Après plusieurs reports, le tribunal militaire d’Abidjan a condamné ce mardi le commandant Anselme Séka Yapo, l’ancien chef de la sécurité rapprochée de l’ex-première dame Simone Gbagbo, à vingt ans de prison pour assassinat. Ce dernier était jugé avec sept autres officiers de l’ex-président Laurent Gbagbo pour des exactions commises durant la crise post-électorale de 2010-2011.
Vingt ans de prison, c’est le verdict prononcé par le procureur militaire à l’endroit du commandant Séka Yapo Anselme pour des crimes commis pendant la crise postélectorale.
Même s’il a été acquitté pour des faits de détournements de deniers publics et de matériels militaires, c’est son accusation pour homicide volontaire et coups et blessures qui lui ont valu cette peine.
Séka Yapo Anselme a été reconnu coupable d’avoir tué par balle le chauffeur de l’ex-ministre des Droits de l’homme, Joël N’Guessan, lors de la crise postélectorale de 2011. L’autopsie a révélé que le chauffeur en question avait été retrouvé mort calciné.
La veille du verdict, le commissaire du gouvernement Ange Kessi avait réclamé, lors de son réquisitoire, la prison à vie pour celui qu’il a désigné selon ses propres termes de « monstre qui avait trop tué » et de « tueur sanguinaire ». « Si cet homme est en liberté, la Côte d’Ivoire ne sera pas en paix », avait-il ajouté.
Pourvoi en cassation
Devant les juges, l’ancien chef de la sécurité de l’ex-première dame Simone Gbagbo a semblé plutôt calme à l’annonce du verdict. Il n’a pas réagi et n’a pas souhaité s’exprimer. Pour ses détracteurs, celui qu’on surnomme « Séka Séka », était un des chefs des escadrons de la mort. Mais pour ses avocats, qui avaient demandé la relaxe, il n’y a pas de preuves, les témoignages n’étaient pas convaincants et il n’y avait rien dans le dossier.
« Vingt ans c’est assez lourd. Nous avions un seul témoin à charge et il a dit fermement qu’il ne peut pas affirmer que c’est Séka qui a tiré parce qu’il faisait dos à l’action. Malgré cela le tribunal l’a retenu coupable des faits », déplore Maître Raoul Gohibi, avocat de la défense.
Le commandant Abéhi Jean Noel qui comparaissait aux côtés de Séka Yapo Anselme a quant à lui été condamné pour avoir déserté à l’étranger. Il a alors écopé d’une peine cinq ans d’emprisonnement. Tous les autres militaires qui comparaissaient à leur côté ont tous été reconnus non coupables des faits de violation de consignes.
Ainsi si le parquet à salué « des condamnations qui sonnent la fin de l’impunité », les avocats de la défense, eux, ne comptent arrêter la procédure après l’annonce du verdict. « Nous allons aller jusqu’au bout de nos efforts et de nos connaissances. Nous allons nous pourvoir en cassation parce que, pour nous, il s’agit de dire le droit dans sa plénitude », assure Maître Gohibi. La défense reconnaît cependant le travail abattu par le tribunal qui n’a pas suivi le commissaire du gouvernement lors de sa réquisition. Ce dernier réclamait pour les prévenus des peines plus lourdes que celles qui ont été prononcées.
D’autres affaires en cours
Autre réaction celle du frère du journaliste Guy-André Kieffer disparu en Côte d’Ivoire depuis 2004. En effet, le nom d’Anselme Séka Yapo est également cité dans cette affaire. Et pour Bernard Kieffer, cette condamnation ne doit pas faire oublier l’enquête en cours sur la mort du journaliste. La justice ivoirienne doit poursuivre son travail : « J’aurais aimé qu’il soit également jugé pour les faits qui ont été commis antérieurement à la crise postélectorale. Deuxièmement, j’aimerais que l’enquête judiciaire sur la disparition de mon frère Guy-André Kieffer se poursuive jusqu’au bout et que ceux qui ont été cités dans le dossier aient à en répondre en justice. Je n’ai pas beaucoup d’espoir de le retrouver vivant, mais qu’on retrouve au moins son corps, qu’on sache où il est. Et peut-être que des gens comme Séka Séka le savent. Peut-être que monsieur Séka Séka pourra solliciter un allègement de sa peine en nous disant ce qu’il sait sur l’affaire Guy-André Kieffer, puisque jusqu’à présent, il s’est bien gardé de le dire à la justice ».
Source: RFI