Le Royaume-Uni préparait jeudi le rapatriement de ses touristes de Charm el-Cheikh au moment où le président égyptien rencontrait àLondres le Premier ministre David Cameron, ce dernier jugeant “plus que probable” qu’une bombe ait causé le crash de l’avion russe dans le Sinaï.
Londres a suspendu mercredi soir “par précaution” les vols entre Charm el-Cheikh et le Royaume-Uni à la suite du crash qui a fait 224 morts samedi dans le désert du Sinaï.
David Cameron a souligné jeudi que ces mesures avaient été prises avant même de connaitre les résultats de l’enquête menée en Egypte “en raison de renseignements et d’informations que nous avons reçues nous faisant craindre qu’il était plus que probable qu’il s’agisse d’une bombe terroriste”.
M. Cameron a indiqué que les autorités britanniques travaillaient avec les Egyptiens sur des mesures d’urgence visant à rapatrier les quelque 20.000 touristes britanniques présents à Charm el-Cheikh, où une petite équipe de l’armée britannique a été envoyée.
“Je veux être sûr que (les ressortissants britanniques) puissent rentrer à la maison en toute sécurité”, a insisté M. Cameron, souhaitant, à terme, une reprise des vols.
Il a également annoncé qu’il allait appeler le président russe Vladimir Poutine pour évoquer les circonstances de l’accident.
-“Spéculations” selon le Kremlin-
Cinq jours après la catastrophe aérienne, la pire qu’ait jamais connue la Russie, les causes du crash de l’Airbus A321 de la compagnie charter russe Metrojet, peu après son décollage de la station balnéaire de Charm el-Cheikh, ne sont pas officiellement établies.
Le groupe jihadiste Etat islamique (EI) a réaffirmé mercredi être à l’origine du drame.
Au Caire, les enquêteurs ont extrait les données de l’une des deux boîtes noires, celle des paramètres de vol, tandis que celle contenant les conversations de l’équipage, endommagée, demandera beaucoup de travail. Ils espèrent que l’examen des enregistreurs de vols permettra de trancher entre les deux hypothèses envisagées: défaillance technique ou attentat.
A Washington comme à Londres, on privilégie ouvertement la deuxième thèse. Un haut responsable américain, s’exprimant sous couvert d’anonymat, a jugé “hautement probable” l’hypothèse d’une bombe à bord. Les chaînes CNN et NBC ont cité des responsables du renseignement américain privilégiant la même piste.
Le Kremlin en revanche a qualifié jeudi de “spéculations” toute hypothèse sur les raisons du crash, soulignant qu’il n’y avait “aucune annonce des enquêteurs pour l’instant”.
Même son cloche au Caire, où le ministre de l’Aviation civile Hossam Kamal a affirmé que les enquêteurs “n’avaient pas encore de preuve ni de données confirmant l’hypothèse” d’une bombe.
Le responsable a en outre affirmé que l’aéroport de Charm el-Cheikh répondait “aux normes internationales en termes de mesures de sécurité”, alors que des critiques ont afflué depuis le crash.
“J’ai été choquée par le manque de sécurité”, a ainsi déclaré dans les médias britanniques une touriste, Verna McKeich, affirmant qu’une “personne qui s’occupait du scanner jouait à Candy Crush sur son téléphone”.
Les Pays-Bas ont de leur côté fait part de leur “préoccupation quant à la sécurité” de l’aéroport, et David Cameron a lui demandé “davantage de sécurité”.
Le crash était au menu d’une rencontre en milieu de journée de M. Cameron avec le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, qui effectue à Londres une visite controversée.
Sa venue a été critiquée par l’opposition britannique, qui dénonce son sombre bilan en matière des droits de l’Homme: plus de 1.400 manifestants réclamant le retour de l’ex-président Mohammed Morsi tués, plus de 15.000 Frères musulmans et sympathisants emprisonnés, des centaines de condamnés à mort dans des procès de masse expéditifs.
-La Russie enterre ses victimes-
Et pour la deuxième fois en deux jours, une manifestation hostile à M. Al-Sissi a rassemblé plus de 200 personnes près de Downing Street.
Dans la foulée des Britanniques, l’Irlande a également demandé à ses compagnies de suspendre leurs vols vers et en provenance de la station balnéaire égyptienne, dont l’aéroport accueille chaque jour des milliers de touristes venus passer des vacances sur la mer Rouge.
Un vol de la compagnie aérienne Jetair qui devait décoller jeudi de Bruxelles pour Charm el-Cheikh a été reporté d’au moins 24 heures. En Europe, d’autres compagnies maintenaient toutefois leurs vols, comme Egypt Air à Rome, tandis qu’en Suisse les tour-opérateurs proposaient toujours jeudi des voyages vers Charm el-Cheikh.
L’Airbus A321 s’était écrasé 23 minutes après avoir décollé, tuant ses 217 passagers, la plupart originaires de Saint-Pétersbourg (nord-ouest de la Russie), et ses sept membres d’équipage. Les recherches se poursuivent pour retrouver les derniers corps et des indices dans une vaste zone désertique.
La Russie a commencé jeudi à enterrer ses premières victimes. A Novgorod, une ville de 200.000 habitants située 200 km au sud de Saint-Pétersbourg (nord-ouest), Nina Louchtchenko, âgée de 60 ans, a été enterrée en présence de plusieurs centaines de personnes.
“Nous travaillions ensemble. Je n’arrive pas encore à croire à ce qui s’est passé”, a confié à l’AFP Tamara Timofeïeva, qui travaillait avec elle à la cantine d’une école de Novgorod, où a été organisée une cérémonie funéraire en l’honneur de la victime.