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Occupation illicite de la zone aéroportuaire : L’Aéroport de Senou entre démolition et perte de licence

Ajournée sur le fil du rasoir, il y a une dizaine de jours environ, la grande démolition annoncée en «zone aéroportuaire» a finalement avorté au grand soulagement de ses occupants illicites mais au mépris pour l’heure des mises en garde d’observateurs avertis et des partenaires internationaux des Aéroports du Mali. La problématique de son occupation illicite demeure entier, quoi qu’il en soit, au regard de ses implications sur le devenir de l’activité aéroportuaire ainsi que de ses enjeux socio-économiques.

 

Ce n’est guère fortuitement, en effet, que le département des Domaines se montre intraitable quant à résoudre l’équation de la zone aéroportuaire par l’ultime solution : la démolition des constructions encombrantes, érigées sur la base d’attributions irrégulières. L’enjeu est manifestement de taille et ne se mesure qu’à l’ampleur du péril qui guette l’activité aéroportuaire voire à la dimension de ses implications socio-économiques.

Suspendue pour prévenir une instrumentalisation éventuelle du climat politique délétère dans la capitale, l’opération de démantèlement tant annoncée (et sans doute redoutée) manquera difficilement d’être prochainement remise au goût du jour. Et pour cause, la situation confronte les hautes autorités maliennes au dilemme cornélien suivant : laisser les occupants illicites aliéner le domaine aéroportuaire aux dépens de sa vocation légale ou sévir au nom des normes et exigences dont l’inobservance pourrait rendre l’Aéroport de Senou inapte à une exploitation internationale.

Tout porte à croire, en définitive, que l’option de la démolition reste plus plausible, au risque de ne pouvoir éviter la perte jusqu’à nouvel ordre de la licence internationale en vertu de laquelle les vols internationaux sont autorisés sur Bamako. Conséquence d’une telle éventualité, confie un spécialiste du secteur, les passagers à destination de la capitale malienne se verront obligés de recourir à la route pour regagner Bamako par les pays voisins et les voyageurs maliens emprunteront le chemin inverse pour accéder aux voies aériennes via les aéroports environnants. De quoi entraîner, selon le même interlocuteur anonyme, d’énormes manques à gagner en ressources économiques liées à l’exploitation commerciale de la zone aéroportuaire ainsi qu’a d’autres services s’y rattachant. Il va sans dire de la menace qui plane sur les centaines d’emplois découlant d’un secteur en pleine expansion et sur lequel reposent de grandes attentes socio-économiques de l’Etat malien telles que contenues dans un Plan de Développement Intégré qui remonte à l’année 1994.

De source concordante, en tout cas, il sera question en Octobre prochain du renouvellement par l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI) de la licence de l’Aéroport International «Modibo Keïta». Et le sujet sera examiné, selon toute évidence, à l’aune de la conformité de cette structure aux normes sécuritaires, lesquelles sont malheureusement foulées aux pieds tél qu’en attestent les installations et édifices anarchiques qui obstruent tant l’activité aéroportuaire que l’exploitation aéronautique. Il s’agit entre autres de la zone dite des trouées. Destinées principalement à faciliter l’atterrissage des avions en détresse, elle pourrait êtrel’objet de sérieuses réserves de la part des inspecteurs chargésd’évaluer le principal aéroport du Mali et compromettre du coup son éligibilité à une nouvelle licence déjà sujette à caution, au regard des empiètements domaniaux en violation des actes de délimitation de la zone. Il s’agit notamment du décret 95-068 et 96-338 P-RM portant respectivement classement du domaine aéroportuaire et approbation de son plan d’urbanisme sectoriel. Le premier acte lui affecte comme emprise une superficie de 8 720 hectares pour les besoins sécuritaires, aéronautiques ainsi que pour les usages d’autres activités aéroportuaires et aménagements pris en compte dans le second acte, à savoir : la construction de logements pour les cadres et travailleurs tant nationaux qu’internationaux ainsi que la réalisation de moult commodités liées au secteur tels que des sites destinés à l’hébergement des passagers ou à leurs prises en charge sanitaire, aux salles de sports et loisirs, à la construction d’écoles, entre autres.

Autant d’éléments prévus dans le Plan de Développement Intégré de la zone et en vertu desquels les besoins domaniaux de l’activité aéroportuaire et aéronautique ont été évalués et estimés avant l’affectation de l’espace par décret présidentiel.

Quoique théoriques, ces projets font figure de précieux atouts qui entrent dans la balance et confortent la vocation internationale de Senou. Mais ils risquent de se réduire à un coûteux mirage si leur réalisation continue de se heurter aux litiges fonciers occasionnés par les attributions de parcelles dans l’emprise concernée. C’est pourquoi, le département des Domaines, sous l’égide du ministre AliouBadraBerthé, s’est mis dans toutes les dispositions adéquates pour lever les équivoques avant d’aborder le rendez-vous décisif d’Octobre prochain avec l’OACI. L’intervention énergique qui devait en résulter a été finalement suspendue in extremis mais il ne peut s’agir, selon toute vraisemblance, que d’un sursis accordé aux propriétaires des bâtisses qui obstruent la servitude des pistes d’atterrissage, brouillent la communication entre les équipages et l’assistance aéronautique ou exposent les appareils à la possibilité d’être atteints par des projectiles au décollage. Ce n’est pas tout. S’y ajoute les risques liés à la fréquence de volées d’oiseaux attirés par les décharges d’ordures spontanées, etc. Autant d’écarts sur lesquels la sonnette d’alarme a été tirée par le département et au sujet desquels les spécialistes s’accordent à admettre une incompatibilité avec l’activité aéroportuaire. De même les opinions convergent quant à l’alternative illusoire qui consisterait à recourir à un déplacement onéreux de la zone pour tenter d’éviter à la fois le déclassement de l’Aéroport et le déguerpissement de ses occupants illicites.

 

A KEÏTA

 Le Témoin

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