Le Burundi va tout particulièrement suivre l’épreuve du 800 m féminin aux Jeux de Rio. Qualifiée pour les demi-finales et championne du monde en salle, Francine Niyonsaba pourrait ramener une deuxième médaille olympique historique pour le pays.
Il y a exactement 20 ans, le 3 août 1996, dans le stade d’Atlanta, Vénuste Niyongabo offrait au Burundi sa toute première médaille olympique. L’athlète, originaire de Vugizo, dans le sud du pays, était sacré sur le 5 000 m. Deux décennies plus tard, le coureur de fond n’a malheureusement jamais eu de successeur.
Mais à Rio, une jeune Burundaise de 23 ans pourrait bien suivre ses traces et entrer elle aussi dans la légende. Sur l’épreuve du 800 m, Francine Niyonsaba, qui s’est qualifiée facilement mercredi pour les demi-finales, fait jeu égal avec les favorites, comme la Sud-Africaine Caster Semenya, ou la Kényane Margaret Wambui. En mars 2016, la sportive a frappé un grand coup en devenant championne du monde en salle lors des Mondiaux de Portland en 2’00’’01.
Francine Niyonsaba revient pourtant de très loin. La jeune femme n’est pas totalement une inconnue dans le monde de l’athlétisme. En 2012 déjà, elle s’était fait connaître sur la scène internationale lors des championnats d’Afrique en remportant à la surprise générale le titre continentale. « Je n’ai jamais vu une telle révélation ! s’était à l’époque enthousiasmé au micro de RFI, le journaliste français Yves Pinaud qui a couvert tous les Championnats d’Afrique depuis 1979. « Que quelqu’un qui n’était pas répertorié dans l’élite africaine se permette de dominer outrageusement des filles qui avaient déjà couru le 800 m en moins de deux minutes… »
Devenue célèbre en seulement quelques semaines dans son pays, elle avait ensuite participé aux Jeux de Londres où elle avait terminé septième de la finale (reclassée ultérieurement sixième après la suspension de la Russe Mariya Savinova pour dopage), puis avait remporté trois courses du prestigieux circuit de la Diamond League en 2013.
Mais sa progression fulgurante avait été stoppée par une blessure. La Burundaise avait aussi dû faire face à un manque de moyens de la part de son pays pour l’aider dans sa préparation. En quelques mois, elle a ainsi disparu totalement des radars. Mais, après un premier séjour infructueux aux Etats-Unis en 2014, Francine Niyonsaba a retrouvé un nouveau souffle. Et ce, depuis le début de l’année, dans l’Oregon, aux côtés de l’entraîneur américain Mark Rowland à Portland, grâce à une bourse de Nike.
« Un instrument pour unifier le peuple burundais qui est si divisé »
Même si elle bénéficie aujourd’hui de conditions plus avantageuses, la championne n’a pas manqué avant les Jeux de Rio de dénoncer le manque de considération des sportifs africains. Le site de la radio publique africaine (RPA) rapporte qu’elle a attaqué ouvertement le comité national olympique du Burundi : « C’est une honte de voir que ces athlètes vont représenter le pays, alors qu’ils n’ont bénéficié d’aucun soutien pendant leurs préparatifs », a-t-elle écrit sur le réseau social. « Où vont ces fonds que le comité international olympique accorde au comité national olympique du Burundi pour cette fin ? », ajoutait-elle.
En réponse à ces critiques, Salvator Bigirimana, le vice-président du comité national olympique a assuré dans une interview à la télé burundaise Renaissance que « le pays fait des efforts à la hauteur de ces moyens ». Depuis plus d’un an, le Burundi est en effet plongé dans une profonde crise à la suite de la décision du président, Pierre Nkurunziza, de briguer un troisième mandat. Celle-ci a déjà fait plus de 500 morts et poussé plus de 270 000 Burundais à l’exil.
Même si elle vit aujourd’hui à des milliers de kilomètres de là, Francine Niyonsaba ne cache pas son inquiétude pour ses compatriotes. Dans un message sur Twitter juste avant les JO, elle a ainsi écrit que « la paix vient de nous-mêmes et non des autres ». Comme l’a ainsi souligné le champion Vénuste Niyongabo, sur le site d’athlétisme SPE15, une victoire de son héritière au Brésil « pourrait être un instrument pour unifier le peuple burundais qui est si divisé ».
Source: France24