L’expert indépendant des Nations Unies au Mali, Alioune Tine, a tiré, jeudi 5 aout dernier, la sonnette d’alarme sur la dégradation de la situation sécuritaire et les violations de droits de l’homme, appelant à un sursaut national pour restaurer l’autorité de l’État. Tine a effectué une visite officielle dans notre pays du 26 juillet au 5 août.
Selon Alioune Tine, la violence se répand si rapidement dans notre pays qu’elle met en péril la survie même de l’État. En outre, l’expert indépendant des Nations Unies indique qu’au cour de sa en mission il a été informé d’une augmentation du taux d’exécutions extrajudiciaires, d’autres homicides, d’enlèvements de civils et de viols collectifs de femmes.
: « Je suis gravement préoccupé par la dégradation rapide et continue de la situation sécuritaire crée par la défaillance des institutions de l’État », a déclaré Alioune Tine lors d’une conférence de presse tenue au terme de sa visite au Mali.
Cette situation donne lieu à des attaques tous azimuts contre les populations civiles par des groupes armés tels Jamāʿat Nusrat al-islâm wal-muslimīn (JNIM) et l’Etat Islamique au Grand Sahara, note l’expert onusien.
L’Expert indépendant explique que les populations civiles du Nord (dans les Régions de Gao, Ménaka et Tombouctou) et celles du Centre à Bandiagara, Douentza, Mopti, San et Ségou, ainsi que les habitants du Sud notamment à Koutiala et Sikasso, subissent des violations de leurs Droits humains fondamentaux.
Ces violations s’inscrivent dans un contexte d’impunité généralisé, a-t-il indiqué.
L’opération de maintien de la paix des Nations Unies (MINUSMA) a recensé au moins 48 exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires commises par les forces de défense et de sécurité du Mali entre le 1er avril et 30 juin 2021, note l’Expert, ajoutant que ces chiffres sont en hausse de près de 55% par rapport aux trois premiers mois de l’année en cours durant lesquels la MINUSMA a documenté 31 cas.
« Il est grave de constater que les populations civiles subissent aussi des exactions de la part des forces de défense et de sécurité du Mali qui sont censées les protéger », regrette Alioune Tine.
Les femmes, premières victimes
L’augmentation des atteintes aux droits de l’homme commises par les groupes armés et les milices communautaire est encore pire, a-t-il déclaré.
« Les viols collectifs et autres violences à l’encontre des femmes sont en augmentation tout comme les attaques contre les esclaves », a annoncé l’expert de l’ONU.
Ensuite, selon M. Tine, la dégradation de la sécurité a un impact considérable sur la situation des Droits fondamentaux de la femme avec la récurrence inquiétante des cas de violence basée sur le genre, y compris les viols collectifs.
Il a signalé que la MINUSMA a documenté plusieurs viols collectifs en mars. Puis, dans les localités sous le contrôle ou l’influence des groupes extrémistes violents, les femmes sont forcées de porter le voile. Une vingtaine de cas de flagellations des femmes en guise de punition pour n’avoir pas porté le voile ou avoir porté le mauvais voile, auraient été signalés depuis le début de l’année.
L’Expert onusien a rappelé que les femmes continuent d’être sous-représentées dans la sphère publique et politique au Mali, en violation de la loi no 2015-052 du 18 décembre 2015, qui fixe un quota d’au moins 30 % de femmes aux fonctions nominatives et électives.
Il a estimé que la politique aujourd’hui ne produisait plus du sens ne donnait plus l’espoir d’une meilleure vie pour les populations.
”Certaines personnes que nous avons rencontrées lors de notre visite ont exprimé de sérieux doutes sur la volonté politique des autorités maliennes de prendre des mesures concrètes pour garantir la sécurité des populations civiles”, a expliqué Alioune Tine.
Selon lui, cette situation se passe en particulier dans les régions les plus touchées par la crise et les conflits. “Cela doit absolument changer, il faut un sursaut national et une volonté inébranlable des autorités maliennes avec le soutien actif de leurs partenaires pour restaurer l’autorité de l’État et assurer la protection des populations civiles” affirme-t-il.
Selon lui, les autorités se sont engagées à prendre des mesures pour répondre à ces préoccupations et améliorer la situation de droits de l’homme.
En effet , Lors de sa visite, M. Tine a notamment rencontré le Premier Ministre, le Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, le Ministre de la Défense et des anciens combattants, le Ministre de la justice et des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux, le Ministre de la Refondation de l’Etat chargé des relations avec les institutions, le ministre de la Réconciliation, de la Paix et de la Cohésion nationale, chargé de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale, le Président de la Commission nationale des Droits de l’Homme et les Autorités judiciaires.
Mémé Sanogo