Le Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du Mali, Me Ousmane B. Traoré, invite le Procureur général près la Cour d’appel de Bamako à ‘’débusquer sans complaisance les porteurs de valises d’argent sale au Tribunal’’. On ne saurait mieux dépeindre la maladie qui gangrène l’appareil judiciaire.
«Les magistrats maliens sont indépendants de tout, sauf de l’argent sale». Cette fracassante façon de parler d’un secret de polichinelle devenue célèbre est de Me Fanta Sylla, alors Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du Mali. C’était lors d’une rentrée solennelle des cours et tribunaux dans la salle Djéli Baba Sissoko du Palais de Congrès (actuel Centre international de conférence de Bamako).
Me Ousmane B. Traoré est-il un disciple de son illustre devancier au Bâtonnat ? Le discours qu’il a tenu à la cérémonie solennelle d’installation des chefs de juridiction de la Cour d’appel de Bamako, le 20 juillet 2023, dépeint fort éloquemment le principal mal qui gangrène l’appareil judiciaire malien.
La justice, a reconnu le Bâtonnier Ousmane B. Traoré, c’est la manifestation vivante de la démocratie et le pilier de l’Etat de droit. L’Avocat estime que la justice a besoin de solennité, voire de faste. «Rendre la justice avec pompe ne saurait être confondu avec l’usage immodéré que certains acteurs de la justice, en quête véritable de popularité et de sensationnel, s’affichent sur les réseaux sociaux au mépris de la délicatesse et de la pondération qui sont consubstantielles à la fonction du juge», a lancé Me Traoré qui a appelé le Procureur général à mettre fin à ces pratiques.
Des cœurs humains sous les robes
Rendre la justice avec pompe, a-t-il ajouté, exige de tous les acteurs du ressort de la Cour d’appel de Bamako le respect du serment prêté. «Rendre la justice avec pompe exige que vous demeuriez inflexible sur le respect des règles de droit, de rester droit dans vos bottes – trivialement parlant – de ne céder à aucune pression d’où qu’elle vienne, d’exiger de vos collaborateurs qu’ils donnent sous vos impulsions et contrôle respectifs le meilleur d’eux-mêmes tout en conservant cette dose d’humanisme s’il le faut, dont aucun être humain se saurait se départir d’ailleurs, car sous vos robes battent des cœurs humains», a-t-il plaidé.
A en croire Me Ousmane B. Traoré, «rendre la justice avec pompe, c’est débusquer sans complaisance les porteurs de valises, c’est-à-dire de l’argent sale au tribunal quelle que soit leur profession, de les mettre au pilori sans état d’âme, car ils salissent toute l’institution et ils ne méritent que l’opprobre». Pour lui, rendre la justice avec pompe, c’est redorer son blason, c’est-à-dire restaurer son image d’antan.
C.D
Le Challenger