Le 6 octobre 2022, la grande salle du musée national de Bamako a abrité la cérémonie de lancement du livre ‘’Les blessures de l’Art’’, un récit écrit par Mme Cissé Oumou Ahmar Traoré. Dans cet ouvrage de plus de 600 pages, l’auteur dénonce les violences faites aux femmes et aux filles. Cette cérémonie de lancement a été co-présidée par la ministre de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille, Mme Wadidié Founè Coulibaly, et son homologue de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie hôtelière et du Tourisme, Andogoly Guindo.
Témoin des événements tragiques subis par la gente féminine qui l’ont percée dans la chair et dans l’esprit, Oumou Ahmar Traoré décide d’écrire ; écrire surtout pour dénoncer une pratique qu’elle considère inacceptable et intolérable. C’est donc le récit d’une dame de lettres indignée et qui se voit dans l’obligation d’agir avec ses moyens. Ainsi, le moyen le plus adapté ou approprié, pour elle, est la plume, d’où la publication du Tome 1 du livre intitulé ‘’Les blessures de l’Art’’, édité par les éditions Asselar. Cet ouvrage est inspiré des faits qui se sont produits au Mali de 2015 à nos jours ou même au-delà et dont l’écrivaine a, le plus souvent, été témoin oculaire.
Des violences conjugales subies par des femmes occasionnant même leurs morts ; des tortures ; des blessures graves ; des viols collectifs ou même ‘’correctifs’’ subis par des jeunes filles ; des chansons qui attaquent la pudeur et la dignité de la femme, etc. Ce sont autant d’éléments macabres qui ont interpellé Oumou Ahmar Traoré à prendre sa plume pour s’inviter dans le combat qu’elle appelle désormais la sien.
« J’ai constaté qu’au Mali on a tendance à légitimer les violences faites aux femmes. Les injures, les battements sont devenus des choses normales », s’indigne-t-elle lors de la présentation de son livre. Puis, elle évoque, les raisons qui ont motivé la production de cet ouvrage en ces termes : « Ce qui m’a motivé à écrire, c’est le fait de cas extrêmement graves que je vais partager avec vous. En 2015, une femme a été poignardée à quarante-cinq coups de couteau ici à Bamako. C’est un fait odieux qui est resté en moi. C’est un fait qui m’a marqué à jamais. Il y a d’autres cas extrêmement graves dans des violences conjugales et ce sont des faits qui m’ont marqué. »
Aussi, l’auteur estime qu’entre 2015 et 2020, il y a eu au moins cinq à six cas d’assassinats et plusieurs autres cas de tortures ou de viols collectifs dont elle fut témoin, ainsi que certaines chansons qui stigmatisent les femmes. « Le plus grand mal est la banalisation de la situation. J’ai eu connaissance des cas où des jeunes garçons violent des filles en collectif. Le pire est que nous avons répertorié des chansons des artistes légendaires, qui, quand vous écoutez et analysez bien, sont des chansons qui stigmatisent la femme et banalisent les faits de violences et condamnant même les femmes victimes des faits », a-t-elle ajouté.
Il s’agit, selon l’écrivaine, des chansons qui font soit de la comparaison de valeur entre femme, qui se moquent de l’apparence de certaines, qui condamnent les filles-mères, ou qui font passer la femme pour un objet sexuel de l’homme. « Nous avons vu des chansons à travers lesquelles les artistes réclament l’extrême tolérance de la femme, leur soumission sur des cas de violence sous condition de donner naissance à des enfants bénis ou qui stigmatisent les femmes qui ont choisi de vivre seule (sans mari). Ce sont des chansons qui percent la chair humaine surtout quand on est femme », a-t-elle déploré.
Ainsi, l’auteur, dans son livre, interpelle-elle les autorités politiques et judiciaires sur la protection des femmes tout en demandant la rigueur dans l’application des instruments juridiques visant à protéger la femme. « Par la même occasion, j’ai introduit par voie de circulaire aux unités de police, aux brigades de gendarmerie et aux parquets d’instance et parquets généraux plus de réactivité quant à l’application sans faille des lois et règlements face aux violences basées sur le genre », a-t-elle plaidé
Amadou Kodio
Source : Ziré