Préambule : Il s’agit d’une réponse à une lettre qui remonte à 2014 ou 2016, mais qui a ressurgi sur le net suite au meurtre du président de l’Association des Ivoiriens en Tunisie, Falikou Coulibaly, à Tunis le weekend du 22 – 23 Décembre 2018.
Chère Sœur Mariam Touré,
C’est avec beaucoup d’attention et de soin que j’ai lu votre lettre intitulée « Lettre “poignante” d’une étudiante “africaine” aux Tunisiens ! », suite au meurtre atroce du président de l’Association des Ivoiriens en Tunisie, Falikou Coulibaly.
Votre lettre reflète, à mon humble avis, un cri du cœur que vous vocalisez en vous adressant aux Tunisiens, comme vous le précisez si bien dans le titre de cette lettre.
Tout d’abord, permettez-moi de présenter mes sincères condoléances et toute ma compassion à la famille et aux proches du défunt Falikou Coulibaly, lâchement poignardé à mort dans des circonstances ambiguës.
Bien que je ne veuille en aucun cas déduire le motif de ce meurtre, je laisse les autorités compétentes en tirer le verdict, le résultat est là ; le mal est fait, Falikou est injustement parti.
Dans votre lettre, vous avez déclaré que la Tunisie est “une société infectée par le racisme”. Permettez-moi de vous dire que c’est injuste de déclarer une telle généralité. Le racisme existe bel et bien partout, car la bêtise humaine n’a pas de frontières, ni de pèlerinage.
Si j’ai décidé de vous écrire, c’est aussi pour exprimer mon regret et mes remords face aux perceptions dogmatiques de certaines personnes, face aux préjugés et à cette peur de l’autre, que nous pouvons peut-être expliquer par un système éducatif défaillant, à travers lequel des générations passent. Il y a ceux qui ont eu l’intelligence de s’en libérer, mais d’autres sont tombés dans le piège.
Permettez-moi aussi de vous exprimer mon amour pour le “Chez Vous”, pour le Mali et son peuple si accueillant, hospitalier et authentique. Depuis plus d’un an, je jouis du “Diatiguiya”, ce terme mythique en Bambara qui signifie l’hospitalité. Je me suis dirigé au Mali en tant que volontaire pour y assister les réfugiés, les demandeurs d’asile et les populations déracinées par les guerres et la persécution. C’est une expérience surréelle qui me permet de voir, d’apprendre et d’évoluer sur le plan personnel avant tout. Ces quatorze mois n’ont forcément pas été une utopie quotidienne, mais, je n’en tire que le positif et les expériences enrichissantes.
Je me vêts en Bogolan, Bazin, Wax et Pagne Maliens, je parle Malien (Bambara), je bois le thé Malien, j’ai un permis de conduire Malien, et j’ai même un nom et prénom Maliens. Je suis le “Toubabou” ou bien le “Touloublén” (huile de palme) pour ceux qui ne me connaissent pas, sinon tantôt un “Coulibaly” et tantôt un “Djiguiba”, selon mes consœurs et confrères Malien(ne)s qui m’attribuent ces noms de famille Maliens par affection réciproque.
Vous êtes Touré. Cette famille qui a fondé Bamako, et qui, selon quelques mythes, provient du Maghreb et s’est métissée par la suite avec les populations locales. Et selon d’autres, c’est la famille qui a unifié des peuples, “avec à sa tête Vakaba Touré, qui dirigeait un royaume qui s’étendait du Nord actuel de la Côte d’Ivoire jusqu’en Haute-Guinée”.
Ma Chère Sœur, la Tunisie, c’est aussi votre terre, d’une terre qui est également à nous tous. Tout comme nous devons continuer de rêver du Mali, de la Côte d’Ivoire, de Panafricanisme et d’humanité!
Que notre frère à Tous, Falikou Coulibaly, repose en paix.
“On est ensemble!
Source: huffpostmaghreb