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Procès « biens mal acquis »: Teodorin Obiang conteste la légitimité de la justice française

Le fils du président de Guinée équatoriale, Teodorin Obiang, accusé de s’être frauduleusement constitué un patrimoine considérable en France, a vivement contesté lundi, via ses avocats, la légitimité de la justice française à le juger, au premier jour de son procès à Paris.

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Ancien ministre de l’Agriculture et des forêts promu vice-président par son père, Teodorin Obiang, bientôt 48 ans, est poursuivi devant le tribunal correctionnel de Paris pour blanchiment d’abus de biens sociaux, de détournement de fonds publics, d’abus de confiance et de corruption.

Il encourt jusqu’à dix ans d’emprisonnement et une amende qui pourrait atteindre quelque 50 millions d’euros.

Le dignitaire africain qui avait bénéficié d’un premier report de son procès afin que ses avocats puissent préparer sa défense, est le premier à être jugé dans le cadre des procédures dites de « biens mal acquis » engagées en France, sur les conditions d’acquisition de riches patrimoines par plusieurs dirigeants du continent.

Teodorin Obiang n’était pas présent devant ses juges, comme l’avait annoncé vendredi l’ambassadeur de son pays qui avait dénoncé un « vaste complot » mené contre la Guinée équatoriale.

L’enquête ayant conduit au procès, ouverte après des plaintes des associations Sherpa et Transparency International, a mis au jour le patrimoine considérable de Teodorin Obiang: immeuble avenue Foch, dans l’un des quartiers les plus huppés de Paris, estimé à 107 millions d’euros, voitures de luxe et de sport (Porsche, Ferrari, Bentley, Bugatti).

Ses dépenses somptuaires en France étaient très éloignées du quotidien de son pays du golfe de Guinée, dont plus de la moitié des habitants vivent sous le seuil de pauvreté.

Quand il est à Paris, Teodorin Obiang, éternel célibataire au look savamment étudié (lunettes noires, cheveux gominés, barbe taillée), dépense des mallettes entières de liquide chez les couturiers de l’avenue Montaigne.

Au terme de l’instruction, les juges ont estimé que son patrimoine, évalué à une centaine de millions d’euros, ne pouvait avoir été financé par ses seuls revenus officiels, mais était issu « des détournements de fonds publics », de la corruption.

– ‘Nausée’ et ‘écoeurement’ –

Devant le tribunal, l’un des avocats français du prévenu, Emmanuel Marsigny, a demandé une nouvelle fois, mais sans succès, un report de l’audience, attaquant tous azimuts la possibilité d’un tel procès.

Sur le fond, il estime que Teodorin Obiang ne peut être jugé pour blanchiment car il faudrait justement que la justice française détermine si l’argent accumulé dans son pays par le prévenu pour effectuer ses dépenses est d’origine licite ou non, c’est-à-dire juger un étranger pour des faits commis à l’étranger.

Cela « revient de fait à créer une compétence de juridiction universelle » pour la justice française, a plaidé Me Marsigny, « c’est un problème juridique majeur ». Selon lui, la France « s’exposerait à une saisine du Conseil des sécurité des Nations unies », dans ce cadre.

Sentiment de « nausée, d’écœurement », a répliqué l’avocat de Tranparency International France, William Bourdon, qui a dénoncé une « obsession pathologique d’éviter ce procès », une volonté du côté de M. Obiang d’ériger le « mausolée de son impunité ».

Me Marsigny a également soutenu que son client ne pouvait être jugé car, en tant que vice-président de son pays, il bénéficierait d’une immunité pendant la durée de ses fonctions.

En outre, s’appuyant sur une procédure ouverte par la Guinée équatoriale devant la Cour internationale de justice (CIJ) à La Haye (Pays-Bas), l’avocat estime que la France devrait attendre que cette juridiction statue avant de se prononcer.

La CIJ a, le 7 décembre dernier, rendu une ordonnance demandant à la France d’assurer, pour l’instant, l’inviolabilité du luxueux immeuble de l’avenue Foch, saisi par la justice française en cours de procédure, et dont Malabo soutient qu’il s’agit d’un local diplomatique.

Alors que le procès de M. Obiang pourrait déboucher sur la confiscation pure et simple de ce bien, Me Marsigny a insisté sur le fait que la France violerait alors ses engagements internationaux en matière de protection des locaux diplomatiques.

En refusant le report du procès, le tribunal a rejeté cette analyse, estimant que la procédure en cours devant la CIJ rendait « impossible » de mettre en oeuvre une éventuelle peine de confiscation, mais pas de la prononcer.

Le procès est prévu jusqu’au 6 juillet.

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