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Que sont ils devenus… Oumar Kassonké dit Ouolof : Les multiples visages d’un déserteur

Nous avons connu Oumar Kassonké dit Ouolof en tant que policier, et à la fin de sa carrière de footballeur .Ayant brusquement disparu des écrans radars, le temps passé nous a fait réellement perdre ses traces, voire même les souvenirs sur lui. Heureusement que cet autre ancien international du Djoliba AC, Seyba Coulibaly a établi le contact entre nous. Et depuis qu’il a quitté la France pour le Mali, Seyba n’a cessé de nous appeler pour donner la position de son ancien coéquipier. Qui est Oumar Kassonké dit Ouolof ? C’est un ancien joueur du Djoliba des années 1960-1970, de l’USFAS et des  Aigles du Mali. Devenu par la suite officier supérieur de la police, il profita d’une formation en Allemagne pour rendre les armes et s’installer en France. Pourquoi ? Dans l’entretien qu’il nous a accordés, celui qu’on surnommait “Ouolofo kè” revient sur sa carrière sportive, son parcours professionnel et surtout les raisons de son exil.   Après plus de trois décennies en France, il est à Bamako, pour les derniers réglages de son installation définitive au Mali. Car, selon lui, chaque chose en son temps. Il nous a reçus sur son chantier, sis à Sébénicoro Sema, dans le cadre de la rubrique “Que sont-ils devenus ?”.

Oumar Kassonké est le fils de l’un de ses nombreux commis du Soudan Français, qui ont rejoint le Mali après l’éclatement de la Fédération du Mali en 1960.  Avant un joueur du Foyer FC de Bamako avait séjourné dans sa famille à Thiès. Les commentaires de l’étranger et son oncle sur l’histoire du club ont marqué  l’esprit de Kassonké. Cependant, il ne pouvait imaginer un seul instant qu’il jouera au sein de cette même équipe, dont la fusion avec Africa Sport donnera naissance au Djoliba AC.

Une fois à Bamako, Oumar Kassonké loge chez sa grand-mère dans le quartier populaire de  Bamako Coura. Il se familiarise avec les jeunes de son âge, et il intègre le Stade de Dravela, et devient une vedette des compétitions inter quartiers. Ne comprenant pas bambara, on le surnomma “Ouolofo kè”, dont le diminutif donne Ouolof, à ne pas confondre avec feu Mamadou Doumbia “Ouolof” qui jouera après lui dans le même club du Djoliba AC.

En 1965, les dirigeants du Stade malien de Bamako sont venus le chercher, pour leur centre de formation. Kassonké n’hésita pas à leur signifier son attachement au Foyer FC, l’ancêtre du Djoliba. Sans plus tarder et pour se mettre à l’abri des pressions stadistes, il rejoint la catégorie de jeunes des Rouges entrainée par  Salif Diarra Danger.

Djoliba, la cible !

Oumar Kassoke

Une période qui sera aussi marquée par les coupes inter scolaires. Ouolof admis au DEF en 1967 est orienté à l’Ecole Nationale d’Ingénieurs. A l’époque l’accès à l’établissement n’était pas conditionné au BAC. C’est après le coup d’État de 1968 qu’il subira une réforme, et nous parlerons plus bas le sort réservé aux anciens pensionnaires, dont Ouolof qui avaient seulement le DEF. Ces compétitions ont impacté sur l’ascension fulgurante du jeune Ouolof. Ces camarades de promotion à l’école n’ont pas hésité à dire qu’il était au-dessus du lot. Pendant ces coupes inter scolaires, un supporteur du Djoliba, Gaoussou Diakité, cadre des Postes et Télécommunications le surveillait comme du lait sur le feu. Chaque jour il se donnait le temps d’aller le prendre après les cours du soir, pour l’amener aux entrainements. D’après Ouolof son protecteur ne parlait pas beaucoup, mais il le comblait de cadeaux. Ce traitement a créé en lui une prise de conscience par rapport à son avenir au Djoliba. Jouant des deux pieds, ce qui qui lui donne l’atout d’évoluer comme ailier droit ou gauche, l’entraineur des séniors du Djoliba, Fromentin demande à son collègue des juniors de lui passer Oumar Kassonké. Parce qu’à son avis son niveau est supérieur à sa catégorie, et sa maturité progressive avec les grands donnera plus d’avantage à son avenir.

Ainsi, il rejoint l’effectif du coach Fromentin (composé entre autres de Sadia Cissé, Kidian Diallo, Aly Ouattara, Lamine Do, M’Baye Elastique, etc. ….), et gagne sa première coupe du Mali en 1971 face à la Jeunesse Sportive de Ségou étrillée par le Djoliba par 4 buts à 0, et deux titres de champion en 1968  et 1971.

Au lendemain des Jeux Africains de Brazzaville en 1965, Ouolof est sélectionné pour renforcer le groupe qui venait de rater la coupe (par la cruauté du règlement d’alors qui départageait les équipes au nombre de corners en cas de match nul).

Après avoir joué les éliminatoires de la CAN de Yaoundé 1972, paradoxalement Ouolof ne sera pas retenu pour la phase finale. Pourtant, il était au firmament de sa carrière.

Pourquoi n’a-t-il pas effectué le déplacement de Yaoundé ? Oumar Kassonké donne les raisons : “A la veille de la CAN, l’entraineur Allemand Karl a décidé de m’écarter du groupe. Parce qu’il avait établi un programme d’entrainement de deux fois dans la journée. C’est-à-dire matin et soir. Or, je n’étais pas prêt à chômer les cours du matin à l’école pour jouer au football. Nous avons discuté du problème, et je suis resté campé sur ma position. Finalement, il a pris ses responsabilités en se passant de mes services. Et il a été soutenu par le Directeur Technique National, Ben Oumar Sy, lequel a été d’ailleurs à  la base de ma sélection en équipe nationale. La même année, l’ENI a changé de statut. Il fallait le BAC pour y accéder. Nous autres, qui étions, en 3 ème Année, devrions faire le BAC du lycée technique en série Technique-Mathématiques-Industrie. J’ai préparé l’examen minutieusement, malheureusement, j’ai échoué. Ce qui m’a beaucoup marqué”.

Après cet échec, Ouolof refuse de reprendre l’examen  l’année suivante, et rejoint ses parents à Thiès au Sénégal. C’était dans le but de travailler  au lycée comme maître opère, un emploi proposé par son  oncle. Son arrivée a coïncidé avec la suppression de ce poste. Donc, son séjour sénégalais ne produira pas l’ambition escomptée.

Oumar revient au Mali pour tenter sa chance dans deux concours, auxquels il est admis. Il devrait choisir entre le Sénégal pour étudier l’informatique, et Toulouse pour suivre les traces de son premier mentor dans les PTT, à savoir Gaoussou Diakité. Il décide d’aller en France en 1973, mais avec une promesse ferme : ne rien entreprendre sur le plan footballistique, et de retourner continuer à jouer au Djoliba. La mobilisation et l’assistance des dirigeants des Rouges à l’aéroport de Bamako Sénou ont contribué à créer en lui un sentiment de reconnaissance. Une fois à Toulouse, Ouolof avait tendance à ne pas respecter son engagement. Il voulait changer d’avis. Parce que les responsables des Postes et Télécommunications de Toulouse lui ont également promis du boulot avec un salaire consistant. Mais, l’amour du Djoliba prend le dessus sur son dilemme. En réalité, Tiécoro Bagayoko, en partance pour la coupe du monde de 1974, a fait un saut en France pour recadrer les choses. Selon Ouolof, Tiécoro lui a promis une bourse sur les Etats Unis une fois qu’il retourne après sa formation.

Effectivement, à la fin de ses études,  Oumar Kassonké rejoint le pays et reprend sa place au Djoliba et en équipe nationale.

Durant les trois premières années, il est affecté d’abord au service des PTT, puis au ministère de l’intérieur.  Ouolof,  muni de son diplôme supérieur, dénonce le déséquilibre salarial par rapport à ses collègues militaires. Comme il s’est plaint auprès de son chef de bureau, celui-ci lui signifie clairement que son traitement est consécutif à son statut de civil. Autrement dit, s’il voulait un plus gros salaire, il devrait intégrer l’armée. A défaut, la situation l’obligerait à se contenter de ce que l’Etat lui donne.

Cela s’est passé en 1977, date à laquelle il joue son dernier match avec les Aigles à Abidjan (dans le cadre des éliminatoires de la CAN de 1978) et passe également au concours d’entrée à la Police.

Après une formation à l’Ecole Nationale de Police, il effectue un stage de quelques mois au 3ème Arrondissement. Mais, compte tenu de sa spécialisation en PTT, Ouolof est muté à la Division Technique de la Police, sise à la Base Aérienne. Le constat amer est qu’il n’y avait pas de matériels adéquats, hormis un Rac.

La France contre l’uniforme

Face à une telle déception, il demande en vain à partir, malgré une proposition de bourse en ex URSS. Se trouvait-il dans un mauvais état d’esprit ? Parce que Tiécoro Bagayoko a été arrêté, et la hiérarchie l’oblige à transférer à l’USFAS, en vertu de son statut de militaire. Ouolof répond que certes l’ancien directeur des services de sécurité lui vouait un respect religieux, mais il ne lui doit pas son intégration à la Police. Sinon, soutient-il, Tiécoro Bagayoko était un homme aimable et passionné de sport.

Puisque ses demandes d’affectation n’ont pas eu de suite favorables, Oumar Kassonké adresse directement une demande au ministre de la Défense par voie hiérarchique. C’est à la suite de cette audace que le directeur de la Sureté Nationale, Sambou Soumaré le reçoit, et lui pose la question de savoir ce qu’il veut réellement. A la lumière des argumentations développées par Ouolof, l’administration le mute en 1981 au 4 ème Arrondissement comme chef de la Voie Publique et il continue à jouer avec l’USFAS.

Entre 1982 et 1983, il est nommé commissaire adjoint au 6ème Arrondissement à Korofina, avant de prendre le train pour la Cité des Rails où il dirige le commissariat central de Kayes. Pour des raisons d’incompatibilité d’humeur, il revient à Bamako en 1988 et met un terme à sa carrière footballistique. Parce qu’avec sa nomination comme commissaire à Koulouba, il n’avait plus le temps. Mais le chef d’Etat-major des Armées ordonne sa nomination comme Directeur Technique de l’équipe militaire. Il n’aura passé qu’un an à ce poste, et aussi dans la commission Ad’ hoc de la Femafoot.

Tout bascula pour Oumar Kassonké en 1989 lorsqu’il bénéficia d’une bourse d’études pour l’Allemagne. Et pour cause, à la fin de sa formation, Ouolof, en faisant escale en France, tombe sur une opportunité d’emploi. Il tourne dos à la Fonction publique malienne pour de bon. Les multiples communiqués et mises en demeure ne suffiront pas à lui faire changer d’avis. Finalement, la hiérarchie militaire se trouva dans l’obligation de le radier. Une décision qu’il n’a pas acceptée, dans la mesure où il s’est dit que compte tenu de son temps d’emploi, il aurait pu bénéficier de la pension de retraite.

Notre héros profita d’une mission du Ministre de la Défense, feu le Général Mamadou Coulibaly, pour aborder la question. Oumar Kassonké n’aura pas gain de cause. Il revient sur les argumentations du Général Coulou : “Quand je lui ai dit ce que je pense de la situation, concernant mes droits de pension, il m’a dit que l’armée a ses principes, lesquels ne doivent en aucun cas être violés. Mon cas est spécifique, pour la simple raison que j’ai déserté en temps de paix. Et malgré les différentes voies de recours pour me demander de reprendre service, je ne suis pas retourné au pays. Dans ce cas, les textes sont très clairs et sans état d’âme. Avec ces propos, je ne pouvais pas répliquer, surtout que c’était le ministre de la défense”.

Les choses sont restées à ce niveau. Ouolof continue sa vie en France au poste de directeur technique au Club Multisports de Bagneux jusqu’en 2004 où il rend sa démission pour créer sa propre entreprise C.O.K .TRANSPORTS.

Aujourd’hui, après tant d’années passées en exil, Oumar Kassonké envisage de retourner au Mali. C’est d’ailleurs l’objet de sa présence à Bamako actuellement. Pour la circonstance, il est en train de finir son chantier sis à Sébénicoro Sema.

Marié et père de quatre enfants, notre héros du jour, qui déteste la démagogie, est un passionné de sports pour avoir été aussi champion du Mali en Tennis, avec des tournées dans la sous-région, en Chine et au Mexique.

O. Roger Sissoko

Source: Aujourd’hui-Mali

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