Les marcheurs refusent de se laisser prendre en otage dans une question qui interpelle d’abord le décanat de la FMOS
Des dizaines de médecins en spécialisation, c’est-à-dire en quête du Certificat d’études spécialisées (CES, sigle qui par extension désigne aussi ces médecins), ont battu le pavé vendredi dernier pour exprimer leur mécontentement face à une situation qu’ils jugent inacceptable et qui se présente comme proprement ubuesque pour un observateur neutre.
Les marcheurs, qui avaient préalablement tenu une assemblée générale dans l’enceinte de la Faculté de médecine et d’odontostomatologie (FMOS), dénonçaient le fait que certains encadreurs menacent de boycotter leurs examens de fin d’année au motif que les frais d’inscription et les frais pédagogiques des CES au titre des années universitaires 2010, 2011, 2012 et 2013 n’ont pas été payés par l’Etat. Les CES protestaient également contre « l’incapacité du décanat de la Faculté » à justifier l’utilisation des fonds alloués par l’Etat, à travers le ministère de la Santé, pour couvrir ces frais scolaires indiqués plus haut. Il est en effet utile de préciser que jusqu’en 2009, l’Etat versait annuellement 300 000 francs par CES pour couvrir les frais d’inscription (150 000 Fcfa) et les frais pédagogiques (150 000 Fcfa). Il y a quatre ans, les paiements ont été interrompus en attendant que les autorités de la FMPOS produisent les justificatifs des subventions perçues jusque là.
Cette requête qui est on ne peut plus normale et légitime a provoqué une réaction inattendue de certains professeurs de la Faculté, encadreurs des CES et qui ont décidé de boycotter les examens que doivent passer les médecins en spécialisation. Ces derniers se sont révoltés à leur tour et dénoncent avec virulence l’attitude du décanat de la Faculté de médecine qui se montre incapable de justifier l’utilisation des fonds reçus. Dr Drissa Sangaré, secrétaire général de l’AMESMA, association qui regroupe les médecins en spécialisation, a déploré la situation qui prévaut et se demande si les fonds destinés aux frais d’inscription et aux frais pédagogiques n’ont pas pris un chemin indu.
Les médecins en spécialisation se sont dit décidés à se battre jusqu’au bout pour ne pas être pris en otage. Le secrétaire à l’information de l’AMESMA, Florent Dakouo, a fustigé le comportement des responsables de la Faculté de médecine et d’odontostomatologie qui, à son avis, ne se montrent pas à la hauteur des responsabilités qui leur sont conférées. Pour lui, le bricolage ne paie plus dans ce pays et le décanat a le devoir de répondre aux demandes de l’Etat. Par ailleurs, il a tenu à lever toute équivoque. « Nous ne sommes pas contre nos encadreurs. Cependant que tout le monde sache que nous sommes prêts à apprendre dans la soumission, mais pas dans l’esclavage », a-t-il tenu à faire savoir. Un autre médecin a expliqué son amertume de voir un tel problème se poser. « La réalité est qu’on nous a toujours menti dans la gestion de ce problème. Nous, nous sentons trahis et volés », a déclaré ce CES de pédiatrie.
Notre équipe de reportage a tenté de rencontrer le vice-doyen de la Faculté de médecine et d’odontostomatologie. Mais celui qui assure l’intérim depuis le décès du doyen de la Faculté, le Pr Anatole Tounkara, n’était plus sur place après avoir eu un entretien matinal avec une délégation des médecins en spécialisation.
Les CES étaient donc très remontés vendredi et bien décidés à se faire entendre. Leur marche partie de la Faculté de médecine et d’odontostomatologie devait rallier le centre hospitalo-universitaire (CHU) Gabriel Touré. Mais elle a été arrêtée à environ 500 mètres de l’établissement hospitalier par le commissaire El Hadj Baba Wangara du 8è Arrondissement à Koulouba. L’officier de police a expliqué aux CES qu’ils étaient dans l’illégalité en occupant la voie publique sans autorisation préalable. « C’est un encombrement de la voie publique, or vous êtes des cadres et devez par conséquent poser des actes responsables. Je vous invite à désigner une délégation pour échanger avec moi et les autres regagnent la base », a proposé l’officier de police. Cet appel a été finalement attendu et les marcheurs ont regagné la Faculté pour rallier sur des engins à deux roues la bourse du travail.
Rappelons que tous les encadreurs ne sont pas dans la disposition de boycotter les examens. Pour preuve, les CES de la cardiologie, de la néphrologie, de l’endocrinologie et de la radiologie ont déjà composé.
B. DOUMBIA