La Procureure: « Le retour de Gbagbo va exacerber les tensions »
Ce que Me Altit demande aux Juges
Fatou Bensouda, Procureure de la Cour pénale internationale (Cpi) est opposée à l’ouverture du procès de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé à Abidjan.
En réponse à la requête d’Emmanuel Altit, avocat principal de Laurent Gbagbo, qui a émis le souhait de voir le procès s’ouvrir à Abidjan ou en Tanzanie, la Procureure gambienne a invité les juges de la Chambre de première instance, à rejeter cette demande. Dans une requête en date du 2 octobre 2015, la Procureure a justifié cette position par le risque que la Cpi ferait courir à la Côte d’Ivoire en accédant à cette requête de l’ancien chef d’Etat. « Il existe un risque que l’audience soit instrumentalisée par divers acteurs politiques. Le retour de LG (Laurent Gbagbo) et de CBG (Charles Blé Goudé) va exacerber les tensions politiques et sécuritaires actuelles. Il y a un risque élevé que tenir l’audience in situ va conduire à la mobilisation des partisans de LG (Laurent Gbagbo) et CBG (Charles Blé Goudé), conduisant à de violentes manifestations et des troubles, a expliqué Fatou Bensouda. Bien que la reprise des troubles à part entière et de la violence est peu probable, des incidents isolés pourraient intervenir pendant et après l’élection présidentielle ». L’accusation a, pour étayer son assertion, rappelé les précédentes décisions de l’instance internationale. « Le Procureur rappelle en outre les conclusions de la Chambre de première instance en sa neuvième décision sur la révision de la détention de M. Gbagbo, en date du 8 juillet 2015 (…). La Chambre de première instance a conclu que les éléments fournis par le Procureur, en particulier les appels à la libération de M. Gbagbo, un fait qui n’est pas réfuté par la Défense, illustre clairement l’existence du réseau de soutien de M. Gbagbo. L’existence d’un tel réseau comporte des risques de sécurité évidentes », a-t-elle ajouté non sans évoquer les questions liées à la logistique. « Il n’y a pas suffisamment de temps en vue de prendre les dispositions nécessaires, en vue du 10 novembre, date de début du procès », a souligné Bensouda. Pour ce qui est de l’autre option avancée par Emmanuel Altit, à savoir la Tanzanie, la procureure basée à La Haye estime «qu’il y a des problèmes logistiques et financiers évidents dans l’optique de la tenue des audiences à Arusha – y compris les démarches dans l’organisation du déplacement des deux accusés de La Haye, avec les parties, les participants et divers organes de la Cour . Ces questions ne sont pas compensées par un bénéficie aux communautés affectées. En effet, la tenue des déclarations liminaires en Tanzanie ne va pas rapprocher les procédures des communautés victimes en Côte d’Ivoire ». En outre, dans ses soumissions, l’ancienne ministre gambienne a rappelé que la Tanzanie organisera son élection présidentielle à l’instar de la Côte d’Ivoire, le 25 octobre prochain.
Du côté de la Défense, c’est une nouvelle requête qui a atterri sur la table de la Chambre de première instance, présidée par le juge Geoffrey Henderson, le 1er octobre 2015. Dans le document de 18 pages, l’avocat principal de l’ancien président ivoirien, a invité la Cour à autoriser des visites judiciaires en Côte d’Ivoire. Selon Emmanuel Altit, ces voyages permettront aux juges de mieux s’imprégner des conditions dans lesquelles les faits jugés se seraient produits. « Lorsque la visite a lieu sans que le défilé des témoins ait encore commencé, cela permet aux Juges – et aux parties – de se pénétrer sans idée préconçue du cadre géographique et topographique dans lequel vont s’insérer les témoignages qu’ils entendront », peut-on lire dans le document signé de l’avocat.
Abraham KOUASSI
Source : linfodrome