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Dossier Wagner : ce qui attend le Mali

C’est assurément un discours de rupture avec la France-tout au moins au plan de la coopération militaire et sécuritaire-que le premier ministre Choguel Maïga a prononcé, samedi 25 septembre, devant l’assemblée générale de l’ONU à New-York. Le pays qui a stoppé l’avancée des djihadistes vers le sud en janvier 2013, qui a été, jusque-là, le principal allié du Mali dans la lutte contre le terrorisme, qui vient de perdre un énième soldat, la veille 24 septembre, dans une confrontation avec l’ennemi, est accusé d’  » abandon en plein vol« .

 

Peu importe pour le chef du gouvernement de la transition que la ministre française des armées, Florence Parly, se soit déplacée, la semaine dernière à Bamako, pour tenter de convaincre le président de la transition, colonel Assimi Goïta et le ministre de la défense, colonel Sadio Camara, que la France ne se retire pas du Mali, qu’elle intègre son dispositif réaménagé dans une coalition internationale articulée autour de la task force Takuba et continuera à tenir sa place, avec la même détermination, dans la neutralisation des forces obscurantistes, ennemies de la liberté et du progrès de l’humanité.

Sa résolution est prise et il n’en démord pas. Paris est coupable d’avoir décidé tout seul,  » sans consultation ni concertation  » avec le Mali, « ce réaménagement » qui, cela ne souffre pas le moindre doute dans son esprit, cache un vrai retrait. Il en paiera donc le juste prix par l’occupation des emprises qu’il aura « abandonnées » (les bases de Kidal, Tessalit et Tombouctou) par de nouvelles forces, en l’occurrence les mercenaires   du groupe russe Wagner qu’il se gardera de nommer. Ce dont se chargera le ministre des Affaires étrangères de la fédération de Russie, Serguei Lavrov qui déclare à la presse :  » Les autorités maliennes se sont tournées vers une société militaire privée russe parce que la France veut réduire considérablement son contingent qui était censé lutter contre le terrorisme au nord « . Et d’ajouter un rien perfide : »Mais ils (les Français) n’ont rien fait et ce sont les terroristes qui mènent la danse « . Et pour terminer :  » Nous(le gouvernement russe) n’avons rien à voir avec ça. Cette activité est exercée sur des bases légales entre un gouvernement légitime et une société privée . »

Les conséquences d’un déploiement de  » paramilitaires  » russes seront désastreuses pour le Mali à bien des égards. Il va perdre, d’un seul coup et cette fois-ci pour de vrai tous ses alliés traditionnels dans la lutte contre le terrorisme : la France ( Barkhane) l’Union européenne (Takuba) les États-Unis d’Amérique qui jouent un rôle précieux dans le renseignement. La MINUSMA, dont Choguel souhaite qu’elle fasse la guerre, ne pourra même plus faire ce qu’elle réussit le mieux : l’appui logistique aux autorités et l’assistance humanitaire aux populations touchées par les conflits armés car elle verrait ses ressources diminuées par un repli de ses bailleurs américains et européens. Le Tchad, qui possède plus gros contingent en son sein, a déjà annoncé qu’il va le retirer. La force conjointe du G5 Sahel continuera vraisemblablement à fonctionner mais davantage au profit du Burkina Faso et du Niger que du Mali qui devrait s’attendre à être marginalisé.

Le pire sera devant nous lorsque Choguel Maïga va matérialiser sa promesse de tenir  » dans les jours prochains  » les Assises nationales de la refondation de l’Etat dont il attend qu’elles décident de proroger la transition. Le Mali, déjà interdit des réunions de la CEDEAO et de l’Union africaine, se verra confiné dans un isolement diplomatique, économique et financier quasi  total. Et ce n’est pas la fédération de Russie, géant nucléaire certes mais puissance économique moyenne très éprouvée par les sanctions européennes, qui le sortira de la situation de détresse où il se sera mis.Très vite la rue dictera sa volonté aux tenants d’un pouvoir qui n’a ni légalité ni légitimité pour se maintenir à sa guise.

Un autre danger lié au débarquement de Wagner, annoncé comme imminent,  au nord du Mali : la CMA, l’ex-rebellion composée du MNLA, du HCUA et d’une partie du MAA, chacun d’eux  ayant conservé voire renforcé son arsenal de guerre, a fait savoir qu’elle prendrait  » toute sa responsabilité  » si cela venait à se produire. Faut-il comprendre qu’elle s’opposera au moyen de la force armée contre l’envahisseur venu de l’est européen ? Ou ira-t-elle jusqu’à proclamer de nouveau l’indépendance de l’Azawad, cette fois-ci dans un contexte international nettement défavorable au Mali ?

On ignore si, pendant que Choguel Maïga, en procureur impitoyable instruisait le procès de la France et celui de la MINUSMA dans sa maison-mère, le contrat avec Wagner (du nom du musicien préféré d’Adolf Hitler, le plus grand criminel de guerre de l’histoire de l’humanité) était signé ou pas. S’il ne l’était pas encore et s’il ne l’est pas toujours , les chefs militaires de la transition seraient bien avisés d’y renoncer. Et éviter ainsi à notre pays de nouvelles mésaventures dont il se relèverait difficilement.

Saouti HAIDARA

Source : l’Indépendant

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