Il est de tradition, au Mali, d’organiser les élections législatives après les présidentielles. Cette pratique cache plus une malice de mainmise politique sur l’organe législatif.
Conforter son assise politique au sein de l’Assemblée nationale, c’est l’objectif de tout parti au pouvoir qui vient de remporter les élections présidentielles. L’autorité politique en place, au niveau de l’exécutif, cherche toujours à s’assurer un soutien politique de taille au sein du parlement.
Avec un quota majoritaire de députés au sein de l’hémicycle, dans notre pays, les partis au pouvoir parviennent aisément à faire passer leurs projets politiques sans véritable résistance. Du régime du président Alpha Oumar Konaré à celui d’Ibrahim Boubacar Kéita, la réalité n’a point changé.
Caisse de résonnance
Généralement, le pire des scénarios procède de la volonté du régime en place de détourner le choix des urnes en sa faveur. Avec une mainmise sur l’administration électorale, le parti au pouvoir s’accorde la latitude de modifier les choix issus des urnes en sa faveur. Cela passe par des méthodes de bourrage d’urnes à la falsification des résultats.
Les voix issues des urnes ne comptent plus alors. Ce qui fait que des représentants du peuple souffriront d’illégitimité pour valablement agir au nom des Maliens. Pis, ils se sentiront moins redevables envers les citoyens qu’envers leurs partis politiques, qui ont assuré leur accession au pouvoir.
Fixer les élections législatives après les présidentielles, c’est faire en sorte que des candidats moins inspirés par la défense des intérêts de leurs concitoyens accèdent au pouvoir. Leur seul objectif est de se créer une appartenance politique d’avec le parti au pouvoir, d’autant plus recherchée par ce dernier.
Nul ne devrait alors s’étonner que notre Assemblée nationale ressemble à une caisse de résonnance du pouvoir en place, incapable de s’opposer quand les intérêts du pays sont en jeu. Parce que l’on s’attache plus à un régime qu’à son peuple.
« Vote de confirmation »
Il serait alors tout aussi utile d’explorer une nouvelle méthode. Celle qui procède du couplage des élections présidentielles avec les législatives. La marge de manœuvre politique s’en retrouvera ainsi réduite. L’opportunisme politique perdra un élan considérable. Il sera difficile pour les politiques d’influencer les tendances. Un débat avait été soulevé en France, à l’époque, par le sénateur Jean-Louis Masson, qui a eu à déposer une proposition de loi organique tendant à organiser simultanément les élections présidentielle et législatives afin de rétablir l’équilibre institutionnel entre pouvoir exécutif et pouvoir législatif. Pour défendre sa proposition, le sénateur laissait entendre que l’organisation des élections législatives après les présidentielles fait ramener les premières à une « sorte de vote de confirmation » des secondes. Les législatives sont ainsi rabaissées au « rang de monnaie d’échange pour une alliance centrée sur les présidentielles ».
Et même en renversant l’ordre, c’est-à-dire procéder aux élections législatives avant les présidentielles, Jean-Louis Masson estime que cela ne « règlerait rien, car on tomberait dans un excès inverse ». Pour lui, il est important de préserver l’équilibre et surtout l’indépendance entre pouvoir exécutif et pouvoir législatif.
Il est temps d’opérer des changements utiles pour améliorer la qualité de notre démocratie. Faire ressortir les failles constatées dans notre parcours démocratique et proposer des solutions afin d’y remédier s’impose comme un exercice nécessaire à tous les Maliens aspirant à un changement de la situation politique dans le pays.
Source : Benbere