La Confédération africaine de football (CAF) a tenu une Assemblée générale (AG) ce 11 décembre 2020 marquée par l’absence de son président Ahmad, suspendu 5 ans par la FIFA, et la nomination de son ex-patron, Issa Hayatou, au poste honorifique de « président d’honneur » de l’institution. Une AG où il a également été question de la santé financière de la CAF.
La Confédération africaine de football (CAF) a clos une année 2020 exceptionnellement difficile, ce 11 décembre, à l’occasion de son Assemblée générale (AG) ordinaire. Une AG forcément marquée par l’absence du patron du foot africain, Ahmad, récemment suspendu pour cinq ans par le Comité d’éthique de la Fédération internationale de football (FIFA).
Une FIFA dont le président Gianni Infantino – lui-même en proie à la justice en Suisse – a prononcé le discours inaugural en anglais. « Je ne peux évidemment pas ne pas mentionner le président Ahmad, a-t-il débuté. Il est clair que d’un point de vu personnel, ce qu’il s’est passé, comme pour beaucoup d’entre vous, m’a rendu très triste. Nous devons respecter les décisions des organes indépendants ».
Des propos liminaires consensuels, suivis par ceux de Constant Omari. Le premier vice-président de la CAF, désigné patron par intérim durant cette crise, a également évoqué le Malgache, en préambule de l’AG. « Il y a l’empêchement de notre frère et ami, le Président Ahmad élu et qui désormais a engagé une lutte pour sa dignité et pour faire valoir ses droits », a souligné le Congolais, qui fait référence à un appel déposé auprès du Tribunal arbitral du sport contre la sanction prononcée par la FIFA.
L’étonnant « discours » d’Ahmad
Situation surprenante, au moment même où la famille du foot africain est réunie « virtuellement » (à cause du Covid-19), le discours qu’Ahmad souhaitait prononcer devant cette même AG circule entre journalistes. Ahmad y critique de manière à peine voilée l’attitude de la FIFA. Celle-ci n’aurait pas accepté qu’un audit mené par la Sénégalaise Fatma Samoura au Caire ait pris fin en février sur décision du Comité exécutif de la CAF. « Certains préfèrent garder l’Afrique petite et craintive, est-il écrit dans ce projet de discours. Face à notre choix souverain, nos opposants ont pris parti de plonger la Confédération dans un tumulte politique inimaginable ».
Au sujet de sa candidature à un deuxième mandat, Ahmad y conclut : « Lorsque 46 présidents de fédérations […] m’ont appelé à me présenter pour un second mandat, nous avons donné l’image d’une Afrique unie. […] Pourtant, vos voix, vos expertises, celles de ceux qui m’ont soutenu comme des autres, ont été bafouées. Que vous soyez pour ou contre ma candidature, au travers de cette ingérence dont nous sommes victimes, c’est notre principe démocratique qui a été nié. »
La symbolique et honorifique distinction d’Issa Hayatou
Deuxième ironie du jour, l’AG a avalisé peu après la désignation de l’ancien rival d’Ahmad, Issa Hayatou, patron de la CAF de 1988 à 2017, à un poste de président d’honneur. Un projet qui date certes de plusieurs mois, mais dont la validation intervient à un moment étrange.
Cette distinction honorifique fera l’objet d’une cérémonie le 15 janvier 2021, avant le coup d’envoi du Championnat d’Afrique des nations (CHAN 2020) au Cameroun. « Il est tout à fait normal que la CAF lui soit reconnaissante pour toute son œuvre », a justifié Constant Omari, au sujet de son ancien mentor.
Le Congolais s’est voulu humble alors que son bateau tangue : « La CAF a été soumise bien des fois à des reproches et des critiques injustes mais que nous pouvons comprendre car malgré les efforts, malgré la vigilance accrue, qui peut dire que l’on peut être exemplaires ou irréprochables. »
Une situation financière tendue
La santé financière de la CAF est par exemple loin d’être rose. Une quinzaine de minutes a été consacrée à l’approbation des comptes pour l’exercice 2018-2019 et à celle du budget pour la période 2020-2021. La CAF aurait ainsi généré 115 millions de dollars de recettes durant l’exercice fiscal 2018-2019 et aurait dépensé à peine moins. « Cela conduit à finir l’année avec un résultat opérationnel à l’équilibre, qui a dégagé un revenu de près d’un million de dollars », a indiqué le chef de l’administration (Secrétaire général) de la CAF, Abdelmounaïm Bah.
Le budget prévisionnel en revanche prévoit un déficit de 13,6 millions de dollars. Ce qui, au vu du contexte sanitaire mondial et du report de plusieurs compétitions (dont la CAN 2021), se comprend. Mais le président de la Commission des finances de la CAF, Fouzi Lekjaa, a à nouveau pointé du doigt un mal plus profond. « Les finances de la CAF s’inscrivent dans un déficit structurel, a tenu à rappeler le patron du foot marocain. Ceci est dû essentiellement à l’augmentation des charges et des distributions. Quand on décide d’augmenter la distribution à chaque fédération à hauteur de 200.000 dollars, quand on décide d’augmenter les prize moneys aux clubs et aux fédérations à l’occasion des différentes compétitions, quand on décide d’augmenter le nombre d’équipes nationales participant aux tournois de jeunes, évidemment l’impact augmente ».
Fouzi Lekjaa invite donc à trouver des solutions pour sortir la CAF de l’ornière : « Je pense qu’il est grand temps, et ça devient même un impératif, de revoir notre process footballistique pour qu’on puisse dégager suffisamment de ressources pour permettre à la CAF non seulement de survivre […] mais aussi de dégager des marges pour les investir dans le développement du football. »
par : David Kalfa
RFI