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Purification ethnique en Centrafrique : « les forces internationales pas là où et quand il le fallait »

Conseillère spéciale d’Amnesty International chargée des crises et des conflits, Donatella Rovera vient de passer un mois en Centrafrique. Évoquant une purification ethnique, l’enquêtrice alerte face au risque d’un exode total des musulmans.

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Amnesty International publie un rapport alarmant sur la situation du pays. Comment résumer le conflit ?

« Dans deux semaines, vues les exactions, il n’y aura plus de musulmans en Centrafrique. Le rapport n’emploie pas le terme de purification ethnique à la légère. Les Seleka, qui ont pris le pouvoir en mars 2013, ont perpétré des violences contre les chrétiens.

 

Les 5 et 6 décembre derniers, lors d’une explosion de folie après le meurtre d’un général par les anti-Balaka, les Seleka ont tué un millier de personnes à Bangui.

Après leur départ, les anti-Balaka ont pris le relais, visant, cette fois, les musulmans. Or, ces derniers sont une minorité en Centrafrique, représentant environ 15 % de la population. S’il était illusoire de chasser tous les chrétiens, le pays se vide maintenant de ses musulmans qui paient pour les ex-Seleka. »

La situation est-elle incontrôlable ?

« Jeudi, nous nous sommes rendus dans le village de Bouguéré, à 250 km de Bangui, pour enquêter sur un massacre survenu fin janvier. Nous avons trouvé un bébé mort dans une maison. Dans une autre, une fillette de onze ans était recroquevillée : la dernière musulmane du village. Un nouveau carnage avait eu lieu trois jours plus tôt. Sur la route du retour, en évacuant la fillette, nous avons traversé le village de Boboua. Les anti-Balaka venaient d’attaquer. Nous avons vu trois corps. Le maire et ses deux fils, semble-t-il. »

Les soldats étrangers sont ils bien perçus ?

« Les forces internationales n’ont pas été là où il fallait, quand il le fallait. Personne n’est allé à Bouguéré après les exactions de janvier. D’où l’attaque de lundi dernier. Il y a également le cas de Yaloké, où la force française Sangaris a pris pied.

Les musulmans y étaient environ 8 000. Ils ne sont plus que quelques centaines. Malgré la présence de Sangaris, les anti-Balakas ont monté des barrages à l’entrée et à la sortie de la ville. Il y a tout de même eu un laisser-faire. Aujourd’hui, les anti-Balakas attaquent les convois de musulmans fuyant le pays.

Dans le sud, nous avons vu des habitants réfugiés dans la brousse pour se protéger. Les moyens n’ont pas été utilisés de la bonne façon. Au moment de la chute du président Djotodia et donc de celle prévisible des Seleka, en janvier dernier, Amnesty International avait tiré la sonnette d’alarme. En vain.

Les Français de Sangaris vont passer à 2 000 hommes. La force africaine de la MISCA compte de 5 000 à 5 500 soldats. Les soldats tchadiens ont escorté des Seleka qui en ont profité de cette protection pour commettre des exactions contre les chrétiens. »

À quoi faut-il s’attendre maintenant ?

« Les commerçants du pays étaient massivement musulmans. Aujourd’hui, la chaîne alimentaire du pays est très perturbée. En même temps, à cause de l’insécurité, le Programme alimentaire mondial a stoppé ses convois routiers ; favorisant les airs.

Avant notre départ, on croisait encore des anti-Balakas armés en plein Bangui. Les Seleka se regroupent maintenant dans l’est du pays. Il y a un vrai risque de recrudescence des violences. »

 

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