La grève des magistrats, depuis son déclenchement, ne cesse de faire polémique. Cela est d’autant une réalité que certaines bouches les plus audibles mettent en cause sa légalité. Pour elles, cette grève des magistrats est tout simplement illégale. Est-elle réellement illégale la grève des magistrats ? Comment apprécier la légalité d’une grève ?
Pour apprécier la légalité d’une grève, il y a lieu de prendre en compte deux paramètres. D’une part, le droit reconnait-il à la corporation un droit de grève ? D’autre part, la corporation a-t-elle respecté la procédure de déclenchement de cette grève ? Si la réponse à ces deux questions est affirmative la grève est légale. Cependant, il y a lieu de constater un hors sujet généralisé au sujet de l’appréciation de la légalité de la grève des magistrats. Outre l’existence même du droit de grève, la légalité s’apprécie à travers ses conditions de déclenchement et non selon ses modalités d’exercice. En effet, la grève est légale si elle est initiée par le ou les syndicat (s) ayant qualité à engager la corporation, si le préavis est respecté et si la conciliation a échoué pendant le délai de préavis. Une fois ces conditions cumulatives sont respectées la grève est légale. En ce qui concerne le non respect du service minimum exigé est une illégalité dans la grève et non l’illégalité de la grève. Il y a lieu de faire la différence entre l’illégalité de la grève et l’illégalité dans la grève. Cette confusion est à éviter.
L’exécution du service minimum relève des modalités d’exercice de la grève qui ne peut en aucun cas rendre la grève illégale. C’est le cas par exemple, lorsque les grévistes décidaient de casser les édifices publics lors de leurs marches, ils commettent une illégalité dans la grève, une faute qui leur est imputable. Cette illégalité commise dans l’exercice de leur grève ne transforme pas la grève légale en une grève illégale. De toute évidence, les magistrats demeurent responsables de l’absence du service minimum. Un citoyen qui aurait besoin d’un casier judiciaire ou d’un certificat de nationalité pour faire un concours par exemple qui ne parvient à l’obtenir peut engager la responsabilité de l’Etat, l’Etat qui répare peut intenter l’action récursoire contre les magistrats fautifs. Nous sommes dans une situation de responsabilité partagée. L’Etat est responsable de la séquestration des citoyens, tandis que les magistrats sont responsables de l’absence de service minimum. Que chacun s’assume !
Dr Mamadou Bakaye DEMBELE Enseignant chercheur- spécialiste du droit processuel USJB