Voila qu’après l’occupation du Nord de notre Pays, après le déclenchement de l’opération Serval et la libération de nos régions septentrionales, voila qu‘après les efforts de la CEDEO et la médiation étrange du Burkina Faso, Voila qu’après tant de tribulations, tant de confusion, de silence, voila que notre grand et puissant voisin l’Algérie, se présente comme étant le prochain pays médiateur de « la crise malienne ».
Comme on dit « les mauvaises habitudes ont la vie dure » parce que l’Algérie vient de réactiver les mêmes mécanismes de médiation qu’il affectionne tant, ceux de la confusion, de l’amalgame.
L’Algérie affectionne tant cette façon bien propre à elle de ménager la chèvre et le chou.
La provocation d’une rencontre fortuite, improvisée entre groupes armés notamment une aile du MNLA, une faction contestée du MAA, en ignorant les membres fondateurs de ces mouvements, et la société civile rappelle les vieilles méthodes de la politique algérienne celles du chantage, du racolage. La preuve, l’Algérie a pris part à toutes les mascarades d’accords signés par le Passé. C’est exactement ces pratiques-là, ces méthodes de gestion de notre crise qui ont ouvert la voie à toutes les dérives, à l’effritement des valeurs, la démilitarisation de la zone, ayant entrainé la contrebande sous toutes ses formes, la drogue, la circulation des armes légères et l’appât du gain facile. Les mêmes causes produisent les mêmes effets, à ne pas en douter.
En scrutant minutieusement la situation actuelle de la région on se rend compte aisément que l’Algérie poursuit un objectif double dans cette subite volte-face à savoir :
- prouver qu’elle reste in contournable dans la gestion de la crise, une crise qu’elle a géré « à sa façon » depuis vingt trois ans,
- qu’elle entend conserver sa mainmise sur la politique géostratégique de cette partie très prometteuse du Sahara malien.
Qu’est qui a bien poussé notre grand Voisin à se rappeler subitement de notre existence ?
Est-ce- les crises prochaines qui menacent sa stabilité notamment l’état de santé du Président Bouteflika, ou les conflits entre les tribus berbères mzabites et arabes du Sud de l’Algérie, ou plutôt l’éventualité d’un accord de défense entre le Mali et la France, accord qui nous entrainera vers une autre forme de dépendance vis-à-vis de la France et de l’Otan.
Il est grand temps que nos amis algériens comprennent que le Mali, leur Mali à eux, le Mali de la dépendance sécuritaire est mort. Sur ses cendres se dresse désormais un Mali nouveau, avec des hommes intègres, épris de paix, de dialogue, de démocratie réelle et de développement mais dans la dignité, le respect réciproque. Un Mali engagé sur la voie à sens unique de la réconciliation nationale, de la décentralisation et de la pluralité ethnique.
L’Algérie doit se rendre à l’évidence, comme nous, et doit comprendre que la propagande qui consiste à produire du neuf avec du vieux est révolue. Au Mali nous sommes résolument engagés à prendre notre destin en main. Nous ne recevrons plus de leçons de quiconque et nous sommes mieux placés que quiconque pour discuter de notre avenir et de celui de nos générations futures.
Toute médiation algérienne dans la gestion de la crise malienne sans l’implication la société civile sera un énième échec. La société civile dans tous les pays ayant connu, ou traversé des crises, a joué, et joue encore un rôle prépondérant dans la résolution des conflits. Les exemples sont légions en Afrique du Sud, à Madagascar, en Côte d’ivoire, et aujourd’hui, en République centre africaine etc
Nous sommes en mesure de diagnostiquer et de traiter les causes profondes de ce conflit, créer nos propres structures de consolidation de la paix, promouvoir et développer nos propres capacités à gérer et à résoudre nos différends. Nous sommes capables de renforcer notre paix et éloigner de nous les spectres de la violence, en excluant toute ingérence extérieure d’où qu’elle vienne.
Notre voisin du Nord a longtemps manipulé la question des minorités touarègues et arabes au Mali dans la perspective géostratégique de contrôler la partie nord de notre Pays, en entretenant des réseaux de renseignements et en contrôlant les flux commerciaux de nos populations avec ses régions sud.
Nos amis algériens n’ont-il pas abrité et parrainé les accords de Tamanrasset en 1991, n’ont-il pas abrité et parrainé les accords d’Alger en 2006. Ne savaient-ils pas que leur pays servait de transit à toutes les malédictions qui ont frappé le Mali. Ne sont-ils pas fatigués de jouer au pyromane, puis au sapeur-pompier pour un incendie qu’ils ont contribué à allumer directement ou indirectement ?
Nous avons été écrasé pendant des décennies, piétinés, victimes de batailles géostratégiques mondiales, d’intérêts qui nous dépassent et qui dépassent de loin nos faibles capacités d’analyse et nos stratégies .Il est temps que cela s’arrête. Nous sommes prêts à repartir sur de nouvelles bases. Nous sommes prêts à dialoguer mais de façon transparente, franche et inclusive. Plus d’accords à la sauvette.
L’Algérie reste liée au Mali par une frontière longue de 1400km, ouverte à un désert enclavé et profitable aux trafics d’armes et de drogues en tout genre. Tout en reconnaissant le rôle que pourrait jouer ce pays dans la résolution du conflit dont il détient jusqu’à un passé récent les ficelles, l’Algérie doit comprendre que notre Pays vient d’amorcer un virage à 180° de sa politique intérieure et extérieure, et que les problèmes de notre Pays seront traités en étroite collaboration avec l’ensemble des acteurs, en premier lieu la société civile, dans un débat inclusif de toutes les forces vives. Les sous-fifres peuvent prendre leur retraite. Au Mali il ya des hommes nouveaux et intègres qui discuteront avec l’Algérie ou tout autre Pays, ou Organisme intervenant dans notre Pays. Nous avons des hommes d’une grande hauteur de vue animés d’un réel souci de rigueur intellectuelle, maitrisant parfaitement nos réalités politiques, socioculturelles, économiques et religieuses.
.Au Mali, la société civile a un rôle important à jouer dans la restauration de la paix et d’une sécurité durable. Nous restons persuadés qu’une paix durable ne peut être atteinte par le biais de solutions rapides .La Paix est un processus qui s’étale dans la durée et qui plonge ses racines dans le dialogue, la communication, et les échanges intercommunautaires. La paix requiert des stratégies nouvelles à court, moyen et long terme.
Le développement à son tour exige la participation active de tous les acteurs de la société civile. Le rôle de la société civile est fondamental dans le processus de reconstruction de la paix et la résolution de la crise actuelle au Mali. L’implication effective des autorités traditionnelles et la prise en compte des spécificités socio politiques, économiques et culturelles locales en seront la meilleure illustration.
La contribution de l’Algérie aux efforts de la communauté Internationale dans la résolution de la crise au sahel, doit respecter l’unité nationale du Mali, sa stabilité politique, et promouvoir un dialogue national inclusif de tous les Maliens. Nous n’avons que faire de conflits d’intérêts, d’ingérence et de présence de puissances étrangères sur le sol malien. Nous ne rejetons aucune main tendue et nous saluons les efforts du groupe des experts de la commission bilatérale pour la surveillance des frontières algéro-maliennes, mais nous avons besoin d’une réelle coopération dans le domaine sécuritaire le long des frontières communes entre les deux pays…… pour une fois !.
Une contribution de Mohamed Ould Sidi Mohamed
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