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MINUSMA: Mission Impossible? (suite)

Un nouveau mandat pour la MINUSMA ? Selon la porte-parole de la mission, Radhia Achoury : « notre mandat est clair ». Et en attendant la prochaine session du Conseil de Sécurité qui doit plancher sur son renouvellement en juin, une évolution ne semble pas d’actualité. Les membres du Conseil de Sécurité, en visite au Mali en mars dernier, avaient d’ailleurs indiqué que le mandat de la MINUSMA était « suffisamment robuste pour les besoins des tâches qui lui sont assignées ». Le fait est, cependant, que le gouvernement du Mali et les populations des zones encore soumises à l’insécurité dans le nord du pays espèrent voir des soldats de la paix plus présents et avec les moyens de les défendre et de « se défendre eux-mêmes ». Radhia Achoury rappelle que c’est Barkhane, la force française, qui « est mandatée pour combattre le terrorisme aux cotés de l’État malien. […]

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La MINUSMA, pour sa part, participe à la lutte contre le terrorisme en réduisant et empêchant les mouvements des groupes terroristes sur plusieurs parties du territoire malien, par le biais des patrouilles qu’elle effectue, les opération coordonnées avec Barkhane et les FAMAs, et aussi par la fourniture d’informations aux autorités maliennes ».

Il existe un problème de compréhension du mandat de la mission qui est essentiellement orienté sur la mise en œuvre de l’accord de paix et la supervision du cessez-le-feu. « La MINUSMA ne peut pas être partout où la population est menacée, vu le vaste territoire, les conditions d’accès difficile à certaines zones, et ses moyens qui demeurent malgré tout limités (hélicoptères, avions et véhicules blindés) », assure la porte-parole. Présente au Mali depuis juillet 2013, la mission compte 10 400 soldats et 1 105 policiers, dont plus que 90% sont déployés dans le nord du pays. Elle est à ce jour, après l’ONUSOM en Somalie dans les années 90, la mission de paix la plus meurtrière pour les casques bleus dont certains, à l’image des Guinéens qui ont perdu 6 des leurs lors d’une attaque en février dernier à Kidal, commencent à réclamer eux aussi un renforcement de leur mandat.

Un appui social aux populations

Depuis le début de son mandat en juillet 2013, la MINUSMA s’est également illustrée sur le terrain du retour de l’État au plus près des populations, en aidant à la réinstallation des services sociaux de base. Plus de 150 projets ont ainsi été menés ces trois dernières années, pour un montant de 4 millions de dollars américains. Ces projets sont réalisés dans les régions de Kidal, Gao, Tombouctou et Mopti, ainsi qu’à Bamako, partout où des appuis sont nécessaires et concernent pour la plupart les infrastructures, l’appui aux services publics, la réhabilitation de systèmes d’alimentation en eau, l’accès à la justice, les activités génératrices de revenus, la culture et le sport, explique-t-on au sein de la mission. Ce sont des forages pour l’eau, des centres de santés mais aussi des tribunaux et des prisons qui ont été construits ou réhabilités. Sans oublier l’électricité pour les populations les plus isolées. Autant de bons points reconnus par les principaux intéressés, à l’image de Fatouma, habitante de Gao qui « salue l’action humanitaire de la MINUSMA qui apporte le soulagement aux couches les plus fragiles ».

« L’objectif sous-jacent est de soutenir les initiatives de stabilisation, répondre aux besoins pressants des communautés pour un meilleur accès aux services sociaux de base, dont la justice et la sécurité », affirme la porte-parole de la MINUSMA selon qui, grâce à certains de ces projets, de nombreuses populations, notamment à Kidal, ont été dotées d’infrastructures et d’accès à l’eau et l’électricité.

Abus sexuels : le Mali n’est pas à l’abri

On en parle en Centrafrique, en Côte d’Ivoire ou sur d’autres théâtres d’intervention des Nations unies. La mission onusienne au Mali n’a pas non plus échappé à des accusations d’abus sexuels. Les premiers ont fait surface à Gao, quelques mois après sa création en 2013, faisant cas de la mauvaise conduite de certains casques bleus et de témoignages des populations dénonçant des viols contre des jeunes filles. On reconnait au sein de la mission que 6 cas d’allégations d’abus sexuels ont été enregistrés, dont un en 2016 pour le moment. « Sur les six cas, quatre sont en cours d’investigation de la part des pays contributeurs de troupes concernés et un cas est en cours d’investigation par le Bureau des services de contrôle interne de l’ONU. Pour l’un d’entre eux, les allégations se sont avérées infondées », explique Radhia Achouri, porte-parole.

 

Pour cette habitante de Tombouctou, qui était à Gao en 2013, il faut cependant faire attention : « les filles qui y vont sont consentantes. Ce sont les dollars qui parlent ». Elle révèle par ailleurs le cas d’un casque bleu yéménite, basé dans la Cité des 333 saints en 2014, qui a voulu épouser une jeune fille âgée de 16 ans au moment des faits. Ce que confirme Mme Achouri, qui assure que « les services des Nations unies ont mené l’enquête, le casque bleu a été renvoyé et interdit de participer aux actuelles et futures missions de maintien de la paix ».

La MINUSMA a ainsi été amenée à prendre des mesures préventives dans les zones de déploiement, notamment, la non fraternisation, ce qui signifie l’interdiction stricte des relations étroites des forces de maintien de la paix avec la population locale, la mise en place de locaux hors limites d’accès pour le personnel de la MINUSMA, l’institution d’un couvre-feu entre 21h00 et 6h00 du matin dans les régions, et la sensibilisation de tout le personnel sur les normes de conduite de l’ONU, y compris la prévention de l’exploitation et des abus sexuels.

 

Deux poids, deux mesures?

Les derniers chiffres fournis par la MINUSMA sur son site font état d’un personnel civil de 1 180 personnes dont 542 nationaux et 648 internationaux (dont 125 volontaires des Nations unies). Dans les rangs du « national staff », on retrouve toutes les compétences, allant de la logistique à la communication, en passant par la gestion financière. Les critères de recrutement sont ceux appliqués à tous les fonctionnaires du système des Nations unies, avec des différences de traitement substantielles entre les agents recrutés sur place et les expatriés.

En effet, la grille salariale des employés internationaux commence, avec un salaire minimal de 2 000 000 francs CFA, là où s’arrête celle des agents locaux qui ont un salaire maximal de 2 500 000 francs CFA. Ce que déplore cependant l’Association nationale du staff de la MINUSMA, c’est l’inégalité dans les opportunités offertes au personnel. « Les étrangers, en plus de leurs meilleurs salaires, sont privilégiés pour les missions à l’extérieur, explique un ancien employé local. Nos durées de contrat ne sont pas les mêmes et sur le terrain nous ne sommes pas logés à la même enseigne ». Témoignage corroboré par l’un de ses collègues, qui assure que dans les zones dangereuses, « les Maliens sont hors du camp, tandis que les autres sont dans le bunker, à l’abri. On nous assure qu’en cas de pépin, on sera pris en charge, mais qui sait ? », s’interroge-t-il.

 

On se souvient qu’au début du mandat, des considérations similaires avaient secoué les rangs de l’effectif militaire. Les Tchadiens, las d’être envoyés avec les autres Africains dans les zones dangereuses et de payer un lourd tribu à chaque attaque des insurgés, avaient protesté contre cette situation.

 

De l’avis général, la présence de la mission onusienne et de ses milliers d’agents ont eu un impact sur l’économie malienne. Si dans l’immobilier on se frotte les mains et que des immeubles « standard international » sortent de terre chaque jour, tous les opérateurs économiques ne tirent pourtant pas leur épingle du jeu.

En effet, en ce qui concerne l’agro-alimentaire, en dehors de quelques produits dont l’eau, l’essentiel des besoins de la mission onusienne est assuré par des entreprises étrangères. « Il faut montrer patte blanche », affirme un opérateur pour qui les critères ne sont pas seulement liés à la qualité des produits proposés. « J’ai cessé de les contacter », explique Mamadou Traoré, directeur de Laham industrie, qui emploie une centaine de personnes et est spécialisée dans l’abattage pour la production et la commercialisation de viande.

« L’attitude de la MINUSMA est incompréhensible : malgré le fait que la viande produite dans nos installations respecte toutes les normes de bonnes pratiques alimentaires, elle importe de la viande à partir des pays voisins. Nous avons contacté le service en charge mais sa réponse a été que l’affaire est complexe sans d’autres explications ». « Le quartier ACI est inondé par les gens de la MINUSMA et nous, en tant qu’agence immobilière, on n’a aucun contrat avec eux. On ne sait pas par qui ils passent pour louer les maisons », regrette Sohoye Touré responsable commerciale chez l’agence immobilière Le Prestige. Si elles espèrent profiter de la « manne MINUSMA », les entreprises maliennes doivent se restructurer, estime un autre opérateur qui lui a des contrats avec la mission.

Le manque d’organisation, c’est également l’argument du directeur général de Z Travel, une agence de voyage et de location de véhicule. « Je suis à mon 3ème contrat avec la MINUSMA. C’est aux entreprises maliennes de s’organiser davantage pour pouvoir répondre aux critères et standards internationaux afin de bénéficier de ce business ». Avant d’ajouter avec résignation que « les autorités maliennes ne peuvent pas faire grand chose pour changer la donne en faveur des entreprises maliennes ». La mission avait pourtant, dans un passé récent, organisé des formations à l’intention des opérateurs économiques maliens pour les familiariser à ses exigences et procédures.

Source: Journaldumali

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