Si le document “arrangement sécuritaire autour de Ménaka” pour une cessation des hostilités sur le terrain, dans le cadre de la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger est contesté par la Plate-forme d’autodéfense Gatia, il l’est aussi à Bamako, en raison de ses engagements qui menacent la cohésion et le caractère laïc du pays. Selon certains leaders de la société civile et politique, par ce document, le gouvernement viole les principes d’intégrité territoriale et fait Ménaka une zone étrangère.
Soixante-douze heures après la matérialisation d’un protocole d’accord dénommé « arrangement sécuritaire autour de Ménaka » pour une cessation des hostilités sur le terrain, dans le cadre de la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, le document signé par le chef de la délégation malienne, Abdoulaye Diop, essuie des critiques acerbes. Même si des actions concrètes n’ont pas encore eu lieu, des leaders de la société civile et de la classe politique se sont lâchés et invitent les Maliens à protester contre le document.
« C’est un mépris vis-vis du peuple malien. Ce document ne résout en rien les questions fondamentales relatives à la stabilité du pays, à l’intégrité du territoire, à l’unité nationale et à la réconciliation nationale. Au contraire, il rendra les choses plus dures. C’est pourquoi j’exprime mon opposition au document qui met en cause la souveraineté du pays », analyse le président du Réseau co-entreprenariat Djogonimaya, Seydou Idrissa Traoré.
Pour lui, le gouvernement du Mali a pêché un poisson du désert. « Après la signature de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger dont la communauté internationale a été témoin, la situation de Ménaka seule ne devait plus intervenir. Pourquoi Kidal n’a pas été l’objet des discussions ? Ménaka a un enjeu particulier ? En tout cas, les autorités viennent de commettre une très grave erreur. Mais que le gouvernement et ses partenaires le sachent une fois pour toutes : en quelle que langue qu’ils s’expriment, les forces vives de la nation seront toujours aux remparts pour démasquer tous les complots contre le pays », avertit-il.
Selon le porte-parole de l’Union contre l’accaparement des terres, Mansa Koné, c’était prévisible, puisque le gouvernement ne fait pas de la question un intérêt national. « Le gouvernement gère mal l’équation. Or, le cadre institutionnel démocratique qui prévaut au Mali autorise et favorise la recherche de solutions pacifiques et politiques à tous les conflits internes… »
Cependant, dit-il, l’enjeu doit mobiliser le gouvernement pour une action concertée. « A tout moment, les rebelles donnent une leçon de morale au gouvernement. Ce groupuscule fait savoir à chaque rencontre qu’il informera la base avant d’apposer une signature. Mais le gouvernement ne fait jamais ça. Au moment de sonner la mobilisation populaire, le pouvoir public traite la société civile et la classe politique de citoyens de seconde classe n’ayant rien à dire sur l’avenir du Mali. C’est une manœuvre cousue de fil blanc. Le complot est patent et s’ajoute à la longue liste de tentatives éhontées de sabotage de la résistance populaire à la démission nationale et à la partition du pays. La société civile n’acceptera pas. Elle va manifester farouchement contre à ce document », annonce Mansa Koné.
Pour le chargé à la communication du PDES, Nouhoum Togo, les Maliens regrettent aujourd’hui du fait que les autorités n’ont pas cru devoir procéder à de véritables concertations sur les questions de fond dans le processus. « Le retrait du Gatia de Ménaka est une très grande menace à la paix et s’ajoute aux zones d’ombres sur le document signé… », a-t-elle souligné.
« L’absence, maintes fois dénoncée, de vision refondatrice de nos institutions et le cap du gouvernement dans la résolution du conflit se reflète dans le document signé qui n’envisage pas l’avenir du Mali entier, dans son unité, sa dignité, sa sécurité et sa prospérité », dénonce Nouhoum Togo. Et d’ajouter qu’en plus de l’appellation de l’intégration des rebelles, la disposition qui consiste à assurer une meilleure représentation des populations du Nord du Mali dans les institutions et grands services publics est une violation de la Constitution, des règles et valeurs républicaines, qui ne sauraient admettre ni une administration partisane, ni une administration communautariste…
Selon M. Togo, au regard de l’architecture du nouveau document, les multiples engagements, le calendrier de mise en œuvre, les capacités de l’Etat et des collectivités rendent difficiles son application.
Conscient de l’impérieuse nécessité pour notre pays de parvenir à une paix définitive, le chargé à la communication du PDES (ex-majorité présidentielle sous ATT) demande au gouvernement d’entendre les inquiétudes et les angoisses du peuple malien afin que les solutions préconisées aujourd’hui ne soient pas source d’une plus grande déstabilisation du Mali et de ses communautés.
Bréhima Sogoba
source : L’Indicateur du Renouveau