« Errare humanum est, perseverare diabolicum » ou encore « L’erreur est humaine, l’entêtement [dans son erreur] est diabolique ». Cette belle maxime attribuée à Sénèque décrit un peu la situation que vit actuellement le Mali. Si tous les acteurs politiques venaient à reconnaître leurs erreurs et à faire leur mea culpa, le pays ne s’en porterait-il pas mieux ?
Nombre de couacs et d’erreurs dans le processus de sortie de crise, avec notamment la signature de l’Accord pour la paix de 2015 ont conduit le pays à un enlisement. Une impasse qui n’a pas dissuadé les uns et les autres à aller tout de même à la présidentielle de juillet-août 2018. Les résultats de celle-ci sont encore contestés par certains acteurs politiques. Malgré leur validation par les institutions chargées de le faire comme la Cour constitutionnelle. Il s’en suivra une colère non dissipée chez les contestataires, dont le chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé.
Or, pour le président réélu, Ibrahim Boubacar Kéita alias IBK, aucun sacrifice n’est de trop lorsqu’il s’agit du Mali, de sa quiétude, de « l’honneur du Mali et du bonheur des Maliens ».
Réélu dans ce contexte de crise, ajouté à un mécontentement politique non-négligeable, il apparait clairement que le Mali se doit d’entamer une transition politique. Ce concept sous-entend une gouvernance d’ouverture, de concertations et de concessions. La preuve en est que le pays s’achemine vers une prorogation du mandat des députés. Ce que ne prévoit pas la Constitution. Cela ne peut sereinement se concevoir qu’après un dialogue politique pour un maximum de consensus sur le sujet. Pour une véritable entente politique. Ce n’est donc pas le moment d’une stratégie de répression des manifestations politiques, surtout si celles-ci ne menacent pas les institutions.
De même, en acceptant d’aller à une élection présidentielle, dont on sait les conditions d’organisations plutôt approximatives, les opposants n’ont-ils commis quelques erreurs de stratégie ? En prônant le boycott de rencontres préparatoires de grandes réformes pour le pays, ne commettent-ils pas des bévues, surtout que ce boycott pourrait ne pas bloquer l’opérationnalisation de ces projets ? Comment expliquer ces fautes partagées dans un pays aussi assombrit par la menace sécuritaire ?
La FIDH et l’AMDH, relève Jeune Afrique, « ont mené entre mai et juillet 2018 une vaste enquête dans le centre du Mali, en se focalisant sur les régions de Mopti et de Ségou. Ces deux organisations de défense des droits de l’Homme dépeignent des populations prises au piège entre les groupes djihadistes, les milices d’auto-défense et l’armée. Ces violences dans le centre ont causé 500 victimes civiles entre janvier et août 2018. S’y ajoute que ces deux dernières années, 1.200 civils y ont été tués, une cinquantaine de villages brûlés, poussant au moins 30.000 personnes à fuir la région. C’est également l’une des régions où l’on a le moins voté au cours de l’élection présidentielle qui a reconduit Ibrahim Boubacar Keïta au pouvoir. À cause de l’insécurité, plusieurs bureaux de vote n’ont pas pu ouvrir. ». En fait, précise Jeune Afrique, « depuis 2015, le centre du Mali, zone contrôlée par le chef djihadiste peul Kouffa et ses hommes, surnommés ‘les hommes de la brousse’, est touchée par la fièvre djihadiste. Si son influence prospère, c’est qu’il est en terrain fertile. » Sans oublier la poudrière du Nord du pays…
Au plan social, les populations se plaignent de la cherté, le front social bout toujours avec diverses revendications. L’argent ne circule pas, il y a une « tension de trésorerie », etc. Bref, il y a un mal-vivre qui doit inciter les plus hauts dirigeants du pays à consentir des sacrifices pour décrisper l’atmosphère. C’est pourquoi IBK, son principal challenger politique, Soumaïla Cissé et tous les leaders de la classe politique doivent prouver au peuple qu’aucun sacrifice n’est de trop lorsqu’il s‘agit du Mali !
Bruno D SEGBEDJI
Mali HORIZON