“Nous devons reconnaître que nous avons été trop naïfs vis-à-vis de la Russie, et qu’aujourd’hui on en paie le prix, un prix cher, celui de notre dépendance vis-à-vis de l’énergie russe”, a lancé la Première ministre finlandaise Sanna Marin, mardi devant le Parlement européen, en appelant à l’unité entre États membres.
“Nous avons construit une vision qui se basait sur des concepts erronés, nous aurions dû écouter plus attentivement nos amis des États baltes et de Pologne qui ont vécu sous le joug soviétique”, a regretté la sociale-démocrate de 36 ans, dont le pays partage plus de 1.300 km de frontière avec la Russie.
“Nous aurions dû changer bien plus tôt”
Mme Marin était l’invitée mardi de la série de débats “C’est l’Europe”, qui voit les dirigeants des États membres de l’UE exposer leur vision de l’Union en séance plénière de l’hémicycle strasbourgeois. En matière énergétique notamment, “nous aurions dû changer (de modèle d’approvisionnement) bien plus tôt pour des raisons environnementales, ce qui nous aurait évité de nous retrouver dans cette situation vis-à-vis de la Russie.”
Sanna Marin dit attendre des mesures audacieuses de la Commission européenne, à la veille du débat sur l’État de l’UE au cours duquel la présidente de la Commission Ursula von der Leyen doit exposer ses propositions pour assurer l’approvisionnement et faire baisser les prix. “Les solutions ordinaires ne suffisent plus, il faudra si nécessaire des mesures exceptionnelles et, à moyen et long terme, investir massivement dans les technologies renouvelables”.
À ses yeux, l’UE va “trouver des solutions ensemble”. “Le monde occidental est plus uni que jamais, la Russie plus isolée que jamais.” Et au final, prédit-elle, “la Russie se sera appauvrie, tandis que la Suède et la Finlande seront devenues membres de l’OTAN”.
“La responsabilité revient avec tout aux États membres”
Appelant à des sanctions plus fortes contre Moscou et son “chantage” énergétique, la dirigeante a aussi répété que la place de l’Ukraine était bien dans l’UE, et que les portes de l’Union devaient rester ouvertes à “tous les États européens prêts à partager nos valeurs.”
Sanna Marin n’en a pas moins rappelé la position budgétaire rigoureuse de son pays. Face à des défis comme les crises énergétique et climatique, on ne peut pas simplement augmenter le budget ou assouplir le cadre budgétaire, selon elle. Ainsi, le plan de relance post-covid, fondé sur une mutualisation de la dette qui fut difficile à accepter pour les pays les plus “frugaux” auxquels la Finlande s’était un temps jointe, ne serait pas un modèle adapté pour les crises futures. “Le partage des compétences entre l’UE et les États membres doit rester bien clair, la responsabilité en matière de politique économique revient avant tout aux États membres, conformément aux traités”, a-t-elle prévenu.
Alors que la conférence sur l’avenir de l’Europe envisage une révision des traités, Mme Marin l’exclut en période de crise. “Les citoyens veulent des réformes et du renouveau, et nous pouvons y répondre dans le cadre actuel, par exemple, en recourant à la majorité qualifiée dans les politiques étrangères et de sécurité.”
Sexisme en politique
À aucun moment de son intervention, la Première ministre n’a fait allusion aux récentes attaques dont elle a été la cible dans son pays, après la publication de vidéos de fêtes privées où certains lui ont reproché son sens de la fête, et qui ont généré une vague de soutien à l’international.
Quelques députés ont toutefois saisi l’occasion pour dénoncer le sexisme en politique. “En essayant de vous déstabiliser, ils vous ont transformée en icône”, a affirmé Assita Kanko (CRE, N-VA), tandis que Iratxe Garcia Perez (S&D) encourageait les femmes, et les femmes jeunes en particulier, à “écrire l’histoire de l’Europe”.
La cheffe du gouvernement finlandais a préféré, en réponse, souligner l’apport de la diversité sociale à la prise de décision en politique. “Je me réjouis que la Finlande soit un pays avec des femmes ministres, des femmes cheffes de parti, etc. Mais nous ne sommes pas que des femmes qui représentons une génération nouvelle, nous travaillons sur des questions de fond comme n’importe quel politique qui remplit ses fonctions. Quel que soit notre sexe, notre âge ou l’endroit d’où l’on vient, nous faisons tout pour les citoyens, et cette diversité doit se ressentir dans la prise de décision, cela ne fait que l’améliorer”.
Source: 7sur7