leur maintien au sein du gouvernement à un pouvoir : celui qui leur a permis de réélire IBK. Pouvait-on se débarrasser de Mohamed Ag Erlaf, ministre de l’Administration territoriale, maître d’œuvre du score d’IBK au nord? Il serait resté même si tout le monde partait. Mais la liste n’est pas exhaustive. En attendant, les commentateurs sont nombreux à parier sur l’échec de cette équipe qui aura besoin de bien plus que la jeunesse de certains de ses membres.
Soumaila T. Diarra
Source: Le Républicain