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Mali – Transition politique : Les regroupements au devant de la scène

Crise de confiance ou union dans la diversité ? C’est ce qui émerge des différents mouvements de revendication qui ont vu le jour ces derniers mois au Mali. Des mouvements nés des insatisfactions. L’un des géants, le M5- RFP, réclamait depuis le 5 juin le départ du l’ancien Président Ibrahim Boubacar Keita. L’autre est le Comité national pour le salut du peuple (CNSP), formé essentiellement de militaires et auteur du coup d’État du 18 août qui a conduit à la démission de l’ancien Président. À ces mouvements se greffent le MP4 (Mouvement du 4 septembre) ou le CRD (Cadre de réflexion et d’actions), qui ont vu le jour après le coup d’État. Que peut-on attendre de ces différentes tendances, au moment où le Mali cherche le chemin de l’équilibre sociopolitique, économique et géopolitique ?

 

 Après plusieurs manifestations en rangs dispersés de médecins, enseignants, juristes et bien d’autres couches sociales, le Mouvement du 5 juin a vu le jour, avant d’accueillir plus tard des hommes politiques et cadres de différents ordres. À défaut de la transparence dans les élections législatives d’avril, largement contestées, le départ de l’ancien Président Ibrahim Boubacar Keita et de son gouvernement était sa principale revendication. Le coup de grâce sera donné par le Comité national pour le salut du peuple, à travers un coup d’état militaire qui a précipité la démission du Président et la dissolution de l’Assemblée nationale et du gouvernement.

Cet acte des militaires, qui a conduit au renversement de l’ancien régime, a déjoué tous les pronostics. Salué et soutenu par le M5-RFP, il s’est imposé comme une première victoire pour tous ceux qui réclamaient le départ d’IBK. Le M5et ses alliés ont marqué de leur sceau ce moment en célébrant en pompe le 21 août à Bamako la démission d’Ibrahim Boubacar Keita. Ces réjouissances ont sonné chez certains observateurs de la scène politique comme une « récupération » des actions du M5-RFP. 

Depuis le renversement politique, de nombreux mouvements sont nés. Sur la toile, la jeunesse bouscule les rangs, avec des hashtags devenus viraux. #MaTransition ou #MonMalinouveau paradent sur le net, avec des propositions pour une vision nouvelle du pays et la participation de toutes les couches sociales.


Affirmation ou union?

La configuration actuelle de la scène politique ou sociale à laquelle le Mali fait face, avec différentes tendances, devient une habitude, selon certaines analyses. Lors du coup d’État de mars 2012, l’on a assisté à un « phénomène » semblable. Après les évènements qui ont conduit au départ de l’ancien Président Ahmadou Toumani Touré, il y a eu « une certaine forme de reconfiguration de la scène politique, avec la création de regroupements politiques à l’instar du FDR et de la COPAM », rappelle Baba Dakono chercheur dans le secteur de la bonne gouvernance, qui précise que certains défendaient à cette époque le  retour à l’ordre constitutionnel et à la démocratie pendant que d’autres manifestaient leur soutien à la junte.

Le M5-RFP, qui est pour le retour à l’ordre constitutionnel, ou le Mouvement du 4 septembre (MP4), qui soutient la junte actuelle, se présentent comme des clones des mouvements de 2012, au regard des revendications, qui n’ont pas beaucoup évolué et qui tournent toutes autour du changement, de la bonne gouvernance ou de la gestion efficiente des ressources de l’État.

A côté des mouvements citoyens visibles, il ya aussi la création d’entités comme le Cercle de Réflexion et d’Actions-Initiative pour le Mali (CRAIM), qui, au départ, regroupait des cadres qui étaient essentiellement dans la fonction publique, mais qui a ensuite ouvert sa porte à d’autres profils. Il « encourage tous les acteurs maliens à travailler de manière inclusive et constructive pour préserver l’état de droit et respecter les droits humains fondamentaux ».

« Ce n’est pas un phénomène nouveau que de voir que chaque fois qu’il ya un coup d’État, il ya une reconfiguration de l’environnement politico-social au Mali. La petite différence en 2020 est qu’on a beaucoup plus d’acteurs qui saisissent ce moment comme une étape dans la refondation », dit  Baba Dakono

La naissance de ces mouvements traduit un engouement des différents acteurs civils et politiques maliens à se « retrouver dans des groupes en fonction des opportunités du moment », en se positionnant soit pour les pouvoirs publics actuels soit contre. Parallèlement, il ya des tendances qui naissent dans la perspective « de porter leur voix dans le processus des réformes et de la refondation ».

Selon le chercheur Baba Dakono, au-delà de la vivacité de la démocratie, la pluralité des mouvements politiques et civils peut « traduire une fracture sociale et la difficulté des Maliens, regroupés sous différentes catégories, à se retrouver pour porter un message commun ».

Cela traduit un malaise profond qui pourrait s’expliquer à travers une crise de confiance. « Ce discours, le nouveau Mali, n’est pas nouveau. En 1991, après la chute du Président Moussa Traoré, c’était le nouveau Mali. Plus tard, en 2012, on s’est rendu compte que les dirigeants avaient changé, mais pas les maux. En 2020, rebelote. Cette perspective pousse les acteurs à se positionner dans la perspective de la réforme et de la refondation », analyse Baba Dakono.

Le CRA, qui fait partie des plus récents mouvements, oriente le débat sur les « causes profondes » de la crise politique au Mali, qui ont conduit sept ans après à un nouveau coup d’État. Il s’agit pour le Cadre de réflexion et d’actions de mettre l’accent sur « les conditions d’organisation et de participation électorales », à l’origine de la crispation politique actuelle à travers la « fraude » observée au niveau des élections législatives de mars 2020, explique Moussa Kondo, porte-parole du CRA, qui envisage à travers des propositions inclusives de contribuer à l’édification du Mali pendant les 30 prochaines années.

Idelette Bissuu

Journal du Mali

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