Alors que le Festival culturel international bobo, prévu du 25 au 29 mai 2021, à la Place du cinquantenaire de Bamako, approche à pas de géant, le Mouvement ‘’Présence Buwa Niimi’’, une plateforme d’associations bwas s’en démarque. Il dénonce le manque d’inclusivité, de visibilité et de respect de la part des organisateurs. Cette position qui n’était qu’un secret de polichinelle a été officialisée hier, au cours d’un point de presse organisé au centre Djoliba et animé par Me Habib KONE ; le Dr Jean-Paul KONE, Président de l’Association Eveil du Bwatun ; Pierre DAKOUO, Président de l’Association internationale des jeunes bwas
Le Conférencier principal, Me KONE a révélé que c’est par voie de presse que la communauté bobo a eu connaissance de l’organisation d’un Festival culturel international bobo. Au regard de l’enjeu de l’événement, a-t-il relaté, les organisateurs ont été approchés. C’était pour découvrir que le Directeur du festival, non moins Président de l’Association des Jeunes du Mali pour le Développement Humanitaire (AJMDH), Aboubacar DIAWARA, et le Président de la Commission national d’organisation du festival, Michel ZERBO, ont des noms qui n’ont aucune consonance bobo. Ce qui n’offusque pas outre mesure, assure le conférencier qui souligne que le peuple bobo fait partie de ceux qui ont intégré le plus d’ethnies. Il en veut pour preuve qu’il y a des COULIBALY, des DIARRA, des KOITA, des KEITA et même des SANGAGRE qui se revendiquent bwas à part entière et qu’on ne peut pas leur dénier cette identité.
Une autre preuve, c’est la révolte des bwas en 1916. Contrairement à ce que véhicule l’imaginaire populaire, a précisé Me KONE, il y avait des colonnes dogons, miniankas et dafings qui y ont pris part en soutien aux bwas. De même que les archers bwas ont pris part à la bataille du Mandé.
Autant de preuves qui font dire au conférencier que les bwas ont toujours vécu en symbiose avec leurs voisins.
Mais, la brouillerie a commencé lorsque les associations bwas ont demandé à prendre connaissance du contenu du document dans lequel sont consignées les activités projetées dans le cadre du festival. Elles ont été butées à un mur de silence de la part des organisateurs. Or, est convaincu Me Habib KONE, les bwas ont le droit de savoir ce qui sera présenté en leur nom au Mali et au monde entier.
Le refus obstiné des organisateurs de partager le programme des festivités, révèle le conférencier, tient du fait qu’ils estiment qu’ils sont une association au même titre que les associations bwas. « Depuis quand une association humanitaire a qualité pour faire de la promotion culturelle ? », s’interloque Me Habib KONE.
Il est d’autant plus intransigeant sur le contenu que selon des sources concordantes, ce festival qui bénéficie du soutien indéfectible des autorités au plus haut niveau sera financé sur fonds public.
Autre manquement inacceptable de la part des organisateurs, fustige Me KONE, il ressort, après investigation, qu’aucun chef de village, aucun maire, aucun président de conseil de cercle du bwatun (pays bo) n’a été associé à l’organisation de l’événement.
Pour les associations de bwas, en cavalant en solitaire, les organisateurs portent un coup de canif ravageur au thème principal retenu pour le festival : “culture et réconciliation nationale : Place des valeurs sociétales dans la gestion des questions identitaires, dans le processus de la paix et de la réconciliation nationale”. Point de doute pour ‘’Présence Bwa Niimi’’ qu’une telle attitude cavalière ne sert pas la cause de la réconciliation qui devrait commencer à l’échelle de la communauté.
Selon le conférencier, ce que les bwas demandent, c’est juste d’être davantage impliqués pour qu’ils s’organisent pour sortir ce qui peut l’être dans le cadre du festival, parce que le culturel est souvent à la lisière du cultuel. Une offre qui n’a pas reçu bonne grâce auprès des organisateurs. Ce qui suscite cette réflexion chez Me Habib KONE : « chez nous, quand il est question de groupe, les individus comptent peu ; quel que soit ce que tu veux donner, quand la manière n’y est pas, si la procédure n’est pas respectée, nous n’en voulons pas ». Il ajoute : « ce que nous demandons, c’est l’inclusion, le respect ; nous ne demandons pas autre chose. Nous n’avons rien contre le festival qui nous honore au contraire. Mais, nous voulons qu’on nous respecte, sinon nous ne sommes pas dedans ».
C’est sur la base du constat d’échec des démarches entreprises, de la persistance dans le mépris que les associations de bwas ont saisi le ministre de la Culture de l’artisanat et du tourisme pour lui signifier qu’elles se démarquaient du projet de festival. « Apparemment le ministre n’a pas bien compris le message. C’est pourquoi nous avons déposé une correspondance avant-hier mardi dans laquelle nous apportons tout l’argumentaire nécessaire qui sous-tend notre position par rapport à ce festival », ajouté Me KONE qui n’exclut pas qu’une révision de la copie de la part des organisateurs pourrait inverser favorablement la donne à leur niveau. Sinon, en l’état, c’est niet.
« Ceux qui soutiennent une autre position, cela les engage », a mis au point le conférencier.
Les deux autres conférenciers, à savoir le Dr Jean-Paul KONE, Président de l’Association Eveil du Bwatun ; Pierre DAKOUO, Président de l’Association internationale des jeunes bwas, ont conforté Me KONE dans ses déclarations.
PAR BERTIN DAKOUO
Source : INFO-MATIN