« L’aide doit aider à assassiner l’aide. Et si depuis des années, cette coopération n’a pas permis d’assassiner l’aide, il faut se poser des questions. Je suis tout à fait d’accord qu’effectivement, aujourd’hui, il faut revoir… » Tels sont certains des propos du Premier ministre burkinabé Albert Ouédraogo, parlant de la coopération entre son pays et la France. Comme le Mali, le Burkina Faso est-il sur la voie d’une crise diplomatique avec la France, surtout que les autorités actuelles promettent de diversifier leurs partenaires dans la lutte contre l’insécurité ? Le futur nous le dira.
Au Mali, les autorités de la transition, sous la conduite du colonel Assimi Goïta, ont opté pour la diversification des partenaires dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Une décision à la base de la frustration de la France et de ses alliés, qui sont allés jusqu’à la rupture avec le Mali. Cette diversification est qualifiée de collaboration avec « des mercenaires », malgré les démentis formels des autorités de la transition.
Le Burkina sur les traces du Mali
Le Burkina Faso, lui aussi, victime d’une méchante guerre terroriste, opte pour la diversification de ses partenaires. C’est en tout cas ce qui ressort de l’interview du Premier ministre Albert Ouédraogo sur la RTB. « Sur la question des partenariats, nous sommes dans une logique de diversification », a-t-il laissé entendre. Mieux, il a ajouté que si certains partenaires sont mécontents de cette décision, la rupture avec eux sera inévitable. «Si certains ne sont pas contents du fait que nous allons avec d’autres, ce sera donc à notre corps défendant que nous allions rompre avec eux », a-t-il annoncé. Pourtant, tout le problème du Mali avec la France et ses partenaires est parti de cette diversification de partenariat.
Comme le Mali, le Burkina, selon son Premier ministre, souhaite des principes sincères dans un partenariat gagnant-gagnant. « Sur la question militaire, le partenariat est fondé sur le principe de l’indépendance territoriale. Dans cette logique de partenariat, il n’est pas question pour nous que des troupes étrangères viennent mener le combat que nous menons à l’heure actuelle à la place des forces de défense et de sécurité », a souligné Albert Ouédraogo.
La question de la France
Nombreux sont les Burkinabè qui réclament la rupture de collaboration avec la France dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Interrogé sur la question, le Premier ministre Ouédraogo dit comprendre ces revendications d’une partie de la population. A analyser son discours, la coopération avec la France n’a pas porté fruit. « Il faut dire que l’aide doit aider à assassiner l’aide. Et si depuis des années, cette coopération n’a pas permis d’assassiner l’aide, il faut se poser des questions. Je suis tout à fait d’accord qu’effectivement, aujourd’hui, il faut revoir », a-t-il indiqué. Aussi, le Premier ministre a-t-il ajouté : « Il faut également dire que nous, en tant que dirigeants, nous ne pouvons pas continuer à rester sourds, à rester insensibles à ces revendications, parce que nous avons des composantes importantes de notre peuple qui le réclament. Il faut qu’à un moment donné que nous puissions regarder cela ».
Même s’il soutient qu’il n’y a aucun problème entre le burkinabè et le peuple français, le Premier ministre burkinabé admet qu’il y a des problèmes en termes de relation de coopération, de politiques entre gouvernements.
De tels propos du Premier ministre burkinabé à un moment où les populations, de plus en plus exigeantes, réclament la rupture avec la France, prouve le malaise profond. Et si, dans le cadre de la diversification, le Burkina Faso se dirige vers la Russie comme le cas du Mali, la France risque d’être frustrée. ET dans ce cas, la crise diplomatique sera inévitable.
Boureima Guindo
Source: LE PAYS