En visite à Bamako, la nouvelle Directrice générale de l’UNICEF a accordé un entretien à Journal du Mali. Henrietta Fore y parle notamment de la mortalité néo-natale et de la santé des jeunes mères.
Dans le dernier rapport de l’UNICEF, le Mali figure parmi les dix pays avec les taux de mortalité néonatale les plus élevés au monde. Comment comptez-vous inverser cette sinistre tendance ?
Hier (lundi), nous avons visité un centre de santé communautaire qui s’occupe de patients qui parcourent jusqu’à 5km pour venir s’y soigner. Il est plus difficile d’atteindre les populations qui vivent au-delà. Une première solution pour y arriver est de passer le message dans les communautés, par bouche à oreille ou en faisant du porte à porte, pour que les gens sachent que le centre de santé existe. Il faut aussi mettre à la disposition des patients des moyens de transport vers le centre. Une deuxième solution est de fournir de l’eau potable à ces centres de santé pour éviter la propagation des infections. Cela est très important pour la santé de la mère et du nouveau-né. Le Mali est parmi les 10 pays avec les taux de mortalité néonatale les plus élevés parce qu’il ya une mortalité maternelle très élevée. De jeunes mères décèdent en donnant naissance alors que la mère et l’enfant peuvent être sauvés ensemble grâce à l’eau potable. Troisièmement, nous avons besoin de techniciens et d’un personnel de santé formés à suivre les jeunes mères pendant la grossesse et après l’accouchement, par des consultations pré et post- natales. Il faut aussi une bonne nutrition et une interaction avec le nouveau-né dès les premiers jours. Tout cela aide l’enfant. S’il peut naitre dans un centre de santé propre et hygiénique, il aura une chance de vivre.
Parmi les autres pistes, celle de la planification familiale revient souvent. Au Mali, la tradition et la religion ont un certain poids, comment faire changer les mentalités ?
Je voudrais me concentrer sur la santé des jeunes filles. Beaucoup meurent en donnant la vie et cela est une perte qui ne se justifie pas. Quand une jeune fille porte un enfant, le risque de mort de ce dernier monte en flèche. Donc, encourager les jeunes filles à ne pas se marier avant 18 ans et à ne pas porter des enfants avant cet âge serait vraiment bénéfique pour nous tous. Un certain nombre de pays sont parvenus à dépasser ces considérations traditionnelles, coutumières et religieuses. Perdre autant de jeunes filles et de bébés est un gâchis considérable pour une société. Il y a un autre changement qui s’opère dans les pays actuellement, les jeunes filles voient leur rôle de manière différente. Quand elles ont 12, 13 ou 14 ans, elles peuvent rêver de devenir médecins ou enseignantes. Nous, en tant que société, nous pouvons les aider à se réaliser. Nous savons que nous avons besoin de plus de docteurs et de plus d’enseignants et si nous les laissons continuer leur cursus au second cycle, ce sera un cadeau exceptionnel pour la Nation. Autant de faits qui plaident pour convaincre les communautés de la nécessité d’un changement d’approche.
Le phénomène des enfants de la rue prend de l’ampleur, dans une certaine indifférence. Avez-vous des pistes de solutions sur cette problématique ?
C’est un problème important. Si nous pouvons passer le mot aux jeunes enfants et au gouvernement, nous ferons une différence. L’Unicef sera prêt à aider, de quelque façon que ce soit, et nous travaillons sur ces questions à Bamako et en dehors de la capitale, à Mopti. Notre Représentante résidente pourra certainement vous donner beaucoup plus de détails.
Plusieurs écoles sont fermées au Centre et au Nord du Mali, déscolarisant les enfants et amenuisant leurs perspectives…
Un certain nombre d’écoles devraient ouvrir à nouveau et nous aurons besoin de plus d’enseignants dans ces parties du Mali. Il faut continuer à former, à recruter et à préparer les enseignants à de bonnes compétences pédagogiques dans les années à venir. Nous espérons que le nombre de classes augmentera lui aussi. Déjà, en ce moment, des enseignants sont en train d’être recrutés par les communautés de base. Cela pourra aider le Centre et le Nord du pays.
Journal du mali