La corruption qui gangrène tous les secteurs de la vie publique dans notre pays est de nos jours devenue un mode de fonctionnement normal.
Le mauvais exemple venant très souvent des milieux les plus nantis.
A quoi bon se bercer d’illusions ! “Au Mali, tous, nous sommes corrompus”, fait remarquer cette dame qui tient un “chantier” et un restaurant dans sa propre maison.
“Ici, c’est comme ça”, explique pour sa part cet homme d’affaires précisant même que, “c’est une spécificité malienne… Bouffer, c’est devenu normal”.
La corruption qui grippe tous les rouages de la vie du pays, et plus particulièrement l’administration, est devenue un mode de fonctionnent normal.
Ainsi, selon ce jeune fonctionnaire, géomètre chargé du relevé de terrains qui doivent être morcelés, discutant avec l’un de ses amis : “Tu sais le travail marche mal…”, se plaint-il. “Mais, s’étonne l’ami, tu es toujours fonctionnaire ?” Sa réponse est révélatrice : “Oui, mais il n’y a pas assez de clients”.
Pour lui, son travail ne consiste pas à effectuer une tâche pour laquelle il perçoit un salaire de l’Etat, mais à faire des affaires en faisant payer une certaine somme d’argent à chaque “client” qui a besoin d’un relevé.
Au Mali, en effet, dans les services publics, tout se paye et rares sont ceux qui le contestent.
Chacun sait que, pour obtenir des marchés ou certains documents administratifs, il faut payer…
Pour réussir un concours ou obtenir un diplôme, il est plus sûr, dans de très nombreux cas, d’avoir un parent pourvu de moyens suffisants pour amadouer les professeurs.
Tour à tour, corrupteurs et corrompus, chacun a sa part de responsabilité dans ce fléau qu’est la corruption.
Ainsi, ce chauffeur de taxi interrogé à propos de l’attitude des policiers de la circulation explique : “nous, on préfère payer 500 Fcfa ou 1 000 Fcfa au policier que 5 000 Fcfa au GMS”.
Dans l’administration, “bouffer, c’est devenu normal”
La crise économique et financière actuelle a étendu ces méthodes à d’autres secteurs, chacun cherchant à compléter ses fins de mois.
A qui se fier désormais ?
Aux médecins dont nombre, de mèche avec les pharmaciens de quartier touchent une commission sur les médicaments vendus et allongent sans utilité les ordonnances ?
A ceux qui prescrivent des examens de laboratoire sans rapport avec la maladie afin d’avoir leur pourcentage sur les examens effectués ?
Aux juges censés défendre les honnêtes gens, mais qui ont pris l’habitude de se renseigner auprès des avocats avant les procès pour savoir combien sont prêts à payer les uns et les autres afin d’avoir gain de cause ?
Aux journaux qui ne cessent de dénoncer les “détournements de fonds” et la corruption dont usent les partis politiques, mais qui ne sont pas à l’abri de ces pratiques ?
Nombre de Maliens sont conscients de la perversité du phénomène de la corruption et de ses conséquences néfastes sur le développement du pays.
Englués dans ce système qui n’épargne aucun secteur de la vie quotidienne, ils se sentent toutefois impuissants à le combattre.
Pour eux, rien ne bougera, si l’exemple ne vient pas d’en haut.
Or, de ce côté-là, c’est le statu quo.
Malick Camara
Source : 26 Mars