Dans son discours d’investiture ainsi que dans son adresse lors du 1er Conseil des ministres, il a évoqué une mise en œuvre intelligente et efficiente de l’accord en vue de créer les conditions optimales d’une paix durable. « Le président de la Transition a engagé le gouvernement à poursuivre le travail de mise en œuvre intelligente et efficiente de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger en vue de créer les conditions optimales d’une paix durable », peut-on lire dans le communiqué officiel du Conseil des ministres mis en ligne par le secrétariat général du gouvernement.
Le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga au cours du 1er conseil de cabinet ayant réuni les membres de son cabinet a plutôt mis en avant une relecture intelligente de document signé en 2015 par le gouvernement du président Ibrahim Boubacar Kéïta. « La révision consensuelle et inclusive de la Constitution, dans le respect de son article 118 et la relecture intelligente de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger (APR) dans le respect des principes fondamentaux énoncés seront poursuivies et approfondies. L’APR constitue l’une de nos grandes priorités ».
A la lecture de ces extraits, des divergences apparaissent clairement entre les deux têtes de l’exécutif sur un dossier qui peine à avancer depuis sa signature. Le front interne contre le document issu du processus d’Alger est loin de faiblir.
Dr. Soumana Sako, président d’honneur de la CNAS-Faso Hèrè (Convention nationale pour une Afrique solidaire) a attiré, le 14 juin dernier, l’attention du Premier ministre sur deux lignes rouges à ne pas franchir par les nouvelles autorités, à savoir : l’application de l’Accord antinational d’Alger et le projet de révision de la Constitution démocratique du 12 janvier 1992.
Le Front du Refus de la Mise en Œuvre de l’Accord d’Alger (FRAA), dugu tji Sêbin, réaffirme avec force sa volonté de lutter contre l’application en l’état de l’Accord d’Alger. « Un accord inique, illégitime au contenu néfaste pour la République du Mali, qui n’a rapporté au Mali que divisions et morts par milliers », souligne le coordinateur du FRAA, Ibrahima Kébé.
La coordination des Mouvements de l’Azawad (Cma) avait menacé les autorités de Transition après le « coup de force » contre Bah NDAW et Moctar Ouane. Une menace très prise au sérieux au sommet de l’Etat. En effet, le Col. Assimi Goïta a reçu en audience une délégation de la Cma en présence de Dr Choguel Kokalla Maïga afin de rassurer ceux qui contrôlent l’enclave désertique de Kidal. Malgré la présence de ses membres au sein du gouvernement de transition, la Cma reste sur sa garde, se restructure, retravaille ses alliances. Elle s’est rapprochée de façon spectaculaire du Gatia, considéré comme un obstacle majeur à la concrétisation de ses projets contre la République.
L’Algérie, le parrain de l’Accord, soupçonne un grand sabotage de ses efforts. Le président algérien est persuadé que certains s’opposent aux avancées de son pays sur le dossier malien. « Pour nous, il existe une volonté de saboter les accords d’Alger.. », a souligné Abdelmadjid Tebboune dans une interview publiée, le 2 juin dernier par le magazine français « Le Point ».
L’équipe de transition très fragilisée par les fractures internes et soumise à une pression forte de la communauté internationale, n’est pas en mesure de balancer en sa faveur le rapport de force nécessaire à une éventuelle modification de l’accord. Le Premier ministre n’a ni le temps ni les moyens de relire l’Accord. Comme la dissolution du Conseil national de transition qu’il qualifiait « d’illégal et d’illégitime », il va vite avaler sa langue sur le dossier de l’Accord pour la paix et la réconciliation.
Par Chiaka Doumbia