L’avis de la Cour Constitutionnelle favorable à la prorogation du mandat des députés à l’Assemblée Nationale pour une période de six mois, passe difficilement au sein de la classe politique, y compris la Plateforme Ensemble pour le Mali. Des ténors de ce regroupement ont fait part de leurs inquiétudes, le mercredi 17 octobre dernier, au cours d’un « déjeuner politique ». Il a été même question au cours de cette rencontre informelle de tenter de voir le Président de la République afin de partager avec lui les inquiétudes.
La réaction la plus virulente à cette décision controversée des sages de la Cour Constitutionnelle, une institution devenue une girouette aux mains de l’exécutif et du législatif, est venue des Partis Unis pour la République (PUR). La conférence des présidents des PUR désapprouve l’avis de la Cour Constitutionnelle et invite l’ensemble de la classe politique ainsi que les associations de la société civile soucieuses de préserver notre Constitution acquise au prix d’énormes sacrifices de notre peuple, de s’opposer fermement à l’exécution de cet avis.
Le parti Alliance pour le Mali – MALIKO (APM – MALIKO) de l’ancien ministre et ex-candidat à la présidentielle, Modibo Kadjoké, formule de nombreuses inquiétudes et estime que la solution à la situation actuelle se trouve dans un accord politique inclusif permettant d’engager un dialogue de refondation nationale.
Pour les FARE de Modibo Sidibé, « le gouvernement et les forces politiques et sociales doivent avoir la lucidité de poser les jalons d’une véritable sortie de crise structurelle de notre pays. Ils doivent convenir de la tenue d’un dialogue national refondateur, devant arrêter les orientations majeures dont les Maliens conviendront quant à l’avenir du pays, l’infrastructure institutionnelle de notre Etat, nos réponses aux exigences de l’intérêt général et aux frustrations dont souffrent les populations au quotidien ; décider du report des élections législatives pour une durée en cohérence avec la conduite des réformes institutionnelles et structurelles dont le pays a besoin ».
Jusque-là, le collectif des neuf candidats qui avait demandé dans une déclaration le report des élections législatives, opte pour un silence stratégique. Le temps certainement d’observer avant de se positionner à nouveau sur une question qui continue de susciter de vives réactions.
Le dialogue de sourds entre le gouvernement et la classe politique pourrait laisser la place à une véritable tempête. Il pourrait y avoir une jonction entre ces forces politiques opposées à la prorogation du mandat des députés et celles réclamant les améliorations des conditions de vie de leurs membres. Le nouveau projet de découpage territorial du pays ayant fuité, pourrait servir d’élément fédérateur en attendant la révision de la constitution du 25 février 1992. Une réforme que le gouvernement doit mener conformément à ses engagements inscrits dans l’accord pour la paix et la réconciliation. La situation actuelle du pays ne peut pas être gérée par la fuite en avant, encore moins par des petits arrangements.
Le Président de la République et le Premier ministre semblent afficher un certain mépris, voire une sorte d’indifférence vis-à-vis de cette fronde en gestation. Si le pouvoir réel serait entre ses mains, comme l’a souligné Béchir Ben Yahmed de « Jeune Afrique » dans son éditorial du samedi 6 octobre intitulé « L’avenir du Mali », le chef du gouvernement ne doit pas oublier qu’un Premier ministre reste et restera toujours un fusible. Les manœuvres politiques risquent de se refermer sur le locataire de la Primature à moins qu’il ne change d’approches et de stratégies.
Chaka Doumbia
Le Challenger